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REVUE SPIRITE JOURNAL D'ETUDES PSYCHOLOGIQUES - 1865 > Avril
Avril
Destruction des êtres vivants les uns par les autres
La destruction réciproque des êtres vivants est une des lois de la nature qui, au premier abord, semblent le moins se concilier avec la bonté de Dieu. On se demande pourquoi il leur a fait une nécessité de s'entredétruire pour se nourrir aux dépens les uns des autres.
Pour celui qui ne voit que la matière, qui borne sa vue à la vie présente, cela paraît en effet une imperfection dans l'œuvre divine ; d'où cette conclusion qu'en tirent les incrédules, que Dieu n'étant pas parfait, il n'y a pas de Dieu. C'est qu'ils jugent la perfection de Dieu à leur point de vue ; leur propre jugement est la mesure de sa sagesse, et ils pensent que Dieu ne saurait mieux faire que ce qu'ils feraient eux-mêmes. Leur courte vue ne leur permettant pas de juger l'ensemble, ils ne comprennent pas qu'un bien réel peut sortir d'un mal apparent. La connaissance du principe spirituel, considéré dans son essence véritable, et de la grande loi d'unité qui constitue l'harmonie de la création, peut seule donner à l'homme la clef de ce mystère, et lui montrer la sagesse providentielle et l'harmonie précisément là où il ne voyait qu'une anomalie et une contradiction. Il en est de cette vérité comme d'une foule d'autres ; l'homme n'est apte à sonder certaines profondeurs que lorsque son Esprit est arrivé à un degré suffisant de maturité.
La vraie vie, de l'animal aussi bien que de l'homme, n'est pas plus dans l'enveloppe corporelle qu'elle n'est dans l'habillement ; elle est dans le principe intelligent qui préexiste et survit au corps. Ce principe a besoin du corps pour se développer par le travail qu'il doit accomplir sur la matière brute ; le corps s'use dans ce travail, mais l'Esprit ne s'use pas, au contraire : il en sort à chaque fois plus fort, plus lucide et plus capable. Qu'importe donc que l'Esprit change plus ou moins de fois d'enveloppe ; il n'en est pas moins Esprit ; c'est absolument comme si un homme renouvelait cent fois son habillement dans l'année, il n'en serait pas moins le même homme. Par le spectacle incessant de la destruction, Dieu apprend aux hommes le peu de cas qu'ils doivent faire de l'enveloppe matérielle, et suscite en eux l'idée de la vie spirituelle en la leur faisant désirer comme une compensation.
Dieu, dira-t-on, ne pouvait-il arriver au même résultat par d'autres moyens, et sans astreindre les êtres vivants à s'entredétruire ? Bien hardi celui qui prétendrait pénétrer les desseins de Dieu ! Si tout est sagesse dans son œuvre, nous devons supposer que cette sagesse ne doit pas plus faire défaut sur ce point que sur les autres ; si nous ne le comprenons pas, il faut nous en prendre à notre peu d'avancement. Toutefois, nous pouvons essayer d'en chercher la raison, en prenant pour boussole ce principe : Dieu doit être infiniment juste et sage ; cherchons donc en tout sa justice et sa sagesse.
Une première utilité qui se présente de cette destruction, utilité purement physique, il est vrai, est celle-ci : les corps organiques ne s'entretiennent qu'à l'aide des matières organiques, ces matières contenant seules les éléments nutritifs nécessaires à leur transformation. Les corps, instruments d'action du principe intelligent, ayant besoin d'être incessamment renouvelés, la Providence les fait servir à leur entretien mutuel ; c'est pour cela que les êtres se nourrissent les uns des autres ; c'est-à-dire que le corps se nourrit du corps, mais l'Esprit n'est ni anéanti, ni altéré ; il n'est que dépouillé de son enveloppe.
Il est en outre des considérations morales d'un ordre plus élevé.
La lutte est nécessaire au développement de l'Esprit ; c'est dans la lutte qu'il exerce ses facultés. Celui qui attaque pour avoir sa nourriture, et celui qui se défend pour conserver sa vie, font assaut de ruse et d'intelligence, et augmentent, par cela même, leurs forces intellectuelles. L'un des deux succombe ; mais qu'est-ce que le plus fort ou le plus adroit a enlevé au plus faible en réalité ? Son vêtement de chair, pas autre chose ; l'Esprit, qui n'est pas mort, en reprendra un autre plus tard.
Dans les êtres inférieurs de la création, dans ceux où le sens moral n'existe pas, où l'intelligence n'est encore qu'à l'état d'instinct, la lutte ne saurait avoir pour mobile que la satisfaction d'un besoin matériel ; or, un des besoins matériels les plus impérieux est celui de la nourriture ; ils luttent donc uniquement pour vivre, c'est-à-dire pour prendre ou défendre une proie, car ils ne sauraient être stimulés par un mobile plus élevé. C'est dans cette première période que l'âme s'élabore et s'essaye à la vie. Lorsqu'elle a atteint le degré de maturité nécessaire pour sa transformation, elle reçoit de Dieu de nouvelles facultés : le libre arbitre et le sens moral, l'étincelle divine en un mot, qui donnent un nouveau cours à ses idées, la dotent de nouvelles aptitudes et de nouvelles perceptions. Mais les nouvelles facultés morales dont elle est douée ne se développent que graduellement, car rien n'est brusque dans la nature ; il y a une période de transition où l'homme se distingue à peine de la brute ; dans les premiers âges, l'instinct animal domine, et la lutte a encore pour mobile la satisfaction des besoins matériels ; plus tard, l'instinct animal et le sentiment moral se contrebalancent ; l'homme alors lutte, non plus pour se nourrir, mais pour satisfaire son ambition, son orgueil, le besoin de dominer : pour cela, il lui faut encore détruire. Mais à mesure que le sens moral prend le dessus, la sensibilité se développe, le besoin de la destruction diminue ; il finit même par s'effacer et par devenir odieux : l'homme a horreur du sang. Cependant la lutte est toujours nécessaire au développement de l'Esprit, car même arrivé à ce point qui nous semble culminant, il est loin d'être parfait ; ce n'est qu'au prix de son activité qu'il acquiert des connaissances, de l'expérience, et qu'il se dépouille des derniers vestiges de l'animalité ; mais alors la lutte, de sanglante et brutale qu'elle était, devient purement intellectuelle ; l'homme lutte contre les difficultés et non plus contre ses semblables.
Nota. Cette explication, comme on le voit, se rattache à la grave question de l'avenir des animaux ; nous la traiterons prochainement à fond, parce qu'elle nous paraît suffisamment élaborée, et nous croyons qu'on peut, dès aujourd'hui, la considérer comme résolue en principe par la concordance de l'enseignement.
La vraie vie, de l'animal aussi bien que de l'homme, n'est pas plus dans l'enveloppe corporelle qu'elle n'est dans l'habillement ; elle est dans le principe intelligent qui préexiste et survit au corps. Ce principe a besoin du corps pour se développer par le travail qu'il doit accomplir sur la matière brute ; le corps s'use dans ce travail, mais l'Esprit ne s'use pas, au contraire : il en sort à chaque fois plus fort, plus lucide et plus capable. Qu'importe donc que l'Esprit change plus ou moins de fois d'enveloppe ; il n'en est pas moins Esprit ; c'est absolument comme si un homme renouvelait cent fois son habillement dans l'année, il n'en serait pas moins le même homme. Par le spectacle incessant de la destruction, Dieu apprend aux hommes le peu de cas qu'ils doivent faire de l'enveloppe matérielle, et suscite en eux l'idée de la vie spirituelle en la leur faisant désirer comme une compensation.
Dieu, dira-t-on, ne pouvait-il arriver au même résultat par d'autres moyens, et sans astreindre les êtres vivants à s'entredétruire ? Bien hardi celui qui prétendrait pénétrer les desseins de Dieu ! Si tout est sagesse dans son œuvre, nous devons supposer que cette sagesse ne doit pas plus faire défaut sur ce point que sur les autres ; si nous ne le comprenons pas, il faut nous en prendre à notre peu d'avancement. Toutefois, nous pouvons essayer d'en chercher la raison, en prenant pour boussole ce principe : Dieu doit être infiniment juste et sage ; cherchons donc en tout sa justice et sa sagesse.
