REVUE SPIRITE JOURNAL D'ETUDES PSYCHOLOGIQUES - 1868

Allan Kardec

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Février

Extrait des manuscrits d'un jeune médium breton

Les Hallucinés, les Inspirés, les Fluidiques et les Somnambules

Nos lecteurs se rappellent avoir lu, dans le courant de juin 1867, l'analyse du Roman de l'Avenir, que M. Bonnemère avait emprunté aux manuscrits d'un jeune médium breton qui lui avait remis ses travaux.

C'est encore dans ce volumineux recueil de manuscrits que l'auteur a trouvé ces pages écrites à l'heure de l'inspiration, et qu'il vient soumettre à l'appréciation des lecteurs de la Revue spirite. Il va sans dire que nous laissons au médium, ou plutôt à l'Esprit qui l'inspire, la responsabilité des opinions émises, nous réservant de les apprécier plus tard. De même que le Roman de l'Avenir, c'est un curieux spécimen de médiumnité inconsciente.

I

LES HALLUCINÉS

Nous avons peu de chose à dire sur l'hallucination, état provoqué par une cause morale qui influe sur le physique, et auquel se montrent plus volontiers accessibles les natures nerveuses, toujours plus promptes à s'impressionner.

Les femmes surtout, par leur organisation intime, sont portées à l'exaltation, et la fièvre se présente plus souvent chez elles, accompagnée de délire qui prend les apparences de la folie momentanée.

L'hallucination, il faut le reconnaître, touche par un petit côté à la folie, ainsi que toutes les surexcitations cérébrales, et tandis que le délire s'exhale surtout en paroles incohérentes, elle représente plus particulièrement l'action, la mise en scène. Mais c'est à tort cependant que parfois on les confond ensemble.

En proie à une sorte de fièvre intérieure qui ne se traduit au dehors par aucune perturbation apparente des organes, l'halluciné vit au milieu du monde imaginaire que crée, pour un moment, son imagination troublée ; tout est en désordre en lui comme autour de lui ; il porte tout à l'extrême : la gaieté parfois, la tristesse presque toujours, et des larmes roulent dans ses yeux pendant que ses lèvres grimacent un sourire maladif.

Ces visions fantastiques existent pour lui ; il les voit, les touche, en est effrayé. Mais cependant il conserve l'exercice de sa volonté ; il cause avec ses interlocuteurs et leur cache l'objet de ses terreurs ou de ses sombres préoccupations.

Nous en avons connu un qui, pendant environ six mois, assistait tous les matins à l'enterrement de son corps, ayant pleinement conscience que son âme survivait. Rien ne paraissait changé dans les habitudes de sa vie, et cependant cette pensée incessante, cette vue même parfois le suivait en tous lieux. Le mot de mort résonnait incessamment à son oreille. Quand le soleil brillait, dissipait la nuit ou perçait le nuage, l'effroyable vision s'évanouissait peu à peu et disparaissait à la fin. Le soir, il s'endormait, triste et désespéré, car il savait quel horrible réveil l'attendait le lendemain.

Parfois, lorsque l'excès de la souffrance physique imposait silence à sa volonté et lui enlevait cette puissance de dissimulation qu'il conservait d'ordinaire, il s'écriait tout à coup : ‑ Ah ! les voilà !… je les vois !… Et alors il décrivait à son entourage le plus intime les détails de la lugubre cérémonie, il racontait les scènes sinistres qui se déroulaient sous ses regards, où des rondes de personnages fantastiques défilaient devant lui.

L'halluciné vous dira les folles perceptions de son cerveau malade, mais il n'a rien à vous répéter de ce que d'autres viendraient lui révéler ; car, pour être inspiré, il faut que la paix et l'harmonie règnent dans votre âme, et que vous soyez dégagé de toute pensée matérielle ou mesquine ; quelquefois la disposition maladive provoque l'inspiration, c'est alors comme un secours que les amis partis les premiers viennent vous apporter pour vous soulager.

Ce fou, qui hier jouissait de la plénitude de sa raison, ne présente pas de désordres extérieurs perceptibles à l'œil de l'observateur ; ils sont nombreux cependant, ils existent et sont réels. Le mal est souvent dans l'âme, jetée hors d'elle-même par l'excès du travail, de la joie, de la douleur ; l'homme physique n'est plus en équilibre avec l'homme moral ; le choc moral a été plus violent que n'en peut supporter le physique : de là cataclysme.

L'halluciné subit également les conséquences d'une perturbation grave dans son organisme nerveux. Mais, ‑ ce qui rarement a lieu dans la folie, ‑ chez lui ces désordres sont intermittents et d'autant plus facilement curables, que sa vie est double en quelque sorte, qu'il pense avec la vie réelle et rêve avec la vie fantastique.

Cette dernière est souvent l'éveil de son âme malade, et si on l'écoute avec intelligence, on arrive à découvrir la cause du mal, que souvent il veut cacher. Parmi le flux de paroles incohérentes que lance au dehors une personne en délire, et qui semblent ne se rapporter en rien aux causes probables de sa maladie, il s'en trouvera une qui reviendra sans cesse et comme malgré elle, qu'elle voudrait retenir, et qui échappe cependant. Celle-là est la cause véritable et qu'il faut combattre.

Mais le travail est long et difficile, car l'halluciné est un habile comédien, et, s'il s'aperçoit qu'on l'observe, son esprit se jette dans d'étranges écarts et prend les apparences de la folie pour échapper à cette pression importune que vous paraissez décidé à exercer sur lui. Il faut donc l'étudier avec un tact extrême, sans le contredire jamais, ou essayer de rectifier les erreurs de son cerveau en délire.

Ce sont là diverses phases d'excitations cérébrales, ou plutôt d'excitations de l'être tout entier, car il ne faut pas localiser le siège de l'intelligence. L'âme humaine, qui la donne, plane partout ; c'est le souffle d'en haut qui fait vibrer et agir la machine tout entière.

L'halluciné peut, de bonne foi, se croire inspiré, et prophétiser, soit qu'il ait conscience de ce qu'il dit, soit que ceux qui l'entourent puissent seuls, à son insu, recueillir ses paroles. Mais ajouter foi aux indications d'un halluciné serait se préparer d'étranges déceptions, et c'est ainsi que trop souvent on a porté au passif de l'inspiration les erreurs qui n'étaient que le fait de l'hallucination.

Le physique est chose matérielle, sensible, exposée au grand jour, que chacun peut voir, admirer, critiquer, soigner ou tenter de redresser. Mais qui peut connaître l'homme moral ? Quand nous nous ignorons nous-mêmes, comment les autres nous jugeraient-ils ? Si nous leur livrons quelques-unes de nos pensées, il en est bien plus encore que nous celons à leurs regards et que nous voudrions nous cacher à nous-mêmes.

Cette dissimulation est presque un crime social. Créés pour le progrès, notre âme, notre cœur, notre intelligence sont faits pour s'épandre sur tous les frères de la grande famille, pour leur prodiguer tout ce qui est en nous, comme pour s'enrichir en même temps de tout ce qu'ils peuvent nous communiquer.

L'expansion réciproque est donc la grande loi humanitaire, et la concentration, c'est-à-dire la dissimulation de nos actions, de nos pensées, de nos aspirations est une sorte de vol que nous commettons au préjudice de tout le monde. Quel progrès se fera, si nous gardons en nous tout ce que la nature et l'éducation y ont mis, et si chacun agit de même à notre égard ?

Exilés volontaires, et nous tenant en dehors du commerce de nos frères, nous nous concentrons dans une idée fixe ; l'imagination obsédée cherche à s'y soustraire en poursuivant toutes sortes de pensées sans suite, et l'on peut arriver ainsi jusqu'à la folie, juste châtiment qui nous est infligé pour n'avoir pas voulu marcher dans nos voies naturelles.

Vivons donc dans les autres, et eux dans nous, afin que tous nous ne fassions qu'un. Les grandes joies, comme les grandes douleurs, nous brisent lorsqu'elles ne sont pas confiées à un ami. Toute solitude est mauvaise et condamnée, et toute chose contraire au vœu de la nature amène à sa suite d'inévitables, d'immenses désordres intérieurs.


II

LES INSPIRÉS


L'inspiration est plus rare que l'hallucination, parce qu'elle ne tient pas seulement à l'état physique, mais encore et surtout à la situation morale de l'individu prédisposé à la recevoir.

Tout homme ne dispose que d'une certaine part d'intelligence qu'il lui est donné de développer par son travail. Arrivé ou point culminant où il lui est accordé d'atteindre, il s'arrête un moment, puis il retourne à l'état primitif, à l'état d'enfant, moins cette intelligence même qui, chez l'un grandit chaque jour, et chez le vieillard s'amoindrit, s'éteint et disparaît. Alors, ayant tout donné, et ne pouvant plus rien ajouter au bagage de son siècle, il part, mais pour aller continuer ailleurs son œuvre interrompue ici-bas ; il part, mais en laissant la place rajeunie à un autre qui, arrivant à l'âge viril, aura la puissance d'accomplir à son tour une mission plus grande et plus utile.

Ce que nous appelons la mort n'est que le dévouement au progrès et à l'humanité. Mais rien ne meurt, tout survit et se retrouve par la transmission de la pensée des êtres partis les premiers qui tiennent encore, par la partie la plus éthérée d'eux-mêmes, à la patrie quittée, mais non oubliée, qu'ils aiment toujours, puisqu'elle est habitée par les continuateurs de leur vie, par les héritiers de leurs idées, auxquels ils se plaisent à insuffler par moments celles qu'ils n'ont pas eu le temps de semer autour d'eux, ou qu'ils n'ont pu voir progresser au gré de leurs espérances.

N'ayant plus d'organes au service de leur intelligence, ils viennent demander aux hommes de bonne volonté qu'ils apprécient, de leur céder pour un moment la place. Sublimes bienfaiteurs cachés, ils imprègnent leurs frères de la quintessence de leur pensée, afin que leur œuvre ébauchée se poursuive et s'achève en passant par le cerveau de ceux qui peuvent lui faire faire son chemin dans le monde.

Entre les amis disparus et nous, l'amour se continue, et l'amour, c'est la vie. Ils nous parlent avec la voix de notre conscience mise en éveil. Purifiés et meilleurs, ils ne nous apportent que des choses pures, dégagées qu'ils sont de toute partie matérielle comme de toutes les mesquineries de notre pauvre existence. Ils nous inspirent dans le sentiment qu'ils avaient dans ce monde, mais dans ce sentiment dégagé de tout alliage.