Une première utilité qui se présente de cette destruction, utilité purement physique, il est vrai, est celle-ci : les corps organiques ne s'entretiennent qu'à l'aide des matières organiques, ces matières contenant seules les éléments nutritifs nécessaires à leur transformation. Les corps, instruments d'action du principe intelligent, ayant besoin d'être incessamment renouvelés, la Providence les fait servir à leur entretien mutuel ; c'est pour cela que les êtres se nourrissent les uns des autres ; c'est-à-dire que le corps se nourrit du corps, mais l'Esprit n'est ni anéanti, ni altéré ; il n'est que dépouillé de son enveloppe.
Il est en outre des considérations morales d'un ordre plus élevé.
La lutte est nécessaire au développement de l'Esprit ; c'est dans la lutte qu'il exerce ses facultés. Celui qui attaque pour avoir sa nourriture, et celui qui se défend pour conserver sa vie, font assaut de ruse et d'intelligence, et augmentent, par cela même, leurs forces intellectuelles. L'un des deux succombe ; mais qu'est-ce que le plus fort ou le plus adroit a enlevé au plus faible en réalité ? Son vêtement de chair, pas autre chose ; l'Esprit, qui n'est pas mort, en reprendra un autre plus tard.
Dans les êtres inférieurs de la création, dans ceux où le sens moral n'existe pas, où l'intelligence n'est encore qu'à l'état d'instinct, la lutte ne saurait avoir pour mobile que la satisfaction d'un besoin matériel ; or, un des besoins matériels les plus impérieux est celui de la nourriture ; ils luttent donc uniquement pour vivre, c'est-à-dire pour prendre ou défendre une proie, car ils ne sauraient être stimulés par un mobile plus élevé. C'est dans cette première période que l'âme s'élabore et s'essaye à la vie. Lorsqu'elle a atteint le degré de maturité nécessaire pour sa transformation, elle reçoit de Dieu de nouvelles facultés : le libre arbitre et le sens moral, l'étincelle divine en un mot, qui donnent un nouveau cours à ses idées, la dotent de nouvelles aptitudes et de nouvelles perceptions. Mais les nouvelles facultés morales dont elle est douée ne se développent que graduellement, car rien n'est brusque dans la nature ; il y a une période de transition où l'homme se distingue à peine de la brute ; dans les premiers âges, l'instinct animal domine, et la lutte a encore pour mobile la satisfaction des besoins matériels ; plus tard, l'instinct animal et le sentiment moral se contrebalancent ; l'homme alors lutte, non plus pour se nourrir, mais pour satisfaire son ambition, son orgueil, le besoin de dominer : pour cela, il lui faut encore détruire. Mais à mesure que le sens moral prend le dessus, la sensibilité se développe, le besoin de la destruction diminue ; il finit même par s'effacer et par devenir odieux : l'homme a horreur du sang. Cependant la lutte est toujours nécessaire au développement de l'Esprit, car même arrivé à ce point qui nous semble culminant, il est loin d'être parfait ; ce n'est qu'au prix de son activité qu'il acquiert des connaissances, de l'expérience, et qu'il se dépouille des derniers vestiges de l'animalité ; mais alors la lutte, de sanglante et brutale qu'elle était, devient purement intellectuelle ; l'homme lutte contre les difficultés et non plus contre ses semblables.
Nota. Cette explication, comme on le voit, se rattache à la grave question de l'avenir des animaux ; nous la traiterons prochainement à fond, parce qu'elle nous paraît suffisamment élaborée, et nous croyons qu'on peut, dès aujourd'hui, la considérer comme résolue en principe par la concordance de l'enseignement.
Un sermon dans le progrès
On nous écrit de Montauban :
Il s'est passé ces jours-ci dans notre ville un fait qui a diversement impressionné la population. Un prédicateur protestant, M. Rewile, chapelain du roi de Hollande, dans un discours prononcé devant deux mille personnes, s'affirmait carrément comme partisan des idées nouvelles. Nous avons été heureux en entendant, pour la première fois, ces sublimes vérités proclamées du haut d'une chaire chrétienne, et développées avec un talent et une éloquence hors ligne. Il faut bien qu'il ait été beau, puisque les fanatiques se sont hâtés de lui donner le titre d'antéchrist. Je regrette de ne pouvoir vous transmettre ce discours en entier, mais je vais essayer d'en analyser quelques passages.
« L'orateur avait pris pour texte « Je ne suis pas venu détruire la loi et les prophètes, mais l'accomplir. Aimez-vous de tout votre cœur, de toute votre âme, de toute votre pensée, et votre prochain comme vous-même. »
D'après M. Rewile, la mission du Christ parmi les hommes a été une mission de charité et de spiritualité ; sa doctrine semblait donc être en opposition avec celle des Juifs, dont le principe était : l'observation stricte de la lettre, » principe qui engendrait l'égoïsme. Mais le mot accomplir explique cette contradiction apparente, car accomplir signifie compléter, rendre plus parfait. Or, remplacer l'égoïsme par la charité, et le culte de la matière par la spiritualité, c'était accomplir, compléter la loi. Le Christ essaya, mais en vain, de faire rompre à cette nation les chaînes de la matière en élevant sa pensée, et en lui faisant envisager sa destinée de plus haut ; jamais elle ne put comprendre la profondeur de sa morale ; aussi, lorsqu'il voulut attaquer les abus de toute sorte, les pratiques extérieures et adoucir les rigueurs de la loi mosaïque, fut-il accusé et lâchement condamné. Les Juifs attendaient un Messie conquérant, qui, armé de son sceptre de fer, devait leur donner en partage la puissance temporelle, et ils ne comprenaient pas ce qu'il y avait de grand, de sublime dans celui qui, un faible roseau à la main, venait apporter à l'humanité, comme un gage de sa puissance spirituelle, la loi d'amour et de charité.
Mais les desseins de Dieu s'accomplissent toujours malgré toutes les résistances, et si les Juifs, comme des ouvriers de mauvaise volonté, refusèrent de travailler à la vigne, l'humanité n'en a pas moins marché et n'en marchera pas moins, entraînant sur son passage tout ce qui lui fait obstacle pour arriver au progrès. L'Église chrétienne, sous peine de déchéance, doit suivre cette marche ascendante, car l'humanité n'est pas faite pour l'Église, mais bien l'Église pour l'humanité. Malheur à qui résisterait, car il serait broyé comme poussière par la main du progrès ; le passé n'est-il pas fait pour répondre de l'avenir ?
Que les enfants du dix-neuvième siècle, contrairement à la conduite des Juifs anciens, comprennent et accomplissent leur œuvre ! N'éprouvent-ils pas déjà ce frémissement involontaire qui agite toutes les intelligences d'élite et qui les pousse spontanément vers la conquête des idées de spiritualité, seule garantie de bonheur pour l'humanité ; car, sans spiritualité, il n'y a que matière, et sans liberté il n'y a qu'esclavage ? Pourquoi donc résister plus longtemps à ces nobles élans de l'âme et attribuer au démon ces nouveaux signes des temps modernes ? pourquoi ne pas y voir plutôt les inspirations des messagers célestes d'un Dieu d'amour et de charité, nous annonçant la rénovation de l'humanité ?
Que l'Église chrétienne revienne à l'esprit. Qu'est-ce, en effet, que l'Église sans l'esprit, si ce n'est un cadavre, un vrai cadavre dans l'acception du mot ?… Que celui qui a des oreilles entende ! La véritable Église, dans ces jours critiques, a le droit de compter sur ses enfants… Allons, debout et à l'œuvre ! que chacun fasse son devoir. Dieu le veut ! Dieu le veut !
Si le Christ est venu pour accomplir, c'est-à-dire pour compléter la loi par la pratique de l'amour de Dieu et des hommes, c'est qu'il considérait ce précepte comme résumant la perfection humaine. La loi d'amour de Dieu et des hommes est, ainsi que l'enseigne le Christ lui-même, une loi de premier ordre à laquelle sont subordonnées toutes les autres. Il faut donc la pratiquer dans son acception la plus large, afin de se rapprocher de lui, et par conséquent de Dieu dont il a été la plus haute expression sur la terre. Pour aimer Dieu, il faut aimer le vrai, le beau, le bien ; il faut se sentir transporté intérieurement vers ces attributs de la perfection morale ; mais il faut aussi aimer ses frères, ses semblables, en qui Dieu se reflète dans ce qu'il a de vrai, de beau, de bien.
Pourquoi le Christ a-t-il aimé l'humanité jusqu'à donner sa vie pour elle ? Parce qu'étant aussi la plus haute expression de la perfection humaine, il a ressenti au plus haut degré les effets de cette loi d'amour de Dieu et des hommes, et qu'il a dû la pratiquer d'une manière sublime. Pratiquer la charité, aimer, c'est marcher à grands pas dans la voie du vrai, du beau, du bien ; c'est aller à Dieu ! Aimer, c'est vivre ; c'est aller à l'immortalité ! »
D'après ce qui m'a été rapporté, M. Rewile aurait abordé avec succès, dans deux conférences données aux élèves de la Faculté, la question des manifestations ; il aurait répondu victorieusement à toutes les objections. Je regrette de n'avoir pu l'entendre dans cette circonstance si intéressante.
Remarque. - Les Esprits avaient bien dit que le Spiritisme allait trouver des défenseurs dans les rangs même de ses adversaires. Un tel discours dans la bouche d'un ministre de la religion, et prononcé du haut de la chaire, est un événement grave. Attendons-nous à en voir d'autres, car l'exemple du courage de l'opinion est contagieux. Les idées nouvelles ne tarderont pas non plus à trouver des champions avoués dans la haute science, la littérature et la presse ; elles y ont déjà plus de sympathies qu'on ne le croit ; ce n'est que le premier pas qui coûte. Jusqu'à ce jour on peut dire qu'à l'exception des organes spéciaux du Spiritisme, qui ne s'adressent pas à la masse du public indifférent, nos adversaires ont eu seuls la parole, et Dieu sait s'ils en ont usé ! Maintenant la lutte s'engage ; que diront-ils quand ils verront des noms justement honorés et estimés sortir de leurs rangs, prendre ouvertement en main le drapeau de la doctrine ? Il est dit que tout doit s'accomplir
Il s'est passé ces jours-ci dans notre ville un fait qui a diversement impressionné la population. Un prédicateur protestant, M. Rewile, chapelain du roi de Hollande, dans un discours prononcé devant deux mille personnes, s'affirmait carrément comme partisan des idées nouvelles. Nous avons été heureux en entendant, pour la première fois, ces sublimes vérités proclamées du haut d'une chaire chrétienne, et développées avec un talent et une éloquence hors ligne. Il faut bien qu'il ait été beau, puisque les fanatiques se sont hâtés de lui donner le titre d'antéchrist. Je regrette de ne pouvoir vous transmettre ce discours en entier, mais je vais essayer d'en analyser quelques passages.
« L'orateur avait pris pour texte « Je ne suis pas venu détruire la loi et les prophètes, mais l'accomplir. Aimez-vous de tout votre cœur, de toute votre âme, de toute votre pensée, et votre prochain comme vous-même. »
D'après M. Rewile, la mission du Christ parmi les hommes a été une mission de charité et de spiritualité ; sa doctrine semblait donc être en opposition avec celle des Juifs, dont le principe était : l'observation stricte de la lettre, » principe qui engendrait l'égoïsme. Mais le mot accomplir explique cette contradiction apparente, car accomplir signifie compléter, rendre plus parfait. Or, remplacer l'égoïsme par la charité, et le culte de la matière par la spiritualité, c'était accomplir, compléter la loi. Le Christ essaya, mais en vain, de faire rompre à cette nation les chaînes de la matière en élevant sa pensée, et en lui faisant envisager sa destinée de plus haut ; jamais elle ne put comprendre la profondeur de sa morale ; aussi, lorsqu'il voulut attaquer les abus de toute sorte, les pratiques extérieures et adoucir les rigueurs de la loi mosaïque, fut-il accusé et lâchement condamné. Les Juifs attendaient un Messie conquérant, qui, armé de son sceptre de fer, devait leur donner en partage la puissance temporelle, et ils ne comprenaient pas ce qu'il y avait de grand, de sublime dans celui qui, un faible roseau à la main, venait apporter à l'humanité, comme un gage de sa puissance spirituelle, la loi d'amour et de charité.
Mais les desseins de Dieu s'accomplissent toujours malgré toutes les résistances, et si les Juifs, comme des ouvriers de mauvaise volonté, refusèrent de travailler à la vigne, l'humanité n'en a pas moins marché et n'en marchera pas moins, entraînant sur son passage tout ce qui lui fait obstacle pour arriver au progrès. L'Église chrétienne, sous peine de déchéance, doit suivre cette marche ascendante, car l'humanité n'est pas faite pour l'Église, mais bien l'Église pour l'humanité. Malheur à qui résisterait, car il serait broyé comme poussière par la main du progrès ; le passé n'est-il pas fait pour répondre de l'avenir ?
Que les enfants du dix-neuvième siècle, contrairement à la conduite des Juifs anciens, comprennent et accomplissent leur œuvre ! N'éprouvent-ils pas déjà ce frémissement involontaire qui agite toutes les intelligences d'élite et qui les pousse spontanément vers la conquête des idées de spiritualité, seule garantie de bonheur pour l'humanité ; car, sans spiritualité, il n'y a que matière, et sans liberté il n'y a qu'esclavage ? Pourquoi donc résister plus longtemps à ces nobles élans de l'âme et attribuer au démon ces nouveaux signes des temps modernes ? pourquoi ne pas y voir plutôt les inspirations des messagers célestes d'un Dieu d'amour et de charité, nous annonçant la rénovation de l'humanité ?
Que l'Église chrétienne revienne à l'esprit. Qu'est-ce, en effet, que l'Église sans l'esprit, si ce n'est un cadavre, un vrai cadavre dans l'acception du mot ?… Que celui qui a des oreilles entende ! La véritable Église, dans ces jours critiques, a le droit de compter sur ses enfants… Allons, debout et à l'œuvre ! que chacun fasse son devoir. Dieu le veut ! Dieu le veut !
Si le Christ est venu pour accomplir, c'est-à-dire pour compléter la loi par la pratique de l'amour de Dieu et des hommes, c'est qu'il considérait ce précepte comme résumant la perfection humaine. La loi d'amour de Dieu et des hommes est, ainsi que l'enseigne le Christ lui-même, une loi de premier ordre à laquelle sont subordonnées toutes les autres. Il faut donc la pratiquer dans son acception la plus large, afin de se rapprocher de lui, et par conséquent de Dieu dont il a été la plus haute expression sur la terre. Pour aimer Dieu, il faut aimer le vrai, le beau, le bien ; il faut se sentir transporté intérieurement vers ces attributs de la perfection morale ; mais il faut aussi aimer ses frères, ses semblables, en qui Dieu se reflète dans ce qu'il a de vrai, de beau, de bien.
Pourquoi le Christ a-t-il aimé l'humanité jusqu'à donner sa vie pour elle ? Parce qu'étant aussi la plus haute expression de la perfection humaine, il a ressenti au plus haut degré les effets de cette loi d'amour de Dieu et des hommes, et qu'il a dû la pratiquer d'une manière sublime. Pratiquer la charité, aimer, c'est marcher à grands pas dans la voie du vrai, du beau, du bien ; c'est aller à Dieu ! Aimer, c'est vivre ; c'est aller à l'immortalité ! »
D'après ce qui m'a été rapporté, M. Rewile aurait abordé avec succès, dans deux conférences données aux élèves de la Faculté, la question des manifestations ; il aurait répondu victorieusement à toutes les objections. Je regrette de n'avoir pu l'entendre dans cette circonstance si intéressante.