Il leur reste encore une part d'eux-mêmes à donner : ils nous l'apportent, en nous laissant croire que nous l'avons obtenue par notre seul labeur personnel. De là viennent ces révélations inattendues qui déroutent la science. L'esprit de Dieu souffle où il veut… Des inconnus font les grandes découvertes, et le monde officiel des académies est là pour les entraver au passage.

Nous ne prétendons pas dire que pour être inspiré, il soit indispensable de se maintenir incessamment dans les voies étroites du bien et de la vertu ; mais cependant ce sont d'ordinaire des êtres moraux auxquels on vient, souvent comme compensation des maux dont ils souffrent par le fait des autres, accorder des manifestations qui leur permettent de se venger à leur manière, en apportant le tribut de quelques bienfaits à l'humanité qui les méconnaît, les raille et les calomnie.

On rencontre autant de catégories d'inspirations, et d'inspirés par suite, qu'il existe de facultés dans le cerveau humain pour s'assimiler des connaissances différentes.

La lutte effraie les Esprits épurés partis pour des mondes plus avancés, et ils désirent qu'on les écoute avec docilité. Aussi les inspirés sont-ils généralement des êtres purs, naïfs et simples, sérieux et réfléchis, pétris d'abnégation et de dévouement, sans personnalité accusée, aux impressions profondes et durables, accessibles aux influences extérieures, sans parti pris sur les choses qu'ils ignorent, assez intelligents pour s'assimiler les pensées d'autrui, mais pas assez forts moralement pour les discuter.

Si l'inspiré tient à ses propres convictions, il prend, de bonne foi, leur écho pour l'avertissement des voix qui parlent en lui, et, de bonne foi aussi, il trompe au lieu d'éclairer. La bonté préside à ces révélations, qui n'ont jamais lieu que dans un but utile et moral à la fois.

Quand une de ces organisations sympathiques est souffrante par suite d'une déception cruelle ou d'un mal physique, un ami s'intéresse à elle et vient, en donnant un autre aliment à sa pensée, lui apporter du soulagement pour elle-même, mais surtout pour ceux qui lui sont chers.

Il n'est pas rare que l'inspiré ait commencé par être un halluciné. C'est comme un noviciat, une préparation de son cerveau à concentrer son esprit et à pouvoir accepter la chose qu'on lui dira.

Parce qu'un inspiré ne peut rien formuler de concluant à un certain moment, ce n'est pas à dire pour cela qu'il ne le pourra pas faire dans d'autres. Les manifestations demeurent libres, spontanées ; elles viennent quand il en est besoin. Aussi les inspirés, même les meilleurs, ne le sont-ils pas à jour et à heure fixes, et les séances annoncées à l'avance préparent souvent d'inévitables déceptions.

A faire de trop fréquentes évocations, on court risque de n'aboutir qu'à un état de surexcitation plus voisin de l'hallucination que de l'inspiration. Alors ce ne sont plus que les jeux de notre imagination en délire, au lieu de ces lumières d'un autre monde destinées à éclairer les pas de l'humanité dans sa route providentielle.

Ceci explique ces erreurs dont l'incrédulité se fait une arme pour nier d'une manière absolue l'intervention des Esprits supérieurs.

Les inspirés le sont par tous ceux qui, partis avant l'heure, ont quelque chose à nous apprendre.

Il peut arriver que la femme la plus simple, la moins instruite, ait des révélations médicales. Nous en avons vu une qui, sans savoir même ni lire ni écrire, trouvait en elle différents noms de plantes qui pouvaient guérir. La crédulité populaire l'avait presque forcée d'exploiter cette faculté. Aussi n'était-elle toujours également bien éclairée, encore qu'en tâtant le pouls de la personne malade, elle se mît en rapport avec elle : car elle était aussi de ces fluidiques dont nous parlerons tout à l'heure. Bien que faible et délicate, elle pouvait, par son contact, redonner l'équilibre à celui qui en manquait et remettre en circulation les principes vitaux arrêtés. Sans s'en rendre compte, elle faisait souvent, par ce simple attouchement, sur certaines personnes dont le fluide était identique avec le sien, plus de bien que par les remèdes qu'elle prescrivait, quelquefois par habitude seulement, et avec des variantes insignifiantes, quel que fût le mal pour lequel on la consultait.

La Providence a placé auprès de chaque homme un remède pour chaque maladie. Seulement il existe autant de natures différentes que d'individus. Les remèdes agissent différemment aussi sur chaque organisme, lequel influe sur les caractères du mal ; et c'est ce qui fait qu'il est presque impossible au médecin de prescrire le remède efficace. Il connaît ses effets généraux, mais il ignore absolument dans quel sens il agira sur tel sujet qu'on lui présente.

C'est ici qu'éclate la supériorité des fluidiques et des somnambules, puisque, lorsqu'ils se trouvent dans certaines conditions de sympathie avec ceux qui viennent les consulter, les êtres supérieurs les guident avec une infaillibilité presque certaine.

Souvent cette inspiration est inconsciente d'elle-même ; souvent un docteur, mais seulement auprès de certains malades, trouve subitement le remède qui peut les guérir. Ce n'est pas la science qui l'a guidé, c'est l'inspiration. La science mettait à sa disposition plusieurs modes de traitement, mais une voix intérieure lui criait un nom ; il a été forcé de le dire, et ce nom était celui du remède qui devait agir, à l'exclusion de tout autre.

Ce que nous disons de la médecine existe au même titre dans toutes les autres branches du travail humain. A certaines heures, le feu de l'inspiration nous dévore, il faut céder ; et si nous prétendons concentrer en nous-mêmes ce qui doit en sortir, une véritable souffrance devient le châtiment de notre révolte.

Tous ceux à qui Dieu a accordé le don sublime de création, les poètes, les savants, les artistes, les inventeurs, ont tous de ces illuminations inattendues, parfois dans un ordre de faits bien différent de leurs études ordinaires, si l'on a prétendu violenter leur vocation. Mais les Esprits savent ce que nous devons et pouvons faire, et ils viennent réveiller incessamment en nous nos attractions étouffées.

On sait comment Molière expliquait ces inégalités qui déparent les plus belles pièces de Corneille : « Ce diable d'homme, disait-il, a un génie familier qui vient par moments lui souffler à l'oreille des choses sublimes ; puis tout à coup il le plante là, en lui disant : « Tire-toi de là comme tu pourras ! » Et alors il ne fait plus rien qui vaille. » Molière était dans le vrai. Le fier génie de Corneille n'avait pas la docile passivité nécessaire pour subir toujours l'inspiration d'en haut. Les Esprits l'abandonnaient, et alors il s'endormait, comme Homère lui-même le faisait quelquefois.

Il en est, ‑ Socrate et Jeanne d'Arc étaient de ceux-là, ‑ qui entendent des voix intérieures qui parlent en eux. D'autres n'entendent rien, mais sont contraints d'obéir à une force victorieuse qui les domine.

D'autres fois, un nom vient frapper l'oreille de l'inspiré : c'est celui d'un ami, d'un individu qu'il ne connaît pas même, dont il a à peine entendu parler. La personnalité de cet ami inconnu le pénètre, s'infuse en lui ; des pensées étranges viennent se substituer peu à peu aux siennes. Il a pour un moment l'esprit de celui-là ; il obéit, il écrit, à son insu, malgré lui, s'il le faut, des choses qu'il ne sait pas. Et comme si cette obéissance passive à laquelle il est condamné lui était amère à supporter dans l'état éveillé, il fuit ces choses écrites sous une inspiration oppressive, et ne veut pas les lire.

Ces pensées peuvent être en désaccord formel avec ses croyances, avec ses sentiments, ou plutôt avec ceux que l'éducation lui a imposés, car, pour que certains Esprits viennent à lui, il faut qu'il existe quelques rapports entre eux. Ils lui donnent la pensée en lui laissant le soin de trouver la forme ; il faut donc qu'ils sachent que son intelligence peut les comprendre, et s'assimiler momentanément leurs idées pour les traduire.

C'est qu'il est rare que les circonstances nous aient permis de nous développer dans le sens de nos aptitudes natives. Les Esprits plus avancés savent quelle corde il faut toucher pour qu'elle entre en vibration. Elle était demeurée muette, parce que l'on avait attaqué les autres en négligeant celle-là. Ils lui rendent pour un moment la vie. C'est un germe longtemps étouffé qu'ils fécondent. Puis l'inspiré, revenu à son état habituel, ne se souvient plus, car il vit d'une existence double, dont chacune est absolument indépendante de l'autre.

Il arrive cependant aussi qu'il conserve une plus grande facilité de compréhension, et conquiert un plus grand développement intellectuel. C'est la récompense de l'effort qu'il a fait pour donner une forme saisissable aux pensées que d'autres sont venus lui révéler.

Ne croyons pas que tout inspiré puisse tout connaître. Chacun, suivant ses prédispositions naturelles, mais restées souvent inconnues à lui-même comme aux autres, est inspiré pour telle ou telle chose, mais ne l'est pas également pour toutes. Il existe en effet des natures tellement antipathiques à certaines connaissances, que les Esprits ne viendront jamais frapper à une porte qu'ils savent ne pas pouvoir s'ouvrir.

L'avenir n'est connu des inspirés que dans une certaine mesure. Aussi n'est-il pas vrai de dire qu'un inspiré a prédit dans quel monde telle personne ira après sa mort, et quel jugement Dieu prononcera sur elle. Ceci est un jouet de l'imagination hallucinée. L'homme, si haut qu'il soit monté dans l'échelle des mondes, ne connaît pas quelle sera la destinée de son frère. C'est la part réservée à Dieu : jamais la créature ne pourra empiéter sur ses droits.

Oui, il y a des manifestations, mais elles ne sont pas continuelles, et notre impatience à leur égard est souvent coupable.

Oui, tout se tient, et rien n'est rompu dans l'immense univers. Oui, il existe entre cette existence et les autres un lien sympathique et indissoluble qui relie et unit les uns aux autres tous les membres de la famille humaine, et qui permet aux meilleurs de venir nous donner la connaissance de ce que nous ne savons pas. C'est par ce labeur que s'accomplit le progrès. Qu'il s'appelle travail de l'intelligence ou inspiration, c'est la même chose. L'inspiration, c'est le progrès supérieur, c'est le fond : le travail personnel y met la forme, en y ajoutant encore la quintessence des connaissances antérieurement acquises.

Pas une seule invention ne nous appartient en propre, car d'autres ont jeté avant nous la semence que nous récoltons. Nous appliquons à l'œuvre que nous voulons poursuivre les forces et le travail de la nature qui est à tous, et sans l'aide de laquelle rien ne se fait, puis les forces et le travail accumulés par les autres qui nous ont préparé les moyens de réussir.