Remarque. - Les Esprits avaient bien dit que le Spiritisme allait trouver des défenseurs dans les rangs même de ses adversaires. Un tel discours dans la bouche d'un ministre de la religion, et prononcé du haut de la chaire, est un événement grave. Attendons-nous à en voir d'autres, car l'exemple du courage de l'opinion est contagieux. Les idées nouvelles ne tarderont pas non plus à trouver des champions avoués dans la haute science, la littérature et la presse ; elles y ont déjà plus de sympathies qu'on ne le croit ; ce n'est que le premier pas qui coûte. Jusqu'à ce jour on peut dire qu'à l'exception des organes spéciaux du Spiritisme, qui ne s'adressent pas à la masse du public indifférent, nos adversaires ont eu seuls la parole, et Dieu sait s'ils en ont usé ! Maintenant la lutte s'engage ; que diront-ils quand ils verront des noms justement honorés et estimés sortir de leurs rangs, prendre ouvertement en main le drapeau de la doctrine ? Il est dit que tout doit s'accomplir
Extrait du Journal de Saint-Jean d'Angély du 5 mars 1865
Société des études spirites de Saint-Jean d'Angély
Coup d’œil sur le spiritisme et ses conséquences
Il existe une harmonie secrète et continuelle entre le monde visible et le monde des Esprits. Cette harmonie, ses manifestations possibles, voilà, sans contredit, une des grandes questions de notre époque. C'est celle que nous nous proposons de traiter dans les colonnes de ce journal.
Nous nous adressons à tous, sans doute, mais plus particulièrement à ceux que leurs occupations journalières empêchent de se livrer dans de longs ouvrages à l'étude suivie des faits si émouvants, qui, signalés d'un bout de l'univers à l'autre, sont proclamés et attestés par les hommes les plus instruits ; démontrer la possibilité de ces faits par la révélation de lois naturelles inconnues jusqu'à notre temps ; les dépouiller de l'épithète ironique de prétendus miracles par laquelle on voudrait les amoindrir aux yeux de ceux qui n'en savent pas plus, initier ceux-là à la connaissance de la doctrine qui en est issue, déduire de cette doctrine les conséquences si consolantes qu'elle porte avec elle, voilà notre but.
On parle de miracles, s'il en est un incompréhensible à nos yeux, c'est celui de la froideur et de l'indifférence, réelles ou simulées, d'hommes intelligents et probes en présence des manifestations qui surgissent dans tous les coins du monde, et sont chaque jour publiées à profusion.
Si la reproduction de ce que tant d'autres ont vu n'aboutissait qu'à la satisfaction d'une enfantine curiosité, ou n'avait pour résultat que l'emploi de moments qui n'auraient pu être mieux occupés, oh ! c'est alors que nous comprendrions les dédains et les légèretés de langage.
Il ne peut plus en être ainsi quand nous pensons qu'il s'agit, non seulement du but le plus important de notre existence, la solution, par la preuve palpable de l'immortalité de nos âmes, de la question si longtemps discutée de nos destinées futures, mais qu'il s'agit aussi, et surtout, du rappel par la conviction de ces grandes vérités, de ceux qui s'en écartent, à l'accomplissement de leurs devoirs envers Dieu, leurs semblables et eux-mêmes.
Voyez un peu : vous êtes membre d'un jury, des témoins que vous ne connaissez pas, que vous n'avez jamais vus, viennent vous affirmer le fait le plus invraisemblable, l'assassinat d'un père par son fils ou d'un fils par son père, vous les croyez et vous condamnez le misérable auteur d'un pareil crime, et vous faites bien. Mais sondons la question la main sur la conscience, pensez-vous que si ce malheureux eût cru à un Dieu puissant et juste, que s'il eût compris depuis longtemps déjà que son acte horrible aurait infailliblement, dans une autre existence, sa punition méritée, pensez-vous qu'il n'eût pas reculé devant l'accomplissement de son forfait ? Non, vous ne le pensez pas ; comme nous, vous dites : Oui, la croyance, mais la croyance ferme et sans restriction, la croyance absolue, à un Dieu juste, aux peines et aux récompenses dans une autre vie où chacun recevra selon ses œuvres ici-bas, voilà le frein qui doit être le plus difficile à briser ; et vous avez encore raison.
Malheureusement ces croyances sont, pour la presque universalité, les inconnues du grand problème de la moralisation universelle.
Arrêtez un peu ! me crie le plus grand nombre ; nous cessons d'être d'accord ; il y a longtemps que notre intelligence, nos études nous ont fait connaître la solution que vous indiquez. Pour nous, vos prétendues nouvelles preuves sont inutiles, nous sommes et avons toujours été croyants.
Tel est bien le langage que nous tient le commun des martyrs.
Vous avez, dites-vous, toujours cru, vous nous l'assurez du moins ; tant mieux pour vous, messieurs ; s'il faut l'avouer, nous ne nous en doutions guère ; recevez-en nos sincères félicitations ; nous serions vraiment heureux d'en pouvoir affirmer autant. Franchement, nous convenons que, malgré la faveur de toutes les bonnes conditions qui ont pu contribuer à élever nos idées, il nous restait bien du chemin à faire pour en avoir fait autant que vous. Combien de nos frères, à plus forte raison, ont pu rester en arrière, privés qu'ils étaient par leurs positions sociales des avantages de l'étude et quelquefois de bons exemples ?
Oui, la foi est morte : tous les docteurs de la loi en conviennent et en gémissent ; jamais, malgré leurs efforts, jamais l'incrédulité ne fut plus profonde, plus générale. Suivez un peu cette longue file d'hommes qui viennent, comme ils le disent, de conduire un des leurs à sa dernière demeure, vous en entendrez quatre-vingt-quinze sur cent répéter : Encore un à bout de ses peines. Tristes paroles, triste et bien grande preuve à la fois de l'insuffisance des moyens employés de nos jours pour la propagation du seul et véritable bonheur que les hommes puissent goûter sur notre terre, pour la propagation de la foi.
Dieu soit loué ! un nouveau phare brille pour tous ; arrière le privilège ! Place aux hommes de bonne volonté ! Sans efforts d'intelligence, sans études difficiles et coûteuses, le plus humble, le moins instruit peut, à l'égal de tous ses frères, contempler, s'il le veut, la lumière divine. Ceux-là seuls ne verront pas qui ne voudront pas voir.
S'il en est ainsi, et, nous le répétons, les hommes les plus honorables, les plus instruits, dont nous citerons les noms par phalanges, en donnent les témoignages les plus authentiques, s'il en est ainsi, disons-nous, pourquoi s'évertuer à mettre la lumière sous le boisseau ? Pourquoi, pour cela seul que nous n'en sentons pas le besoin pour nous, rejeter, sans examen, des phénomènes dont la connaissance et l'appréciation peuvent, sinon toujours, souvent du moins, arrêter sur les pentes fatales où poussent le doute et l'incrédulité, peuvent dans tous les cas, et à si peu de frais, relever par l'espérance les courages prêts à succomber sous le poids de l'infortune ?
Voilà les bienfaits que, par l'exemple, on peut si facilement répandre bien loin autour de soi, mais dont l'indifférence, autant que l'opposition, peuvent aussi retarder le progrès et la diffusion.
A. Chaigneau, D.–M.–P.
Sera continué.
Remarque. - Notre prévision émise dans l'article précédent, à propos du sermon de Montauban, commence à se réaliser. Voici un journal qui n'est point un organe du Spiritisme, et qui accueille aujourd'hui, ce que sans doute il n'aurait point fait il y a un an, non des récits de faits, mais des articles de fond, développant les principes de la doctrine. Et de qui sont ces articles ? d'un inconnu ? d'un ignorant ? Non ; ils sont d'un médecin jouissant dans le pays d'une réputation de savoir justement méritée et d'une considération due à ses éminentes qualités. Encore un exemple qui aura des imitateurs.