A bien dire, tout est œuvre commune et collective, pour confirmer encore ce grand principe de solidarité et d'association qui est la base des sociétés et la loi de la création tout entière.

Le travail de l'homme ne sera jamais rendu inutile par l'inspiration. L'Esprit qui vient nous l'apporter respectera toujours cette partie réservée à l'individu ; il la respectera comme une noble et sainte chose, puisque le travail met l'homme en possession des facultés que Dieu a déposées en germe dans son âme, afin que le but de sa vie fût de les féconder. C'est par leur développement qu'il a appris à se bien connaître, et qu'il a mérité de se rapprocher de lui.

L'inspiration vient indifféremment le jour, la nuit, dans la veille ou pendant le sommeil. Seulement elle exige le recueillement. Il lui faut rencontrer des natures qui puissent s'abstraire de toute préoccupation du monde réel, pour donner la place libre et vacante à l'être qui viendra l'envelopper tout entier et lui infuser ses pensées.

Aux heures de l'inspiration, l'homme devient beaucoup plus accessible à tous les bruits extérieurs, et tout ce qui vient du monde réel le trouble. Il n'est plus dans ce monde, il est dans un milieu transitoire entre celui-ci et l'autre, puisqu'il est en quelque sorte imbibé de la personne morale et intellectuelle d'un être monté dans une autre sphère, et que cependant son corps tient à celle-ci.

Bien qu'elle s'adresse à tous, l'inspiration descendra plus généralement sur les natures maladives ou usées par une succession de souffrances, matérielles ou morales. Puisqu'elle est un bienfait, n'est-il pas juste que ceux qui souffrent soient plus facilement aptes à la recevoir ?

L'hallucination est un état maladif que le magnétisme peut modifier d'une façon salutaire. L'inspiration est une assimilation morale qu'il faut se garder de provoquer par des passes magnétiques. L'halluciné se livre volontiers à des emportements, à des contorsions ridicules. L'inspiré est calme.

Les inspirés sont mélancoliques. Ils ont besoin d'être réfléchis ; pour être gai, il faut ne pas beaucoup réfléchir ; il faut jouir, dans sa santé, d'un équilibre que les inspirés ne possèdent pas toujours. Mais n'allons pas croire qu'ils soient difficiles et fantasques. Ils se montrent au contraire doux et faciles avec ceux qu'ils aiment.

Il y a des inspirés de plusieurs degrés. Les uns viennent vous dire des choses palpables, des faits de seconde vue, pour que l'on puisse constater la réalité de l'initiation. Les autres, plus clairvoyants et peu soucieux des procédés matériels dont ils ne sont pas appelés à divulguer les secrets, répètent, comme elles leur viennent, les pensées apportées par des Esprits de progrès. Les premiers guérissent le corps, les seconds sont les médecins de l'âme.

La mission des plus modestes se borne à révéler comment ces choses leur viennent. C'est un fait constaté que des puissances avancées de bien des degrés sur nous viennent nous dominer et nous inspirer. A quoi bon le répéter ? Croira qui voudra. Mais les constatations étant bien établies, il ne faut prendre des inspirés que le côté utile et sérieux. Peu importe, si les idées sont bonnes, de quelles sources elles viennent.

Eug. Bonnemère

Les vœux de bonne année d'un spirite de Leipzig

Un spirite de Leipzig a fait imprimer, en langue allemande, l'adresse suivante dont nous nous faisons un plaisir de donner la traduction.

MES SOUHAITS A TOUS LES SPIRITES ET SPIRITUALISTES DE LEIPZIG, POUR LA NOUVELLE ANNÉE.

A vous aussi qui vous nommez matérialistes, parce que vous ne voulez connaître que la matière, je serais tenté de vous envoyer mes souhaits de bonheur, mais je craindrais que vous ne considériez cela comme une hardiesse d'un étranger qui n'a pas le droit de se compter parmi vous.

Il en est autrement des Spiritualistes, qui sont sur le même terrain que les Spirites touchant la conviction en l'immortalité de l'âme, en son individualité et en son état heureux ou malheureux après la mort. Les Spiritualistes et les Spirites reconnaissent dans chaque homme une âme sœur de la leur, et par cela me donnent le droit de leur envoyer mes souhaits. Les uns et les autres remercient le Seigneur de l'année qui vient de s'écouler, et ils espèrent que, soutenus par sa grâce, ils auront le courage de supporter les épreuves des jours malheureux, la force de travailler à leur perfectionnement en domptant leurs passions.

A vous, chers Spirites, frères et sœurs connus et inconnus, je vous souhaite particulièrement une heureuse année, parce que vous avez reçu de Dieu, pour votre pèlerinage terrestre, un grand appui dans le Spiritisme. La religion est venue apporter à tous la foi, et bien heureux ceux qui l'ont conservée. Malheureusement, elle est éteinte chez un grand nombre ; c'est pourquoi Dieu envoie une nouvelle arme pour combattre l'incrédulité, l'orgueil et l'égoïsme qui prennent des proportions de plus en plus grandes. Cette arme nouvelle est la communication avec les Esprits ; par elle nous avons la foi, parce qu'elle nous donne la certitude de la vie de l'âme, et nous permet de jeter un coup d'œil dans l'autre vie ; nous reconnaissons ainsi la vanité du bonheur terrestre, et nous avons la solution des difficultés qui nous faisaient douter de tout, même de l'existence de Dieu.

Jésus a dit à ses disciples : « J'aurais encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pourriez encore les supporter. » Aujourd'hui, l'humanité ayant progressé peut les comprendre ; c'est pourquoi Dieu nous a donné la science du Spiritisme, et la preuve que l'humanité est mûre pour cette science, c'est que cette science existe. Il est inutile de nier et de railler, comme autrefois il était inutile de nier et de railler les faits avancés par Copernic et Galilée. Alors ces faits étaient aussi peu reconnus que le sont maintenant ceux du monde des Esprits. Comme autrefois, les premiers opposants sont les savants, jusqu'au jour où, se voyant isolés, ils reconnaîtront humblement que les nouvelles découvertes, comme la vapeur, l'électricité et le magnétisme, qui jadis étaient inconnus, ne sont pas le dernier mot des lois de la nature. Ils seront responsables devant les générations futures de n'avoir pas accueilli la science nouvelle comme la sœur des autres, et de l'avoir repoussée comme une folie.

Il est vrai qu'elle n'enseigne rien de nouveau en proclamant la vie de l'âme, puisque le Christ en a parlé ; mais le Spiritisme lève tous les doutes et jette une nouvelle lumière sur cette question. Gardons-nous, cependant, de considérer comme inutiles les enseignements du christianisme, et de les croire remplacés par le Spiritisme ; fortifions-nous, au contraire, à la source des vérités chrétiennes, pour lesquelles le Spiritisme n'est qu'un nouveau flambeau, afin que notre intelligence et notre orgueil ne nous égarent pas. Le Spiritisme nous apprend, avant toute chose, que : « Sans l'amour et la charité, il n'y a pas de félicité », c'est-à-dire qu'il faut aimer son prochain comme soi-même ; en s'appuyant sur cette vérité chrétienne, il ouvre la voie pour l'accomplissement de cette parole du Christ : « Un seul troupeau et un seul pasteur. »

Ainsi donc, chers frères et sœurs spirites, permettez qu'à mes souhaits pour la nouvelle année j'ajoute encore cette prière : que vous ne mésuserez jamais du pouvoir de communiquer avec le monde spirituel. N'oublions pas que, d'après la loi sur laquelle reposent nos relations avec les Esprits, les mauvais ne sont pas exclus des communications. S'il est difficile de constater l'identité d'un Esprit que nous n'avons pas connu, il est facile de distinguer les bons des mauvais. Ceux-ci peuvent se cacher sous le masque de l'hypocrisie, mais un bon Spirite les reconnaît toujours ; c'est pourquoi il ne faut pas s'occuper de ces choses légèrement, car on peut devenir le jouet d'Esprits mauvais, quoique intelligents, comme on en trouve parfois dans le monde des incarnés. Si nous comparons nos communications avec celles qui sont obtenues dans les réunions de Spirites fervents et sincères, nous saurons bientôt reconnaître si nous sommes dans la bonne voie. Les Esprits élevés se font reconnaître à leur langage qui est partout le même, toujours d'accord avec l'Evangile et la raison humaine.

Le moyen de se préserver des mauvais Esprits, c'est, d'abord, de faire une prière sincère à Dieu ; secondement, de ne jamais employer le Spiritisme pour les choses matérielles. Les mauvais Esprits sont toujours prêts à satisfaire à toutes les demandes, et si, parfois, ils disent des choses justes, le plus souvent ils trompent avec intention ou par ignorance, parce que les Esprits inférieurs n'en savent pas plus que pendant leur existence terrestre. Les bons Esprits nous aident au contraire dans nos efforts pour nous améliorer, et nous font connaître la vie spirituelle, afin que nous puissions l'assimiler à la nôtre. Tel est le but où doivent tendre tous les Spirites sincères.

Adolf, comte Poninski

Leipzig, 1er janvier 1868.



Instructions des Esprits

LES MESSIES DU SPIRITISME

1. ‑ Il vous a été dit qu'un jour toutes les religions se confondront dans une même croyance ; or, voici comment cela arrivera. Dieu donnera un corps à quelques Esprits supérieurs, et ils prêcheront l'Évangile pur. Un nouveau Christ viendra ; il mettra fin à tous les abus qui durent depuis si longtemps, et il réunira les hommes sous un même drapeau.

Il est né, le nouveau Messie, et il rétablira l'Évangile de Jésus-Christ. Gloire à sa puissance !

Il n'est pas permis de révéler le lieu où il est né ; et si quelqu'un vient vous dire : « Il est dans tel endroit », ne le croyez pas, car personne ne le saura avant qu'il soit capable de se révéler, et d'ici là, il faut que de grandes choses s'accomplissent pour aplanir les voies.

Si Dieu vous laisse vivre assez longtemps, vous verrez prêcher le véritable Évangile de Jésus-Christ par le nouveau Missionnaire de Dieu, et un grand changement sera fait par les prédications de cet Enfant béni ; à sa parole puissante, les hommes des différentes croyances se donneront la main.

Gloire à ce divin envoyé, qui va rétablir les lois mal comprises et mal pratiquées du Christ ! Gloire au Spiritisme qui le précède et qui vient éclairer toutes ces choses !

Croyez, mes frères, qu'il n'y a pas que vous qui recevrez de semblables communications ; mais tenez celle-ci secrète jusqu'à nouvel ordre.

(Saint Joseph ; Sétif (Algérie), 1861.)


Remarque. Cette révélation est une des premières de ce genre qui nous aient été transmises ; mais d'autres l'avaient déjà précédée. Depuis, il a été donné spontanément un grand nombre de communications sur le même sujet dans différents centres spirites de la France et de l'étranger, qui toutes concordent pour le fond de la pensée ; et comme partout on a compris la nécessité de ne pas les divulguer, et qu'aucune n'a été publiée, elles n'ont pu être le reflet les unes des autres. C'est un des plus remarquables exemples de la simultanéité et de la concordance de l'enseignement des Esprits quand le temps d'une question est arrivé. *

2. ‑ Il est incontestablement avoué que votre époque est une époque de transition et de fermentation générale ; mais elle n'est pas encore arrivée à ce degré de maturité qui marque la vie des nations. C'est au vingtième siècle qu'est réservé le remaniement de l'humanité ; toutes les choses qui vont s'accomplir d'ici là ne sont que les préliminaires de la grande rénovation. L'homme appelé à la consommer n'est pas encore mûr pour accomplir sa mission ; mais il est déjà né, et son étoile a paru en France marquée d'une auréole, et vous a été montrée en Afrique il y a peu de temps. Sa route est marquée d'avance ; la corruption des mœurs, les malheurs qui seront la suite du déchaînement des passions, le déclin de la foi religieuse, seront les signes précurseurs de son avènement.

La corruption au sein des religions est le symptôme de leur décadence, comme elle est celui de la décadence des peuples et des régimes politiques, parce qu'elle est l'indice d'un manque de foi véritable ; les hommes corrompus entraînent l'humanité sur une pente funeste, d'où elle ne peut sortir que par une crise violente. Il en est de même des religions qui substituent au culte de la Divinité le culte de l'argent et des honneurs, et qui se montrent plus avides des biens matériels de la terre que des biens spirituels du ciel.

(Fénelon ; Constantine, décembre 1861.)


3. ‑ Lorsqu'une transformation de l'humanité doit s'opérer, Dieu envoie en mission un Esprit capable, par ses pensées et par une intelligence supérieure, de dominer ses contemporains, et d'imprimer aux générations à venir les idées nécessaires pour une révolution morale civilisatrice.

De temps à autre, on voit ainsi s'élever au-dessus du commun des hommes des êtres qui, comme des phares, les guident dans la voie du progrès, et leur font franchir en quelques années les étapes de plusieurs siècles. Le rôle de quelques-uns est borné à une contrée ou à une race ; ce sont comme des officiers en sous-ordre conduisant chacun une division de l'armée ; mais il en est d'autres dont la mission est d'agir sur l'humanité tout entière, et qui ne paraissent qu'aux époques plus rares qui marquent l'ère des transformations générales.

Jésus-Christ fut un de ces envoyés exceptionnels ; de même vous aurez, pour les temps venus, un Esprit supérieur qui dirigera le mouvement d'ensemble, et donnera une cohésion puissante aux forces éparses du Spiritisme.

Dieu sait à point modifier nos lois et nos habitudes, et quand un fait nouveau se présente, espérez et priez, car l'Éternel ne fait rien qui ne soit selon les lois de divine justice qui régissent l'univers.

Pour vous qui avez la foi, et qui avez consacré votre vie à la propagande de l'idée régénératrice, cela doit être simple et juste ; mais Dieu seul connaît celui qui est promis ; je me borne à vous dire : Espérez et priez, car le temps est venu, et le nouveau Messie ne vous manquera pas : Dieu saura le désigner en son temps ; et d'ailleurs c'est par ses œuvres qu'il s'affirmera.

Vous pouvez vous attendre à bien des choses, vous qui en voyez tant d'étranges par rapport aux idées admises par la civilisation moderne.

(Baluze ; Paris, 1862.)


4. ‑ Voici une question qui se répète partout : Le Messie annoncé est-il la personne même du Christ ?

Auprès de Dieu sont des Esprits nombreux arrivés au sommet de l'échelle des Esprits purs, qui ont mérité d'être initiés à ses desseins pour en diriger l'exécution. Dieu choisit parmi eux ses envoyés supérieurs chargés des missions spéciales. Vous pouvez les appeler Christs : c'est la même école ; ce sont les mêmes idées modifiées selon les temps.

Ne soyez donc pas étonnés de toutes les communications qui vous annoncent la venue d'un Esprit puissant sous le nom du Christ ; c'est la pensée de Dieu révélée à une certaine époque, et qui est transmise par le groupe des Esprits supérieurs qui approchent Dieu, qui en reçoivent les émanations pour présider à l'avenir des mondes gravitant dans l'espace.

Celui qui est mort sur la croix avait une mission à remplir, et cette mission se renouvelle aujourd'hui par d'autres Esprits de ce groupe divin, qui viennent, je vous le répète, présider aux destinées de votre monde.

Si le Messie dont parlent ces communications n'est pas la personnalité de Jésus, c'est la même pensée. C'est celui que Jésus a annoncé quand il a dit : « Je vous enverrai l'Esprit de Vérité qui doit rétablir toutes choses, c'est-à-dire ramener les hommes à la saine interprétation de ses enseignements, car il prévoyait que les hommes dévieraient du chemin qu'il leur avait tracé.

Il fallait, d'ailleurs, compléter ce qu'il n'avait pas pu leur dire alors, parce qu'il n'aurait pas été compris. C'est pourquoi une multitude d'Esprits de tous ordres, sous la direction de l'Esprit de Vérité, sont venus dans toutes les parties du monde et chez tous les peuples, révéler les lois du monde spirituel dont Jésus avait ajourné l'enseignement, et jeter, par le Spiritisme, les fondements du nouvel ordre social. Quand toutes les bases en seront posées, alors viendra le Messie qui doit couronner l'édifice et présider à la réorganisation à l'aide des éléments qui auront été préparés.

Mais ne croyez pas que ce Messie soit seul ; il y en aura plusieurs qui embrasseront, par la position que chacun occupera dans le monde, les grandes parties de l'ordre social : la politique, la religion, la législation, afin de les faire concorder vers le même but.

Outre les Messies principaux, des Esprits d'élite surgiront dans toutes les parties de détail, et qui, comme des lieutenants animés de la même foi et du même désir, agiront d'un commun accord sous l'impulsion de la pensée supérieure.

C'est ainsi que s'établira peu à peu l'harmonie de l'ensemble ; mais il faut, au préalable, que certains événements s'accomplissent.

(Lacordaire ; Paris, 1862.)


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* Les communications de ce genre sont innombrables ; nous n'en rapportons ici que quelques-unes, et si nous les publions aujourd'hui, c'est que le moment est venu de porter le fait à la connaissance de tous, et qu'il est utile, pour les spirites, de savoir dans quel sens se prononce la majorité des Esprits.



LES ESPRITS MARQUÉS

5. ‑ Il y a beaucoup d'Esprits supérieurs qui concourront puissamment à l'œuvre réorganisatrice, mais tous ne sont pas des messies. Il faut distinguer :

1° Les Esprits supérieurs qui agissent librement, et de leur propre volonté ;

2° Les Esprits marqués, c'est-à-dire désignés pour une mission importante. Ils ont le rayonnement lumineux qui est le signe caractéristique de leur supériorité. Ils sont choisis parmi les Esprits capables de la remplir ; cependant, comme ils ont leur libre arbitre, ils peuvent faillir par manque de courage, de persévérance ou de foi, et ils ne sont pas à l'abri des accidents qui peuvent abréger leurs jours. Mais comme les desseins de Dieu ne sont pas à la merci d'un homme, ce qu'un ne fait pas, un autre est appelé à le faire. C'est pourquoi il y a beaucoup d'appelés et peu d'élus. Heureux celui qui accomplit sa mission selon les vues de Dieu et sans défaillance !

3° Les Messies, êtres supérieurs parvenus au plus haut degré de la hiérarchie céleste, après avoir atteint une perfection qui les rend désormais infaillibles et au-dessus des faiblesses humaines, même dans l'incarnation. Admis dans les conseils du Très-Haut, ils reçoivent directement sa parole, qu'ils sont chargés de transmettre et de faire accomplir. Véritables représentants de la Divinité, dont ils ont la pensée, c'est parmi eux que Dieu choisit ses envoyés spéciaux, ou ses Messies pour les grandes missions générales, dont les détails d'exécution sont confiés à d'autres Esprits incarnés ou désincarnés, agissant par leurs ordres et sous leur inspiration.

Des Esprits de ces trois catégories doivent concourir au grand mouvement régénérateur qui s'opère.

(Extase somnambulique ; Paris, 1866.)


6. ‑ Je viens, mes amis, confirmer l'espérance des hautes destinées qui attendent le Spiritisme. Ce glorieux avenir que nous vous annonçons sera accompli par la venue d'un Esprit supérieur qui résumera, dans l'essence de leur perfection, toutes les doctrines anciennes et nouvelles et qui, par l'autorité de sa parole, ralliera les hommes aux croyances nouvelles. Semblable au soleil levant, il dissipera toutes les obscurités amoncelées sur l'éternelle vérité par le fanatisme et l'inobservance des préceptes du Christ.

L'étoile de la nouvelle croyance, le futur Messie, grandit dans l'ombre ; mais déjà ses ennemis frémissent, et les vertus des cieux sont ébranlées.

Vous demandez si ce nouveau Messie est la personne même de Jésus de Nazareth ? Que vous importe, si c'est la même pensée qui les anime tous les deux ! Ce sont les imperfections qui divisent les Esprits ; mais quand les perfections sont égales, rien ne les distingue ; ils forment des unités collectives sans perdre leur individualité.

Le commencement de toutes choses est obscur et vulgaire ; ce qui est petit grandit ; nos manifestations, accueillies d'abord par le dédain, la violence ou l'indifférence banale de la curiosité oisive, répandront des flots de lumière sur les aveugles et les régénéreront.

Tous les grands événements ont eu leurs prophètes, tour à tour encensés et méconnus. Ainsi que Moïse conduisait les Hébreux, nous vous conduirons vers la terre promise de l'intelligence.

Similitude frappante ! les mêmes phénomènes se reproduisent, non plus dans le sens matériel destiné à frapper des hommes enfants, mais dans leur acception spirituelle. Les enfants sont devenus adultes ; le but grandissant, les exemples ne s'adressent plus aux yeux ; la verge d'Aaron est brisée, et la seule transformation que nous opérons est celle de vos cœurs rendus attentifs au cri d'amour qui, du ciel, se répercute sur la terre.