Nous savons plus d'un journal qui ne répugnerait point à parler favorablement du Spiritisme, qui en parlerait même volontiers si ce n'était la crainte de déplaire à certains lecteurs, et de compromettre ses propres intérêts. Cette crainte pouvait être fondée dans un temps, mais aujourd'hui, elle ne l'est plus. Depuis quelques années, l'opinion a bien changé à l'endroit du Spiritisme ; ce n'est plus une chose inconnue ; on en parle partout ; on n'en rit plus autant. L'idée s'est tellement vulgarisée, que si l'on s'étonne d'une chose, c'est de voir la presse indifférente à une question qui préoccupe les masses, et qui compte ses partisans par millions dans tous les pays du monde, et dans les rangs les plus éclairés de la société ; c'est surtout de voir des hommes d'intelligence la critiquer sans en savoir le premier mot. Est-ce donc une question futile que celle qui soulève les colères de tout un parti ; ce parti s'en émouvrait-il s'il n'y voyait qu'un mythe sans conséquence ? Il en rirait ; mais dès lors qu'il se fâche, qu'il tonne, qu'il allume ses auto-da-fé dans l'espoir de tuer l'idée, c'est qu'il y a quelque chose de sérieux. Ah ! si tous ceux qui se disent les représentants du progrès se donnaient la peine d'approfondir la question, il est probable qu'ils ne la traiteraient pas avec tant de dédain.
Quoi qu'il en soit, notre but n'est point ici d'en faire l'apologie ; nous voulons seulement constater un fait avéré aujourd'hui, c'est que l'idée spirite a pris rang parmi les doctrines philosophiques ; qu'elle constitue une opinion dont les représentants se multiplient tellement que ses adversaires sont les premiers à le proclamer. La conséquence naturelle de ceci, c'est que les journaux qui seront franchement sympathiques à cette cause, auront les sympathies de ses adhérents, et que ceux-ci sont assez nombreux pour compenser amplement les quelques défections qu'ils pourraient éprouver, si toutefois ils en éprouvaient.
Le public, au point de vue de l'idée spirite, se partage en trois catégories : les partisans, les indifférents et les antagonistes. Il est constant que les deux premières composent l'immense majorité ; les partisans les rechercheront par sympathie ; les indifférents seront satisfaits de trouver dans une discussion impartiale les moyens de s'éclairer sur ce qu'ils ignorent. Quant aux antagonistes, la plupart se contenteront de ne pas lire les articles qui ne leur conviendront pas, mais ils ne renonceront pas, pour ce motif, à un journal qui leur plaît sous d'autres rapports par ses tendances politiques, sa rédaction, ses feuilletons ou la variété de ses nouvelles diverses. Les adversaires nés du Spiritisme ont d'ailleurs leurs journaux spéciaux. En somme, il est certain que, dans l'état actuel de l'opinion, ils y gagneraient plus qu'ils n'y perdraient.
On dira sans doute, et cela avec raison, que la conviction ne se commande pas, et qu'un journal, pas plus qu'un individu, ne peut embrasser des idées qui ne sont pas les siennes. Ceci est très juste, mais n'empêche pas l'impartialité. Or, jusqu'à ce jour, à un très petit nombre d'exceptions près, les journaux ont ouvert leurs colonnes aussi largement que possible à la critique, aux attaques, à la diffamation même contre une classe nombreuse de citoyens, jetant sans scrupule le ridicule et le mépris sur les personnes, tandis qu'ils les ont impitoyablement fermées à la défense. Que de fois la loi ne donnait-elle pas à la réplique des droits qui ont été méconnus ! Fallait-il donc avoir recours aux mesures de rigueur, intenter des procès ? Il y en aurait eu des milliers depuis dix ans. Nous le demandons, est-ce là de l'impartialité, de la justice, de la part de feuilles qui proclament sans cesse la liberté de la pensée, l'égalité des droits et la fraternité ? On comprend la réfutation d'une doctrine que l'on ne partage pas, la discussion raisonnée et de bonne foi de ses principes ; mais ce qui n'est ni juste ni loyal, c'est de la dénaturer et de lui faire dire le contraire de ce qu'elle dit, en vue de la discréditer ; or, c'est ce que font journellement les adversaires du Spiritisme. Admettre la défense après l'attaque, la rectification des inexactitudes, ne serait pas en épouser les principes ; ce ne serait que de l'impartialité et de la loyauté. Un journal pourrait même aller plus loin ; sans renoncer à ses convictions, et sous toute réserve de ses opinions personnelles, il pourrait admettre la discussion du pour et du contre ; il mettrait ainsi ses lecteurs à même de juger une question qui en vaut bien la peine, par le retentissement qu'elle acquiert chaque jour.
Nous devons donc des éloges à l'impartialité du journal qui accueille les articles de M. Chaigneau. Nous en devons aussi à l'auteur qui, l'un des premiers, entre dans l'arène de la publicité officielle pour y soutenir notre cause avec l'autorité d'un homme de science. L'article rapporté ci-dessus n'est que l'introduction de son travail ; le numéro du 12 mars contient l'entrée en matière : c'est un exposé savamment raisonné de l'historique du Spiritisme moderne. Nous regrettons que son étendue ne nous permette pas de le reproduire.
Nous nous adressons à tous, sans doute, mais plus particulièrement à ceux que leurs occupations journalières empêchent de se livrer dans de longs ouvrages à l'étude suivie des faits si émouvants, qui, signalés d'un bout de l'univers à l'autre, sont proclamés et attestés par les hommes les plus instruits ; démontrer la possibilité de ces faits par la révélation de lois naturelles inconnues jusqu'à notre temps ; les dépouiller de l'épithète ironique de prétendus miracles par laquelle on voudrait les amoindrir aux yeux de ceux qui n'en savent pas plus, initier ceux-là à la connaissance de la doctrine qui en est issue, déduire de cette doctrine les conséquences si consolantes qu'elle porte avec elle, voilà notre but.
On parle de miracles, s'il en est un incompréhensible à nos yeux, c'est celui de la froideur et de l'indifférence, réelles ou simulées, d'hommes intelligents et probes en présence des manifestations qui surgissent dans tous les coins du monde, et sont chaque jour publiées à profusion.
Si la reproduction de ce que tant d'autres ont vu n'aboutissait qu'à la satisfaction d'une enfantine curiosité, ou n'avait pour résultat que l'emploi de moments qui n'auraient pu être mieux occupés, oh ! c'est alors que nous comprendrions les dédains et les légèretés de langage.
Il ne peut plus en être ainsi quand nous pensons qu'il s'agit, non seulement du but le plus important de notre existence, la solution, par la preuve palpable de l'immortalité de nos âmes, de la question si longtemps discutée de nos destinées futures, mais qu'il s'agit aussi, et surtout, du rappel par la conviction de ces grandes vérités, de ceux qui s'en écartent, à l'accomplissement de leurs devoirs envers Dieu, leurs semblables et eux-mêmes.
Voyez un peu : vous êtes membre d'un jury, des témoins que vous ne connaissez pas, que vous n'avez jamais vus, viennent vous affirmer le fait le plus invraisemblable, l'assassinat d'un père par son fils ou d'un fils par son père, vous les croyez et vous condamnez le misérable auteur d'un pareil crime, et vous faites bien. Mais sondons la question la main sur la conscience, pensez-vous que si ce malheureux eût cru à un Dieu puissant et juste, que s'il eût compris depuis longtemps déjà que son acte horrible aurait infailliblement, dans une autre existence, sa punition méritée, pensez-vous qu'il n'eût pas reculé devant l'accomplissement de son forfait ? Non, vous ne le pensez pas ; comme nous, vous dites : Oui, la croyance, mais la croyance ferme et sans restriction, la croyance absolue, à un Dieu juste, aux peines et aux récompenses dans une autre vie où chacun recevra selon ses œuvres ici-bas, voilà le frein qui doit être le plus difficile à briser ; et vous avez encore raison.
Malheureusement ces croyances sont, pour la presque universalité, les inconnues du grand problème de la moralisation universelle.
Arrêtez un peu ! me crie le plus grand nombre ; nous cessons d'être d'accord ; il y a longtemps que notre intelligence, nos études nous ont fait connaître la solution que vous indiquez. Pour nous, vos prétendues nouvelles preuves sont inutiles, nous sommes et avons toujours été croyants.
Tel est bien le langage que nous tient le commun des martyrs.
Vous avez, dites-vous, toujours cru, vous nous l'assurez du moins ; tant mieux pour vous, messieurs ; s'il faut l'avouer, nous ne nous en doutions guère ; recevez-en nos sincères félicitations ; nous serions vraiment heureux d'en pouvoir affirmer autant. Franchement, nous convenons que, malgré la faveur de toutes les bonnes conditions qui ont pu contribuer à élever nos idées, il nous restait bien du chemin à faire pour en avoir fait autant que vous. Combien de nos frères, à plus forte raison, ont pu rester en arrière, privés qu'ils étaient par leurs positions sociales des avantages de l'étude et quelquefois de bons exemples ?