Spirites ! comprenez la gravité de votre mission ; tressaillez d'allégresse, car l'heure n'est pas éloignée où le divin envoyé réjouira le monde. Spirites laborieux, soyez bénis dans vos efforts, et soyez pardonnés dans vos erreurs. L'ignorance et le trouble vous dérobent encore une partie de la vérité que le céleste Messager peut seul révéler tout entière.

(Saint Louis ; Paris, 1862.)


7. ‑ La venue du Christ a ramené votre terre à des sentiments qui l'ont, pour un instant, soumise à la volonté de Dieu ; mais les hommes, aveuglés par leurs passions, n'ont pu garder en leur cœur l'amour du prochain, l'amour du Maître du ciel. L'envoyé du Tout-puissant a ouvert à l'humanité la route qui conduit au séjour bienheureux ; mais l'humanité a reculé du pas immense que Christ lui avait fait faire ; elle est retombée dans l'ornière de l'égoïsme, et l'orgueil lui a fait oublier son Créateur.

Dieu permet qu'une fois encore sa parole soit prêchée sur la terre, et vous aurez à le glorifier de ce qu'il a bien voulu vous appeler, des premiers, à croire ce qui plus tard sera enseigné. Réjouissez-vous, car les temps sont proches où cette parole se fera entendre. Améliorez-vous en profitant des enseignements qu'il nous permet de vous donner.

Que l'arbre de la foi, qui prend en ce moment de si vivaces racines, porte ses fruits ; que ces fruits mûrissent comme mûrira la foi qui anime aujourd'hui quelques-uns d'entre vous !

Oui, mes enfants, le peuple se pressera sur les pas du nouveau messager annoncé par Christ lui-même, et tous viendront écouter cette divine parole, car ils y reconnaîtront le langage de la vérité et la voie du salut. Dieu qui nous a permis de vous éclairer, de soutenir votre marche jusqu'à ce jour, nous permettra encore de vous donner les instructions qui vous sont nécessaires.

Mais vous aussi, qui des premiers avez été favorisés de la croyance, vous avez votre mission à remplir ; vous aurez à amener ceux d'entre vous qui doutent encore de ces manifestations que Dieu permet ; vous aurez à faire luire à leurs yeux les bienfaits de ce qui vous a tant consolés ; car dans vos jours de tristesse et d'abattement, votre croyance ne vous a-t-elle pas soutenue ; n'a-t-elle pas fait naître en votre cœur cette espérance qui, sans elle, vous eût laissés dans le découragement ?

C'est là ce qu'il faudra faire partager à ceux qui ne croient pas encore, non par une précipitation intempestive, mais avec prudence et sans heurter de front des préjugés dès longtemps enracinés. On n'arrache pas un vieil arbre d'un seul coup, comme un brin d'herbe, mais peu à peu.

Semez dès à présent ce que plus tard vous voudrez récolter ; semez le grain qui viendra fructifier sur le terrain que vous aurez préparé et dont vous-mêmes recueillerez les fruits, car Dieu vous tiendra compte de ce que vous aurez fait pour vos frères.

(Lamennais ; le Havre, 1862.)

AVENIR DU SPIRITISME

8. ‑ Après ses premières étapes, le Spiritisme, aguerri, se dégageant de plus en plus des obscurités qui lui ont servi de langes, fera bientôt son apparition sur la grande scène du monde.

Les événements marchent avec une rapidité telle, qu'on ne peut méconnaître la puissante intervention des Esprits qui président aux destinées de la terre. Il y a comme un tressaillement intime dans les flancs de votre globe en travail d'enfantement ; de nouvelles races sorties des hautes sphères viennent tourbillonner autour de vous, attendant l'heure de leur incarnation messianique, et s'y préparant par l'étude des vastes questions qui remuent aujourd'hui la terre.

On voit de tous côtés des signes de décrépitude sur les usages et les législations qui ne sont plus en rapport avec les idées modernes. Les vieilles croyances endormies depuis des siècles semblent se réveiller de leur torpeur séculaire, et s'étonnent de se voir aux prises avec de nouvelles croyances émanées des philosophes et des penseurs de ce siècle et du siècle passé. Le système abâtardi d'un monde qui n'était qu'un simulacre s'écroule devant l'aurore du monde réel, du monde nouveau. La loi de solidarité, de la famille a passé aux habitants des États pour conquérir ensuite la terre entière ; mais cette loi si sage, si progressive, cette loi divine, en un mot, ne s'est pas bornée à ce résultat unique ; s'infiltrant dans le cœur des grands hommes, elle leur a enseigné que, non seulement elle était nécessaire à la grande amélioration de votre séjour, mais qu'elle s'étendait à tous les mondes de votre système solaire, pour s'étendre de là à tous les mondes de l'immensité !

Elle est belle, cette loi de la solidarité universelle, car dans cette loi se trouve cette sublime maxime : Tous pour chacun et chacun pour tous.

Voilà, mes fils, la vraie loi du Spiritisme, la véritable conquête d'un avenir prochain. Marchez donc dans votre voie imperturbablement, sans vous soucier des railleries des uns et des amours-propres froissés des autres. Nous sommes et nous resterons avec vous, sous l'égide de l'Esprit de Vérité, mon maître et le vôtre.

(Eraste ; Paris, 1863.)


9. ‑ Le Spiritisme étend chaque jour le cercle de son enseignement moralisateur. Sa grande voix a retenti d'une extrémité de la terre à l'autre. La société s'en est émue, et de son sein sont partis des adeptes et des adversaires.

Adeptes fervents, adversaires habiles, mais dont l'habileté même et la renommée ont servi la cause qu'ils voulaient combattre, en appelant sur la doctrine nouvelle le regard des masses, et en leur donnant le désir de connaître les enseignements régénérateurs que préconisaient ses adeptes, et qui les faisaient bafouer et tourner en ridicule.

Contemplez le travail accompli et jouissez du résultat ! Mais quelle effervescence indicible se produira chez les peuples, alors que les noms de leurs écrivains les plus aimés viendront se joindre aux noms plus obscurs ou moins connus de ceux qui se serrent autour du drapeau de la vérité !

Voyez ce qu'ont produit les travaux de quelques groupes isolés, pour la plupart entravés par l'intrigue et le mauvais vouloir, et jugez de la révolution qui s'opérera alors que tous les membres de la grande famille spirite se tendront la main, et déclareront, le front haut et le cœur fier, la sincérité de leur foi et de leur croyance dans la réalité de l'enseignement des Esprits.

Les masses aiment le progrès, elles le cherchent, mais elles le craignent. L'inconnu inspire une secrète terreur aux enfants ignorants d'une société bercée de préjugés, qui essaie ses premiers pas dans la voie de la réalité et du progrès moral. Les grands mots de liberté, de progrès, d'amour, de charité, frappent le peuple sans l'émouvoir ; souvent, il préfère son état présent et médiocre à un avenir meilleur, mais inconnu.

La raison de cet effroi de l'avenir est dans l'ignorance du sentiment moral chez un grand nombre, et du sentiment intelligent chez les autres. Mais il n'est pas vrai, comme l'ont dit plusieurs philosophes célèbres, qu'une conception fausse de l'origine des choses a fait errer, comme je l'ai dit moi-même, ‑ pourquoi rougirais-je de le dire ; n'ai-je pu me tromper ? ‑ il n'est pas vrai, dis-je, que l'humanité soit mauvaise par essence ; non, en perfectionnant son intelligence, elle ne donnera pas un essor plus étendu à ses dualités mauvaises. Eloignez de vous ces pensées désespérantes qui reposent sur une fausse connaissance de l'esprit humain.

L'humanité n'est pas mauvaise par nature ; mais elle est ignorante, et par cela même plus apte à se laisser gouverner par ses passions. Elle est progressive et doit progresser pour atteindre ses destinées ; éclairez-la ; montrez-lui ses ennemis cachés dans l'ombre ; développez son essence morale, qui est innée en elle, et seulement assoupie sous l'influence des mauvais instincts, et vous ranimerez l'étincelle de l'éternelle vérité, de l'éternelle prescience de l'infini, du beau et du bon qui réside à jamais dans le cœur de l'homme, même le plus pervers.

Enfants d'une doctrine nouvelle, réunissez vos forces ; que le souffle divin et le secours des bons Esprits vous soutiennent, et vous ferez de grandes choses. Vous aurez la gloire d'avoir posé les bases des principes impérissables dont vos descendants recueilleront les fruits.

(Montaigne ; Paris, 1865.)

LES ÉTOILES TOMBERONT DU CIEL

10. ‑ Oh ! que la lumière du Seigneur est belle ! quel éclat prodigieux répandent ses rayons ! Sainte Sion ! bienheureux ceux qui sont assis à l'ombre de tes tabernacles ! Oh ! quelle harmonie est comparable aux sphères du Seigneur ! Beauté incompréhensible pour des yeux mortels, incapables d'apercevoir tout ce qui ne tient pas au domaine des sens !

Aurore splendide d'un jour nouveau, le Spiritisme vient éclairer les hommes. Déjà des lueurs plus fortes paraissent à l'horizon ; déjà les Esprits de ténèbres, voyant que leur empire va s'écrouler, sont en proie à des rages impuissantes, et jettent leur dernière vigueur dans des complots infernaux. Déjà l'ange radieux du progrès étend ses blanches ailes diaprées ; déjà les vertus des cieux s'ébranlent, et les étoiles tombent de leur voûte, mais transformées en purs Esprits, qui viennent, comme l'annonce l'Écriture en langage figuré, proclamer sur les ruines du vieux monde l'avènement du Fils de l'homme.

Bienheureux ceux dont le cœur est préparé à recevoir la semence divine que les Esprits du Seigneur jettent à tous les vents du ciel ! Bienheureux ceux qui cultivent, dans le sanctuaire de leur âme, les vertus que Christ est venu leur enseigner, et qu'il leur enseigne encore par la voix des médiums, c'est-à-dire des instruments qui répètent les paroles des Esprits ! Bienheureux les justes, car le royaume des cieux leur appartiendra !

O mes amis ! continuez à marcher dans la voie qui vous est tracée ; ne soyez pas des obstacles à la vérité qui veut éclairer le monde ; non, soyez des propagateurs zélés et infatigables comme les premiers apôtres, qui n'avaient pas de toit pour abriter leurs têtes, mais qui marchaient à la conquête que Jésus avait commencée ; qui marchaient sans arrière-pensée, sans hésitation ; qui sacrifiaient tout, jusqu'à la dernière goutte de leur sang, pour que le christianisme fût établi.

Vous, mes amis, vous n'avez pas besoin de sacrifices aussi grands ; non, Dieu ne vous demande pas votre vie, mais votre cœur, votre bonne volonté. Soyez donc zélés, et marchez unis et confiants en répétant la parole divine : « Mon Père, que votre volonté soit faite et non la mienne ! »

(Dupuch, évêque d'Alger ; Bordeaux, 1863.)

LES MORTS SORTIRONT DE LEURS TOMBEAUX

11. ‑ Peuples, écoutez !… Une grande voix se fait entendre d'un bout à l'autre des mondes ; c'est celle du précurseur annonçant la venue de l'Esprit de Vérité qui vient redresser les voies tortueuses où l'esprit humain s'égarait dans de faux sophismes. C'est la trompette de l'ange venant réveiller les morts pour qu'ils sortent de leurs tombeaux.

Souvent vous avez lu la révélation de Jean, et vous vous êtes demandé : Mais que veut-il dire ? Comment donc s'accompliront ces choses surprenantes ? Et votre raison confondue, s'enfonçait dans un ténébreux dédale d'où elle ne pouvait sortir, parce que vous vouliez prendre à la lettre ce qui était rendu dans un style figuré.

Maintenant que le temps est venu où une partie de ces prédictions va s'accomplir, vous apprendrez peu à peu à lire dans ce livre où le disciple bien-aimé a consigné les choses qu'il lui avait été donné de voir. Cependant, les mauvaises traductions et les fausses interprétations vous gêneront encore quelque peu, mais avec un travail persévérant vous arriverez à comprendre ce qui, jusqu'à présent, avait été pour vous lettre close.

Seulement, comprenez que, si Dieu permet que les sceaux en soient levés plus tôt pour quelques-uns, ce n'est pas pour que cette connaissance reste stérile en leurs mains, mais pour que, pionniers infatigables, ils défrichent les terres incultes ; c'est afin qu'ils fécondent de la douce rosée de la charité les cœurs desséchés par l'orgueil et empêchés par les embarras mondains, où la bonne semence de la parole de vie n'a pu encore germer.

Hélas ! combien envisagent la vie humaine comme devant être une fête perpétuelle où les distractions et les plaisirs se succèdent sans interruption ! Ils inventent mille riens pour charmer leurs loisirs ; ils cultivent leur esprit, parce que c'est une des facettes brillantes servant à faire ressortir leur personnalité ; ils sont semblables à ces bulles éphémères reflétant les couleurs du prisme et se balançant dans l'espace : elles attirent pour un temps les regards, puis vous les cherchez… elles ont disparu sans laisser de traces. De même ces âmes mondaines ont brillé d'un éclat emprunté, pendant leur court passage terrestre, et il n'en est rien resté d'utile, ni pour leurs semblables, ni pour elles-mêmes.

Vous qui connaissez le prix du temps, vous à qui les lois de l'éternelle sagesse sont peu à peu révélées, soyez entre les mains du Tout-puissant des instruments dociles servant à porter la lumière et la fécondité dans ces âmes dont il est dit : « Elles ont des yeux et ne voient point, des oreilles et n'entendent point, » parce que s'étant détournées du flambeau de la vérité, et ayant écouté la voix des passions, leur lumière n'est que ténèbres au milieu desquelles l'Esprit ne peut reconnaître la route qui le fait graviter vers Dieu.

Le Spiritisme est cette voix puissante qui retentit déjà jusqu'aux extrémités de la terre ; tous l'entendront. Heureux ceux qui, ne se bouchant pas volontairement les oreilles, sortiront de leur égoïsme comme le feraient des morts de leurs sépulcres, et accompliront désormais les actes de la véritable vie, celle de l'Esprit se dégageant des entraves de la matière, comme fit Lazare de son linceul à la voix du Sauveur.

Le Spiritisme marque l'heure solennelle du réveil des intelligences ayant usé de leur libre arbitre pour s'attarder dans les sentiers fangeux dont les miasmes délétères ont infecté l'âme d'un poison lent qui lui donne les apparences de la mort. Le Père céleste a pitié de ces enfants prodigues, tombés si bas qu'ils ne songent même pas à la demeure paternelle, et c'est pour eux qu'il permet ces manifestations éclatantes, destinées à convaincre que, au-delà de ce monde aux formes périssables, l'âme conserve le souvenir, la puissance et l'immortalité.

Puissent-ils, ces pauvres esclaves de la matière, secouer la torpeur qui les a empêchés de voir et de comprendre jusqu'à ce jour ; puissent-ils étudier avec sincérité, afin que la lumière divine, pénétrant leur âme, en chasse le doute et l'incrédulité.

(Jean l'évangéliste ; Paris, 1866.)

LE JUGEMENT DERNIER

12. ‑ Jésus viendra sur les nuées pour juger les vivants et les morts.

Oui, Dieu l'enverra, comme il l'envoie tous les jours, rendre cette justice souveraine dans les plaines immenses de l'éther. Ah ! lorsque saint Jacques fut précipité du haut de la tour du temple de Jérusalem, par les pontifes et les pharisiens, pour avoir annoncé au peuple assemblé cette vérité enseignée par Christ et ses apôtres, rappelez-vous qu'à cette parole du juste, la multitude se prosterna en s'écriant : Gloire à Jésus, fils de Dieu, au plus haut des cieux !

Il viendra sur les nuées tenir ses redoutables assises : n'est-ce pas vous dire, ô Spirites, qu'il vient perpétuellement recevoir les âmes de ceux qui rentrent dans l'erraticité ? Passez à ma droite, dit à ses brebis le pasteur, vous qui avez bien agi suivant les vues de mon Père, passez à ma droite et montez vers lui ; quant à vous, qui vous êtes laissé dominer par les passions de la terre, passez à ma gauche, vous êtes condamnés.

Oui, vous êtes condamnés à recommencer la route parcourue, dans une nouvelle existence terrestre, jusqu'à ce que vous vous soyez rassasiés de matières et d'iniquités, et que vous ayez enfin chassé l'impur qui vous domine. Oui, vous êtes condamnés ; allez et retournez donc dans l'enfer de la vie humaine, pendant que vos frères de ma droite vont s'élancer vers les sphères supérieures, d'où les passions de la terre sont exclues, jusqu'au jour où ils entreront dans le royaume de mon Père par une plus grande purification.

Oui, Jésus viendra juger les vivants et les morts ; les vivants : les justes, ceux de sa droite ; les morts : les impurs, ceux de sa gauche ; et quand les ailes pousseront aux justes, la matière s'emparera encore des impurs ; et cela, jusqu'à ce que ceux-ci sortent vainqueurs des combats contre l'impureté, et se dépouillent enfin, pour toujours, de leurs chrysalides humaines.

O Spirites ! vous voyez que votre doctrine est la seule qui console, la seule qui donne l'espérance, en ne condamnant pas à une damnation éternelle les malheureux qui se sont mal comportés pendant quelques minutes de l'éternité ; la seule, enfin, qui prédise la fin véritable de la terre par l'élévation graduelle des Esprits.

Progressez donc, en dépouillant le vieil homme, pour rentrer dans la région des Esprits aimés de Dieu.

(Eraste ; Paris, 1861.)


13. ‑ La société en général, ou, pour mieux dire, la réunion d'êtres, tant incarnés que désincarnés, qui composent la population flottante d'un monde, en un mot, une humanité, n'est autre qu'un grand enfant collectif qui, comme tout être doué de vie, passe par toutes les phases qui se succèdent chez chacun, depuis la naissance jusqu'à l'âge le plus avancé ; et de même que le développement de l'individu est accompagné de certaines perturbations physiques et intellectuelles qui incombent plus particulièrement à certaines périodes de la vie, l'humanité a ses maladies de croissance, ses bouleversements moraux et intellectuels. C'est à l'une de ces grandes époques qui terminent une période et qui en commencent une autre qu'il vous est donné d'assister. Participant à la fois aux choses du passé et à celles de l'avenir, aux systèmes qui s'écroulent et aux vérités qui se fondent, ayez soin, mes amis, de vous mettre du côté de la solidité, de la progression et de la logique, si vous ne voulez être entraînés à la dérive ; et d'abandonner des palais somptueux quant à l'apparence, mais vacillants par la base, et qui enseveliront bientôt sous leurs ruines les malheureux assez insensés pour ne pas vouloir en sortir, malgré les avertissements de toute nature qui leur sont prodigués.

Tous les fronts s'assombrissent, et le calme apparent dont vous jouissez ne sert qu'à accumuler un plus grand nombre d'éléments destructeurs.

Quelquefois, l'orage qui détruit le fruit des sueurs d'une année est précédé d'avant-coureurs qui permettent de prendre les précautions nécessaires pour éviter, autant que possible, la dévastation. Cette fois, il n'en sera pas ainsi. Le ciel assombri semblera s'éclaircir ; les nuages fuiront ; puis, tout d'un coup, toutes les fureurs longtemps comprimées se déchaîneront avec une violence inouïe.

Malheur à ceux qui ne se seront pas préparé un abri ! malheur aux fanfarons qui iront au danger le bras désarmé et la poitrine découverte ! malheur à ceux qui affronteront le péril la coupe à la main ! Quelle déception terrible les attend ! La coupe tenue par leur main n'aura pas atteint leurs lèvres, qu'ils seront frappés !

A l'œuvre donc, Spirites, et n'oubliez pas que vous devez être tout prudence et tout prévoyance. Vous avez un bouclier, sachez vous en servir ; une ancre de salut, ne la négligez pas.

(Clélie Duplantier, Paris, 1867.)


Appréciation de l'ouvrage sur la Genèse

Paris, 18 décembre 1867 ; médium, M. Desliens

Cet ouvrage vient à point, en ce sens que la doctrine est bien posée aujourd'hui sous le rapport moral et religieux. Quelle que soit la direction qu'elle prenne désormais, elle a des précédents trop enracinés dans le cœur de ses adeptes, pour que personne puisse craindre qu'elle ne dévie de sa voie.