Oui, la foi est morte : tous les docteurs de la loi en conviennent et en gémissent ; jamais, malgré leurs efforts, jamais l'incrédulité ne fut plus profonde, plus générale. Suivez un peu cette longue file d'hommes qui viennent, comme ils le disent, de conduire un des leurs à sa dernière demeure, vous en entendrez quatre-vingt-quinze sur cent répéter : Encore un à bout de ses peines. Tristes paroles, triste et bien grande preuve à la fois de l'insuffisance des moyens employés de nos jours pour la propagation du seul et véritable bonheur que les hommes puissent goûter sur notre terre, pour la propagation de la foi.
Dieu soit loué ! un nouveau phare brille pour tous ; arrière le privilège ! Place aux hommes de bonne volonté ! Sans efforts d'intelligence, sans études difficiles et coûteuses, le plus humble, le moins instruit peut, à l'égal de tous ses frères, contempler, s'il le veut, la lumière divine. Ceux-là seuls ne verront pas qui ne voudront pas voir.
S'il en est ainsi, et, nous le répétons, les hommes les plus honorables, les plus instruits, dont nous citerons les noms par phalanges, en donnent les témoignages les plus authentiques, s'il en est ainsi, disons-nous, pourquoi s'évertuer à mettre la lumière sous le boisseau ? Pourquoi, pour cela seul que nous n'en sentons pas le besoin pour nous, rejeter, sans examen, des phénomènes dont la connaissance et l'appréciation peuvent, sinon toujours, souvent du moins, arrêter sur les pentes fatales où poussent le doute et l'incrédulité, peuvent dans tous les cas, et à si peu de frais, relever par l'espérance les courages prêts à succomber sous le poids de l'infortune ?
Voilà les bienfaits que, par l'exemple, on peut si facilement répandre bien loin autour de soi, mais dont l'indifférence, autant que l'opposition, peuvent aussi retarder le progrès et la diffusion.
A. Chaigneau, D.–M.–P.
Sera continué.
Remarque. - Notre prévision émise dans l'article précédent, à propos du sermon de Montauban, commence à se réaliser. Voici un journal qui n'est point un organe du Spiritisme, et qui accueille aujourd'hui, ce que sans doute il n'aurait point fait il y a un an, non des récits de faits, mais des articles de fond, développant les principes de la doctrine. Et de qui sont ces articles ? d'un inconnu ? d'un ignorant ? Non ; ils sont d'un médecin jouissant dans le pays d'une réputation de savoir justement méritée et d'une considération due à ses éminentes qualités. Encore un exemple qui aura des imitateurs.
Nous savons plus d'un journal qui ne répugnerait point à parler favorablement du Spiritisme, qui en parlerait même volontiers si ce n'était la crainte de déplaire à certains lecteurs, et de compromettre ses propres intérêts. Cette crainte pouvait être fondée dans un temps, mais aujourd'hui, elle ne l'est plus. Depuis quelques années, l'opinion a bien changé à l'endroit du Spiritisme ; ce n'est plus une chose inconnue ; on en parle partout ; on n'en rit plus autant. L'idée s'est tellement vulgarisée, que si l'on s'étonne d'une chose, c'est de voir la presse indifférente à une question qui préoccupe les masses, et qui compte ses partisans par millions dans tous les pays du monde, et dans les rangs les plus éclairés de la société ; c'est surtout de voir des hommes d'intelligence la critiquer sans en savoir le premier mot. Est-ce donc une question futile que celle qui soulève les colères de tout un parti ; ce parti s'en émouvrait-il s'il n'y voyait qu'un mythe sans conséquence ? Il en rirait ; mais dès lors qu'il se fâche, qu'il tonne, qu'il allume ses auto-da-fé dans l'espoir de tuer l'idée, c'est qu'il y a quelque chose de sérieux. Ah ! si tous ceux qui se disent les représentants du progrès se donnaient la peine d'approfondir la question, il est probable qu'ils ne la traiteraient pas avec tant de dédain.
Quoi qu'il en soit, notre but n'est point ici d'en faire l'apologie ; nous voulons seulement constater un fait avéré aujourd'hui, c'est que l'idée spirite a pris rang parmi les doctrines philosophiques ; qu'elle constitue une opinion dont les représentants se multiplient tellement que ses adversaires sont les premiers à le proclamer. La conséquence naturelle de ceci, c'est que les journaux qui seront franchement sympathiques à cette cause, auront les sympathies de ses adhérents, et que ceux-ci sont assez nombreux pour compenser amplement les quelques défections qu'ils pourraient éprouver, si toutefois ils en éprouvaient.
Le public, au point de vue de l'idée spirite, se partage en trois catégories : les partisans, les indifférents et les antagonistes. Il est constant que les deux premières composent l'immense majorité ; les partisans les rechercheront par sympathie ; les indifférents seront satisfaits de trouver dans une discussion impartiale les moyens de s'éclairer sur ce qu'ils ignorent. Quant aux antagonistes, la plupart se contenteront de ne pas lire les articles qui ne leur conviendront pas, mais ils ne renonceront pas, pour ce motif, à un journal qui leur plaît sous d'autres rapports par ses tendances politiques, sa rédaction, ses feuilletons ou la variété de ses nouvelles diverses. Les adversaires nés du Spiritisme ont d'ailleurs leurs journaux spéciaux. En somme, il est certain que, dans l'état actuel de l'opinion, ils y gagneraient plus qu'ils n'y perdraient.
On dira sans doute, et cela avec raison, que la conviction ne se commande pas, et qu'un journal, pas plus qu'un individu, ne peut embrasser des idées qui ne sont pas les siennes. Ceci est très juste, mais n'empêche pas l'impartialité. Or, jusqu'à ce jour, à un très petit nombre d'exceptions près, les journaux ont ouvert leurs colonnes aussi largement que possible à la critique, aux attaques, à la diffamation même contre une classe nombreuse de citoyens, jetant sans scrupule le ridicule et le mépris sur les personnes, tandis qu'ils les ont impitoyablement fermées à la défense. Que de fois la loi ne donnait-elle pas à la réplique des droits qui ont été méconnus ! Fallait-il donc avoir recours aux mesures de rigueur, intenter des procès ? Il y en aurait eu des milliers depuis dix ans. Nous le demandons, est-ce là de l'impartialité, de la justice, de la part de feuilles qui proclament sans cesse la liberté de la pensée, l'égalité des droits et la fraternité ? On comprend la réfutation d'une doctrine que l'on ne partage pas, la discussion raisonnée et de bonne foi de ses principes ; mais ce qui n'est ni juste ni loyal, c'est de la dénaturer et de lui faire dire le contraire de ce qu'elle dit, en vue de la discréditer ; or, c'est ce que font journellement les adversaires du Spiritisme. Admettre la défense après l'attaque, la rectification des inexactitudes, ne serait pas en épouser les principes ; ce ne serait que de l'impartialité et de la loyauté. Un journal pourrait même aller plus loin ; sans renoncer à ses convictions, et sous toute réserve de ses opinions personnelles, il pourrait admettre la discussion du pour et du contre ; il mettrait ainsi ses lecteurs à même de juger une question qui en vaut bien la peine, par le retentissement qu'elle acquiert chaque jour.
Nous devons donc des éloges à l'impartialité du journal qui accueille les articles de M. Chaigneau. Nous en devons aussi à l'auteur qui, l'un des premiers, entre dans l'arène de la publicité officielle pour y soutenir notre cause avec l'autorité d'un homme de science. L'article rapporté ci-dessus n'est que l'introduction de son travail ; le numéro du 12 mars contient l'entrée en matière : c'est un exposé savamment raisonné de l'historique du Spiritisme moderne. Nous regrettons que son étendue ne nous permette pas de le reproduire.