Ce qu'il importait avant tout de satisfaire, c'étaient les aspirations de l'âme ; c'était de suppléer au vide laissé par le doute dans les âmes chancelantes dans leur foi. Cette première mission est aujourd'hui accomplie. Le Spiritisme entre actuellement dans une nouvelle phase ; à l'attribut de consolateur, il ajoute celui d'instructeur et de directeur de l'esprit, en science et en philosophie comme en moralité. La charité, sa base inébranlable, en a fait le lien des âmes tendres ; la science, la solidarité, la progression, l'esprit libéral en feront le trait d'union des âmes fortes. Il a conquis les cœurs aimants avec des armes de douceur ; viril aujourd'hui, c'est aux intelligences viriles qu'il s'adresse. Matérialistes, positivistes, tous ceux qui, pour un motif quelconque, se sont écartés d'une spiritualité dont leur intelligence leur montrait les imperfections, vont y trouver de nouveaux aliments pour leur insatiabilité. La science est leur maîtresse, mais une découverte en appelle une autre, et l'homme avance sans cesse avec elle, de désir en désir, sans trouver complète satisfaction. C'est que l'esprit a ses besoins, lui aussi ; c'est que l'âme la plus athée a des aspirations secrètes, inavouées, et que ces aspirations réclament leur pâture.

La religion, antagoniste de la science, répondait, par le mystère, à toutes les questions de la philosophie sceptique. Elle violait les lois de la nature et les torturait à sa fantaisie, pour en extraire une explication boiteuse de ses enseignements. Vous, au contraire, vous sacrifiez à la science ; vous acceptez tous ses enseignements sans exception, et vous lui ouvrez des horizons qu'elle supposait infranchissables. Tel sera l'effet de ce nouvel ouvrage ; il ne pourra qu'assurer davantage les fondements de la croyance spirite dans les cœurs qui la possèdent déjà, et fera faire un pas en avant vers l'unité à tous les dissidents, à l'exception, toutefois, de ceux qui le sont par intérêt ou par amour-propre ; ceux-là le voient avec dépit sur des bases de plus en plus inébranlables, qui les rejettent en arrière et les refoulent dans l'ombre. Il n'y avait que peu ou point de terrain commun où l'on pouvait se rencontrer ; aujourd'hui, le matérialisme vous coudoie partout, car étant sur son terrain, vous n'en serez pas moins chez vous, et il ne pourra faire autrement que d'apprendre à connaître les hôtes que la philosophie spirite lui amène. C'est un instrument à double effet : une sape, une mine qui renverse encore quelques-unes des ruines du passé, et une truelle qui édifie pour l'avenir.

La question d'origine qui se rattache à la Genèse est une question brûlante pour tous ; un livre écrit sur cette matière doit, en conséquence, intéresser tous les esprits sérieux. Par ce livre, comme je l'ai dit, le Spiritisme entre dans une nouvelle phase et celle-ci préparera les voies de la phase qui s'ouvrira plus tard, car chaque chose doit venir en son temps. Devancer le moment propice est aussi nuisible que de le laisser échapper.

Saint Louis.



Bibliographie

Abrégé de la doctrine spirite, par Florent Loth, d'Amiens. *

Ce livre, que nous n'avons pu qu'annoncer dans notre dernier numéro, est un résumé des principes les plus essentiels de la doctrine spirite ; il se compose en majeure partie de citations textuelles empruntées aux ouvrages fondamentaux, et d'exemples tirés de Ciel et Enfer, propres à donner sur les conséquences de la manière dont on emploie la vie une idée plus juste, plus rationnelle, plus saisissante, et surtout plus conforme à la justice de Dieu que la doctrine des flammes éternelles. L'auteur ne fait de son livre ni une question d'amour-propre ni d'intérêt ; Spirite fervent et dévoué, il l'a publié en vue surtout de propager la doctrine dans les campagnes de son département ; la modestie de ses vues n'empêche pas que ce petit livre ne puisse être fort utile ailleurs.

Voici le compte rendu que le Journal d'Amiens du 29 décembre 1867 a donné de cet opuscule. Nous le faisons suivre de la lettre adressée au sujet de ce compte rendu, par M. Loth, à l'auteur de l'article, et que le même journal a publiée dans son numéro du 17 janvier.


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* Brochure petit in-8° de 150 pages, prix 1 fr. 25 c. - Par la poste, 1 fr. 50 c. - Amiens, chez les principaux libraires. On peut aussi se le procurer au bureau de la Revue spirite.



Abrégé de la Doctrine spirite

Voici un petit livre assez curieux, écrit par un villageois de Saint-Sauflieu. Il est vrai que l'auteur a longtemps habité Paris, et que c'est dans cette ville qu'il a pu se mettre en rapport avec les apôtres du Spiritisme.

Comme nous portons intérêt à toutes les publications de notre pays, nous avons voulu faire connaissance avec cet ouvrage. On nous avait dit que l'œuvre de M. Florent Loth était mise à l'index dans les communes voisines de son village ; cette nouvelle a piqué notre curiosité, et nous nous sommes décidé à lire l'Abrégé de la Doctrine spirite. On aime tant le fruit défendu.

Quant à nous, qui n'avons aucun intérêt à blâmer ou à approuver l'œuvre de l'auteur, nous dirons franchement, pour nous mettre à l'aise, que nous ne croyons pas au Spiritisme, que nous n'attachons aucune créance aux tables tournantes ou parlantes, parce que notre raison répugne à admettre que des objets matériels puissent être doués de la moindre intelligence. Nous ne croyons pas davantage au don de seconde vue, ou, pour mieux dire, à la faculté de voir à travers des cloisons épaisses, ou de distinguer à de grandes distances ce qui se passe au loin, c'est-à-dire à plusieurs centaines de lieues. Enfin, pour continuer nos aveux préliminaires, nous déclarons que nous n'ajoutons aucune foi aux Esprits des revenants, et que l'homme, plus ou moins inspiré, n'a pas le pouvoir d'évoquer et surtout de faire parler les âmes des morts.

Cela dit, pour dégager le terrain de tout ce qui n'entre pas dans nos vues, nous reconnaissons que le livre de M. Florent Loth n'est pas un mauvais livre. La morale en est pure, l'amour du prochain y est recommandé, la tolérance pour les croyances d'autrui y est défendue : cela explique le débit de cet ouvrage.

Mais dire que des adeptes convaincus à la doctrine spirite, avec toutes ses parties admises, se formeront par suite de la lecture de l'œuvre de notre compatriote, ce serait avancer un fait qui ne se réalisera pas. Dans ce qui nous paraît raisonnable et, tranchons le mot, avoir le sens commun, selon la meilleure acception de ces termes, il y a d'excellentes choses. Ainsi, certains abus sont repoussés avec des raisons claires, nettes et précises, et si l'auteur cherche à convaincre, c'est toujours par la douceur et par la persuasion.

Donc, en laissant de côté tout ce qui tient aux pratiques matérielles du Spiritisme, pratiques auxquelles nous ne croyons nullement, on pourra retirer de la lecture du livre en question de très bonnes notions de morale, de tolérance et d'amour pour le prochain. A ces points de vue, nous approuvons entièrement M. Florent Loth, et nous ne comprenons pas l'interdit lancé contre son opuscule.

L'Abrégé de la Doctrine spirite sera-t-il défendu un jour par la congrégation de l'Index, dont le siège est à Rome ? C'est une question non encore résolue, car ce petit livre n'est pas destiné à franchir nos frontières picardes. Si cependant ce fait avait lieu, M. Florent Loth recueillerait pour son ouvrage une notoriété à laquelle il n'a jamais dû songer.

Quant aux expériences physiques du Spiritisme, nous croyons devoir laisser parler ici M. Georges Sauton, l'un de nos confrères, lequel, dans la Liberté du mercredi 12 septembre 1867, s'exprimait ainsi sur une séance spirite qui avait eu lieu chez un docteur en médecine de Paris :

« Le docteur F… a amassé une certaine fortune. Il la dépense en donnant des soirées de Spiritisme qui lui coûtent fort cher en bougies et en médiums.

Hier au soir, il avait convié la presse à sa réunion mensuelle. Ces esprits devaient être interrogés sur le compte du zouave Jacob, et dire leur façon de penser à l'endroit de cet intéressant militaire. M. Babinet, de l'institut, ‑ excusez du peu ! ‑ avait promis d'honorer la réunion de sa présence ; du moins l'amphitryon, sur les lettres d'invitation, l'avait-il laissé entendre.

Albert Brun, Victor Noir et moi, nous nous en fûmes chez le docteur. Pas plus de M. Babinet que sur la main, comme on dit.

Dix personnes autour d'une table faisaient tourner ce meuble, qui tourna mal ; trente autres, parmi lesquelles beaucoup de décorées, les regardaient.

Les Esprits, sans doute mal disposés, se firent tirer l'oreille pour parler. A peine daignèrent-ils imiter le cri de la scie, des marteaux de tonnelier et de forgeron frappant sur les futailles ou sur l'enclume. On les pria de chanter la Femme à barbe et J'ai du bon tabac, et ils ne chantèrent pas. On les somma de faire sauter en l'air une poire, et la poire ne sauta pas. »

Nous n'ajouterons rien à ce petit et spirituel récit.

Terminons par un extrait de la préface de l'auteur dans lequel la partie morale de ses idées est exposée :

« Le spiritisme n'a pas la prétention d'imposer sa croyance ; c'est par la persuasion seule qu'il espère arriver à son but, qui est le bien de l'humanité. Liberté de conscience : ainsi, je crois fermement à l'existence de l'âme et à son immortalité ; je crois aux peines et aux récompenses futures ; je crois aux manifestations des Esprits, c'est-à-dire aux âmes de ceux qui ont vécu sur cette terre ou dans d'autres mondes ; j'y crois en vertu du droit que mon voisin a de ne pas y croire ; mais il m'est aussi facile de lui prouver mon affirmation, qu'il lui est impossible de me prouver sa négation, car la négation des incrédules n'est pas une preuve. Le fait, disent-ils, est contraire aux lois connues. Eh bien ! c'est qu'il repose sur une loi inconnue : on ne peut connaître toutes les lois de la nature, car Dieu est grand et il peut tout !…

Des personnes malveillantes ont fait courir le bruit que le Spiritisme était un obstacle aux progrès de la religion ; ces personnes, plus ignorantes que vraiment pieuses, ne connaissant nullement la doctrine, ne peuvent ni l'apprécier ni la juger.

Nous disons, nous, et de plus nous prouvons que l'enseignement des Esprits est très chrétien, qu'il s'appuie sur l'immortalité de l'âme, les peines et les récompenses futures, la justice de Dieu et la morale du Christ. »

La citation de cette profession de foi par l'auteur sera suffisante pour faire connaître sa manière de voir. C'est au lecteur d'apprécier l'œuvre dont nous parlons.

En faisant ce compte rendu, nous avons voulu seulement constater un fait, c'est que dans notre province de Picardie, le Spiritisme avait rencontré un défenseur fervent et convaincu.