Correspondance d'outre-tombe
Étude médianimique
Pour l'intelligence du fait principal
dont il s'agit, nous extrayons le passage suivant de la lettre d'un de
nos abonnés ; c'est en outre une simple et touchante expression des
consolations que les affligés puisent dans le Spiritisme :
« Permettez-moi de vous dire combien le Spiritisme m'a procuré de soulagement en me donnant la certitude de revoir dans un monde meilleur un être que j'avais aimé d'un amour sans bornes, un frère chéri mort à la fleur de l'âge. Qu'elle est consolante cette pensée que celui dont nous pleurons la mort est souvent près de nous, nous soutenant lorsque nous sommes accablés sous le poids de la douleur, se réjouissant lorsque la foi dans l'avenir nous fait entrevoir une réunion certaine ! Initié depuis quelques années déjà aux admirables préceptes du Spiritisme, j'en avais accepté toutes les vérités, et m'étais efforcé de vivre ici-bas de manière à hâter mon avancement. Mes bonnes résolutions avaient été prises bien sincèrement, et cependant, je l'avoue, ne possédant pas les éléments nécessaires pour fortifier et entretenir ma croyance en la communication des Esprits, je m'étais habitué peu à peu, non pas à la rejeter, mais à l'envisager avec plus d'indifférence. C'est que le malheur m'était resté inconnu jusqu'alors. Aujourd'hui qu'il a plu à Dieu de m'envoyer une douloureuse épreuve, j'ai puisé dans le Spiritisme de précieuses consolations, et j'éprouve le besoin de vous en remercier tout particulièrement, comme le premier propagateur de cette sainte doctrine.
La doctrine du Spiritisme n'étant pas une simple hypothèse, mais s'appuyant sur des faits patents et à la portée de tout le monde, les consolations qu'elle procure consistent non seulement dans la certitude de revoir les personnes aimées, mais aussi, et surtout, dans la possibilité de correspondre avec elles et d'en obtenir de salutaires enseignements. »
Dans cette conviction, le frère vivant écrivit à son frère mort la lettre suivante dont il sollicita la réponse par l'entremise d'un médium :
N… 14 mars 1865.
Mon frère bien-aimé,
Il m'est impossible de te dire combien j'étais heureux en lisant la lettre que tu as bien voulu m'adresser par l'intermédiaire du médium de S… Je l'ai communiquée à nos pauvres parents que tu as bien affligés en nous quittant d'une manière si inattendue. Ils me demandent de t'écrire de nouveau, de te demander de nouveaux détails sur ton existence actuelle, afin de pouvoir croire, par des preuves qu'il te sera facile de donner, à la réalité de l'enseignement des Esprits. Mais, avant tout, rends-toi souvent auprès d'eux, inspire-leur la résignation et la foi dans l'avenir ; console-les, car ils en ont besoin, brisés qu'ils ont été par un coup si inattendu. Quant à moi, ô mon frère bien-aimé, je serai toujours heureux lorsqu'il te sera permis de me donner de tes nouvelles. Je viens te demander aujourd'hui de nouveaux détails sur ta maladie, ta mort et ton réveil dans le monde des Esprits. – Quels sont les Esprits qui sont venus te recevoir à ton entrée dans le monde invisible ? – As-tu revu notre grand-père ? Est-il heureux ? – As-tu revu et reconnu nos parents décédés avant toi, même ceux que tu n'avais pas connus sur cette terre ? – As-tu assisté à ton enterrement ? Quelle impression en as-tu ressentie ? Donne-moi, je t'en supplie, quelques détails sur cette triste cérémonie qui ne permettent pas à nos parents de douter de ton identité. Pourrais-tu me dire si quelque membre de notre famille pourra devenir médium ? Ne désirerais-tu pas te communiquer par l'intermédiaire de l'un de nous ? – Je ne puis comprendre que tu ne veuilles plus continuer tes études musicales que tu cultivais avec tant d'ardeur sur cette terre ; ce serait une bien douce consolation pour nous, si tu voulais terminer, par l'intermédiaire d'un médium, les psaumes que tu as commencé à mettre en musique à Paris. – Tu as pu constater le vide immense causé par ta mort dans le cœur de nous tous. Inspire, je t'en supplie, à tes parents, le courage nécessaire pour ne pas succomber sous cette terrible épreuve ; sois souvent avec eux et donne-leur souvent de tes nouvelles. Quant à moi, Dieu sait combien je t'ai pleuré ! Malgré ma croyance au Spiritisme, il y a des moments où je ne puis me faire à l'idée de ne plus te revoir sur cette terre, et où je donnerais ma vie pour pouvoir te serrer sur mon cœur. – Adieu, mon noble ami ; songe quelquefois à celui dont les pensées sont constamment dirigées vers toi, et qui fera son possible pour être jugé digne d'être réuni un jour à toi. – Je t'embrasse et te serre sur mon cœur.
Ton frère tout dévoué, B…
« Permettez-moi de vous dire combien le Spiritisme m'a procuré de soulagement en me donnant la certitude de revoir dans un monde meilleur un être que j'avais aimé d'un amour sans bornes, un frère chéri mort à la fleur de l'âge. Qu'elle est consolante cette pensée que celui dont nous pleurons la mort est souvent près de nous, nous soutenant lorsque nous sommes accablés sous le poids de la douleur, se réjouissant lorsque la foi dans l'avenir nous fait entrevoir une réunion certaine ! Initié depuis quelques années déjà aux admirables préceptes du Spiritisme, j'en avais accepté toutes les vérités, et m'étais efforcé de vivre ici-bas de manière à hâter mon avancement. Mes bonnes résolutions avaient été prises bien sincèrement, et cependant, je l'avoue, ne possédant pas les éléments nécessaires pour fortifier et entretenir ma croyance en la communication des Esprits, je m'étais habitué peu à peu, non pas à la rejeter, mais à l'envisager avec plus d'indifférence. C'est que le malheur m'était resté inconnu jusqu'alors. Aujourd'hui qu'il a plu à Dieu de m'envoyer une douloureuse épreuve, j'ai puisé dans le Spiritisme de précieuses consolations, et j'éprouve le besoin de vous en remercier tout particulièrement, comme le premier propagateur de cette sainte doctrine.
La doctrine du Spiritisme n'étant pas une simple hypothèse, mais s'appuyant sur des faits patents et à la portée de tout le monde, les consolations qu'elle procure consistent non seulement dans la certitude de revoir les personnes aimées, mais aussi, et surtout, dans la possibilité de correspondre avec elles et d'en obtenir de salutaires enseignements. »
Dans cette conviction, le frère vivant écrivit à son frère mort la lettre suivante dont il sollicita la réponse par l'entremise d'un médium :
N… 14 mars 1865.
Mon frère bien-aimé,
Il m'est impossible de te dire combien j'étais heureux en lisant la lettre que tu as bien voulu m'adresser par l'intermédiaire du médium de S… Je l'ai communiquée à nos pauvres parents que tu as bien affligés en nous quittant d'une manière si inattendue. Ils me demandent de t'écrire de nouveau, de te demander de nouveaux détails sur ton existence actuelle, afin de pouvoir croire, par des preuves qu'il te sera facile de donner, à la réalité de l'enseignement des Esprits. Mais, avant tout, rends-toi souvent auprès d'eux, inspire-leur la résignation et la foi dans l'avenir ; console-les, car ils en ont besoin, brisés qu'ils ont été par un coup si inattendu. Quant à moi, ô mon frère bien-aimé, je serai toujours heureux lorsqu'il te sera permis de me donner de tes nouvelles. Je viens te demander aujourd'hui de nouveaux détails sur ta maladie, ta mort et ton réveil dans le monde des Esprits. – Quels sont les Esprits qui sont venus te recevoir à ton entrée dans le monde invisible ? – As-tu revu notre grand-père ? Est-il heureux ? – As-tu revu et reconnu nos parents décédés avant toi, même ceux que tu n'avais pas connus sur cette terre ? – As-tu assisté à ton enterrement ? Quelle impression en as-tu ressentie ? Donne-moi, je t'en supplie, quelques détails sur cette triste cérémonie qui ne permettent pas à nos parents de douter de ton identité. Pourrais-tu me dire si quelque membre de notre famille pourra devenir médium ? Ne désirerais-tu pas te communiquer par l'intermédiaire de l'un de nous ? – Je ne puis comprendre que tu ne veuilles plus continuer tes études musicales que tu cultivais avec tant d'ardeur sur cette terre ; ce serait une bien douce consolation pour nous, si tu voulais terminer, par l'intermédiaire d'un médium, les psaumes que tu as commencé à mettre en musique à Paris. – Tu as pu constater le vide immense causé par ta mort dans le cœur de nous tous. Inspire, je t'en supplie, à tes parents, le courage nécessaire pour ne pas succomber sous cette terrible épreuve ; sois souvent avec eux et donne-leur souvent de tes nouvelles. Quant à moi, Dieu sait combien je t'ai pleuré ! Malgré ma croyance au Spiritisme, il y a des moments où je ne puis me faire à l'idée de ne plus te revoir sur cette terre, et où je donnerais ma vie pour pouvoir te serrer sur mon cœur. – Adieu, mon noble ami ; songe quelquefois à celui dont les pensées sont constamment dirigées vers toi, et qui fera son possible pour être jugé digne d'être réuni un jour à toi. – Je t'embrasse et te serre sur mon cœur.