Nous n'admettons pas toutes les idées de l'auteur. Nous espérons qu'en vertu de sa douceur il ne se fâchera pas de notre franchise. Tant que la paix publique n'est pas troublée par des doctrines impies, tant que l'ordre social n'est pas ébranlé par des maximes subversives, notre tolérance fraternelle nous fera dire ce que nous disons ici du livre de M. Florent Loth :

Paix aux consciences ! Respect aux croyances du prochain !

M. A. Gabriel Rembault.



« Monsieur le Directeur,

Je vous serai obligé de vouloir bien insérer dans votre journal ma réponse à la critique de M. Gabriel Rembault sur mon Abrégé de la Doctrine spirite, article qui a paru le 29 décembre dernier.

Je ne veux pas soulever de polémique entre M. Gabriel Rembault et moi ; je ne suis pas à la hauteur de son talent d'écrivain, talent incontestable et que chacun lui reconnaît ; mais qu'il me permette de lui démontrer les raisons qui m'ont fait écrire mon livre.

Je dois reconnaître avant tout que la critique de M. Gabriel Rembault est courtoise et polie ; elle émane d'un homme convaincu, mais non pas irrité. Hélas ! que ne puis-je en dire autant des autres critiques qui lancent l'anathème aux Spirites par des insultes et des paroles grossières ! Je ne comprends rien à ce déploiement de haine et d'injures, à ces mots malsonnants de fous et de goujats qu'on nous jette à la face et qui n'inspirent aux honnêtes gens qu'un profond dégoût. Ces hommes intolérants savent cependant bien que, d'après les principes de notre société moderne, toutes les consciences sont libres et ont droit à un respect inviolable.

Pardonnez-moi cette digression, monsieur le Directeur, comme je pardonne à ces insulteurs ; je leur pardonne de tout mon cœur et je prie Dieu qu'il daigne les éclairer sur la charité. Ils devraient mieux pratiquer cette vertu évangélique envers leur prochain.

Je reviens à mon sujet :

C'est par l'étude, la méditation et surtout par la pratique, que j'ai acquis la preuve de certains faits physiques regardés jusqu'ici comme surnaturels ; c'est par le fluide universel que l'on peut expliquer les phénomènes du magnétisme. Ces phénomènes ne peuvent plus être contestés sérieusement aujourd'hui ; c'est grâce au même fluide que l'esprit franchit l'espace, qu'il possède la double vue, qu'il est doué de la pénétration éthérée, à laquelle ne saurait s'opposer l'opacité des corps. Ces phénomènes ne sont autres que l'affranchissement momentané de l'esprit. L'incrédulité, il est vrai, ne veut pas admettre ces phénomènes, mais des constatations authentiques et nombreuses ne permettent plus de les révoquer en doute.

Ainsi, toutes les merveilles dont on accuse le magnétisme et le Spiritisme ne sont simplement que des effets dont la cause réside dans les lois de la nature.

Et puisque M. Gabriel Rembault a cité un article du journal la Liberté, je me permettrai à mon tour de citer un extrait d'un livre tout nouveau (la Raison du Spiritisme), fruit des longues études d'un honorable magistrat ; il dit à la page 216 :

Dieu a-t-il jamais dérogé aux lois qu'il a instituées pour amener son œuvre à bonnes fins ? Celui qui a tout prévu n'a-t-il pas pourvu à tout ? Comment seriez-vous admis à prétendre que la médiumnité, la communication des Esprits ne soit pas conforme aux lois de la nature de l'homme ? Et si la révélation est la conséquence nécessaire de la médiumnité, pourquoi diriez-vous qu'elle est une dérogation à la loi de Dieu, alors qu'elle entrerait ostensiblement dans les vues de la Providence et de l'économie humaine ?

Je m'arrête après cette citation ; c'est un argument dans un sens opposé aux idées de M. Gabriel Rembault, et que je soumets à l'appréciation de vos lecteurs.

En résumé, je suis d'accord avec lui quand il dit : Paix aux consciences ! Respect aux croyances du prochain !

Recevez, monsieur le Directeur, mes civilités empressées.

Florent Loth.

Saint-Sauflieu, le 16 janvier 1868. »



Il ressort du compte rendu ci-dessus que l'auteur de l'article ne connaissait pas le premier mot de la doctrine ; il la jugeait, comme tant d'autres, sur des ouï-dire, sans s'être donné la peine d'aller au fond de la question, et de soulever le manteau du ridicule dont une critique malveillante, ou plus ou moins intéressée, s'est plu à l'affubler. Il a fait comme le singe de la fable qui rejetait la noix, parce qu'il n'avait mordu que dans la coque verte. S'il en avait connu les premiers éléments, il n'aurait pas supposé les Spirites assez simples pour croire à l'intelligence d'une table, pas plus qu'il ne croit lui-même à l'intelligence de la plume qui, entre ses mains, transmet les pensées de son propre esprit ; pas plus que lui les Spirites n'admettent que des objets matériels puissent être doués de la moindre intelligence ; mais, comme lui sans doute, ils admettent que ces mêmes objets peuvent être des instruments au service d'une intelligence. Le livre de M. Loth ne l'a pas convaincu, mais il lui a montré le côté sérieux et les tendances morales de la doctrine, et cela a suffi pour lui faire comprendre que la chose avait du bon et méritait au moins le respect dû aux croyances du prochain. Il a fait preuve d'une louable impartialité en insérant immédiatement la rectification qui lui est adressée par l'auteur.

Ce qui l'a touché, ce ne sont pas les faits de manifestations, dont du reste il est peu question dans ce livre, ce sont les tendances libérales et anti-rétrogrades, l'esprit de tolérance et de conciliation de la doctrine ; telle est, en effet, l'impression qu'elle produira sur tous ceux qui prendront la peine de l'étudier. Sans en accepter la partie expérimentale qui, pour les Spirites, est la preuve matérielle de la vérité de leurs principes, ils y verront un auxiliaire puissant pour la réforme des abus contre lesquels ils s'élèvent chaque jour. Au lieu de fanatiques d'un nouveau genre, ils verront dans tous les Spirites, dont le nombre augmente sans cesse, une armée qui combat pour le même but, avec d'autres armes, il est vrai ; mais que leur importent les moyens, si le résultat est le même ?

Leur ignorance des tendances du Spiritisme est telle, qu'ils ne savent pas même que c'est une doctrine libérale, émancipatrice de l'intelligence, ennemie de la foi aveugle, qui vient proclamer la liberté de conscience et le libre examen comme base essentielle de toute croyance sérieuse. Ils ne savent même pas que le premier il a inscrit sur son drapeau cette immortelle maxime : Hors la charité point de salut, principe d'union et de fraternité universelles, qui seul peut mettre un terme aux antagonismes des peuples et des croyances ; alors qu'ils le croient puérilement absorbé par une table qui tourne, ils ne se doutent pas que l'enfant a quitté le jouet pour l'armure, qu'il a grandi et qu'il embrasse maintenant toutes les questions qui intéressent le progrès de l'humanité. Il ne manque à ses adversaires désintéressés et de bonne foi que de le connaître pour le juger autrement qu'ils ne le font. S'ils réfléchissaient à la rapidité de sa propagation que rien n'a pu entraver, ils se diraient que ce ne peut être l'effet d'une idée complètement creuse et que, ne renfermât-il qu'une seule vérité, si cette vérité est capable de remuer tant de consciences, elle mérite d'être prise en considération ; que s'il cause tant d'effroi dans un certain monde, c'est qu'on ne l'y considère pas comme une vaine fumée.

L'article rapporté ci-dessus constate en outre un fait important, c'est que l'interdit lancé contre ce petit livre par le clergé des campagnes a servi à le propager, ce qui ne pouvait manquer d'avoir lieu, tant est puissant l'attrait du fruit défendu. L'auteur de l'article pense avec raison que, s'il était condamné par la congrégation de l'Index qui siège à Rome, il acquerrait une notoriété à laquelle M. Loth n'a pas dû prétendre. Il ignore que les ouvrages fondamentaux de la doctrine ont eu ce privilège, et que c'est aux foudres lancées contre la doctrine au nom de cet Index que ces livres ont dû d'être recherchés dans des milieux où ils étaient inconnus. On s'est fait cette réflexion toute naturelle que, plus on tonnait fort, plus la chose devait être importante ; on les a lus d'abord par curiosité, puis, comme on y a trouvé de bonnes choses, on les a acceptées. Ceci est de l'histoire.




Caracteres de la révé!ation

Par Allan Kardec

Beaucoup de personnes ont considéré l'article publié sous ce títre en septembre 1867, et qui, complété, forme le premieI' chapitre de ta Genese, comme propre à faire connaItre le véritable caractere de la doctrine spirite, et en même temps comme une réfutatioll de cer- taines critiques. Elles ont, en conséquence, pensé qu'i! serait utile à la propagation de I'idée de répandre cet article. Pour obtempéreJ' à leur désir, nous avons fait faire un tirage à part du premier chapitre de la Genese, en une brochure qui sera livrée aux mêmes conditions que la Simple Expression, c'est-à-dire à 15 c.; par la poste, 20 c. Dix exemplaires pris ensemble, 2 fr., soit 10 c. par exemplaire; par la poste, 2 fI'. 60 c.

Le tirage de cette brochure, ayant été retal'dé, se trouve actuelle- ment terminé.



Seconde édition de la Gènese

La premiere édition de la Gènese étant à peu pres épuisée, il est procédé en ce momen! au tirage de la seconde édition, à laquelle il n'a élé fait aucun changement.

Nota. - Au tarif indiqué dans le numéro de janvier, page 31, pour les frais de poste de cel ouvrage à I'Etranger, ceux de la Suisse onl élé portés par erreur à 1 franc, d'après un ancien tarif. Ils ne sont plus aujourd'hui que de 60 centimes.



LES PENSÉES DU ZOUAVE JACOB

1 volume in-12, de 220 pages. Prix : 2 fr. 50 c.; par la poste, 2 fr. 75 c. Chez I'éditeur, 70, rue Bonaparte, à Paris.

Ce numéro étant à l'impression quand le livre de M. JACOB nous est parvenu, nous en renvoyons le compte rendu au prochain numéro.

PSICHE

Giornale di studii psicologici

Publicato sotto la direzione deI signor PIETRO CASSELLA

Cc journal paraîtra le 1er et le 15 de chaque mois, à partir du 1er mars prochain, à NAPLES, 49, Cagliardi alle Pigne 2e, Po. Prix : 6 fr. par an, 3 fr. pour six mois.

Nous donnerons plus de détails dans Ie prochain numéro.




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