Ton frère tout dévoué, B…
Nota.
– Dans une précédente communication donnée aux parents par un autre
médium, il avait été dit que le jeune homme ne voulait pas continuer ses
études musicales dans le monde des Esprits.
Réponse du frère mort au frère vivant
Me voilà, mon bon frère ; mais tu
exiges trop ; je ne peux, avec la meilleure volonté, satisfaire, dans
une seule évocation, aux nombreuses demandes que tu m'adresses. Ne
sais-tu pas qu'il est quelquefois très difficile aux Esprits de
transmettre leur pensée à l'aide de certains médiums peu propres à
recevoir nettement, dans le cerveau, l'impression photographique des
pensées de certains Esprits, et qui, en les dénaturant, leur donnent un
cachet de fausseté qui amène, de la part des intéressés, la négation la
plus formelle de la manifestation ; ce qui est très peu flatteur et
attriste profondément ceux qui, faute d'instruments convenables, sont
impuissants à donner des signes d'identité suffisants.
Crois-moi, bon frère, évoque-moi en famille ; et toi-même, avec un peu de bonne volonté et quelques essais persévérants, tu pourras causer à ton gré avec moi. Je suis presque toujours près de toi, parce que je sais que tu es Spirite et que j'espère en toi. Il est certain que la sympathie attire la sympathie, et qu'on ne peut être expansif avec un médium qu'on voit pour la première fois ; je vais cependant tâcher de vous satisfaire.
Ma mort qui vous afflige était le terme de la captivité de mon âme ; votre amour, votre sollicitude, votre tendresse avaient rendu doux mon exil sur la terre ; mais, dans mes plus beaux moments d'inspiration musicale, je tournais mes regards vers les régions lumineuses où tout est harmonie, et je m'oubliais à écouter les accords lointains de la mélodie céleste qui m'inondait de ses douces vibrations. Que de fois je me suis oublié dans ces rêveries extatiques, auxquelles je devais le succès de mes études musicales que je continue ici ! Ce serait une étrange erreur de croire que l'aptitude individuelle se perd dans le monde spirite ; elle s'y perfectionne, au contraire, pour apporter en-suite ce perfectionnement sur les planètes où ces Esprits sont appelés à vivre.
Ne pleurez donc plus, vous tous, bien-aimés parents ! A quoi servent les pleurs ? A énerver, à décourager les âmes. Je suis parti le premier, mais vous viendrez me rejoindre ; cette certitude n'est-elle pas assez puissante pour vous consoler ? La rose, qui a exhalé ses parfums au chêne, meurt comme moi après avoir peu vécu, en jonchant le sol de ses pétales flétris ; mais le chêne meurt à son tour, et il a le sort de la rose qu'il a pleuré et dont les vives couleurs s'harmonisaient avec son sombre feuillage.
Encore quelque temps, et vous viendrez à moi ; nous chanterons alors le cantique des cantiques, et nous louerons Dieu dans ses œuvres ; car nous serons heureux ensemble, si vous vous résignez à l'épreuve qui vous frappe.
Celui qui fut ton frère sur la terre et qui t'aime toujours.
B…
Plusieurs enseignements importants ressortent de cette communication. Le premier est la difficulté qu'éprouve l'Esprit à s'exprimer à l'aide de l'instrument qui lui était donné. Nous connaissons personnellement ce médium qui a fait depuis longtemps ses preuves comme puissance et flexibilité de faculté, surtout en fait d'évocations particulières ; c'est ce qu'on peut appeler un médium sûr et bien assisté. D'où vient donc cet empêchement ? C'est que la facilité des communications dépend du degré d'affinité fluidique qui existe entre l'Esprit et le médium. Chaque médium est ainsi plus ou moins apte à recevoir l'impression ou l'impulsion de la pensée de tel ou tel Esprit ; il peut être un bon instrument pour l'un et un mauvais instrument pour l'autre, sans que cela préjuge rien contre ses qualités, cette condition étant plus organique que morale. Les Esprits recherchent donc de préférence les instruments qui vibrent à leur unisson ; leur imposer le premier venu, et croire qu'ils peuvent indifféremment s'en servir, serait comme si l'on imposait à un pianiste de jouer du violon, par la raison que, sachant la musique, il doit pouvoir jouer de tous les instruments.
Sans cette harmonie qui seule peut amener l'assimilation fluidique, aussi nécessaire dans la typtologie que dans l'écriture, les communications sont ou impossibles, ou incomplètes, ou fausses. A défaut de l'Esprit que l'on ne peut avoir, s'il ne peut se manifester librement, il n'en manque pas d'autres toujours prêts à saisir l'occasion, et qui se soucient fort peu de la vérité de ce qu'ils disent. Cette assimilation fluidique est quelquefois tout à fait impossible entre certains Esprits et certains médiums ; d'autres fois, et c'est le cas le plus ordinaire, elle ne s'établit que graduellement et à la longue, ce qui explique pourquoi les Esprits qui se manifestent d'habitude à un médium le font avec plus de facilité, et pourquoi les premières communications attestent presque toujours une certaine gêne et sont moins explicites.
Il est donc démontré à la fois par la théorie et par l'expérience qu'il n'y a pas plus de médiums universels pour les évocations que pour l'aptitude aux divers genres de manifestations. Celui qui prétendrait recevoir à volonté et à point nominé les communications de tous les Esprits, et pouvoir satisfaire, par conséquent, les légitimes désirs de tous ceux qui veulent s'entretenir avec les êtres qui leur sont chers, ferait preuve, ou d'une ignorance radicale des principes les plus élémentaires de la science, ou de charlatanisme, et, dans tous les cas, d'une présomption incompatible avec les qualités essentielles d'un bon médium. On a pu le croire dans un temps, mais aujourd'hui les progrès de la science théorique et pratique démontrent que cela ne se peut pas en principe. Lorsqu'un Esprit se communique pour la première fois à un médium sans aucune gêne, cela tient à une affinité fluidique exceptionnelle ou antérieure entre l'Esprit et son interprète.
C'est donc un tort d'imposer un médium à l'Esprit que l'on veut évoquer ; il faut lui laisser le choix de son instrument. Mais comment faire, dira-t-on, si l'on n'a qu'un seul médium, ce qui est très fréquent ? D'abord, se contenter de ce que l'on a, et se passer de ce que l'on n'a pas. Il n'est pas plus au pouvoir de la science spirite de changer les conditions normales des manifestations, qu'à la chimie de changer celles de la combinaison des éléments.
Il y a cependant ici un moyen d'atténuer la difficulté. En principe, lorsqu'il s'agit d'une évocation nouvelle, le médium doit toujours préalablement évoquer son guide spirituel, et lui demander si elle est possible ; en cas d'affirmative, demander à l'Esprit évoqué s'il trouve dans le médium l'aptitude nécessaire pour recevoir et transmettre sa pensée. S'il y a difficulté ou impossibilité, le prier de le faire par l'entremise du guide du médium ou de s'en faire assister. Dans ce cas la pensée de l'Esprit n'arrive que de seconde main, c'est-à-dire après avoir traversé deux milieux. On comprend alors combien il importe que le médium soit bien assisté, car s'il l'est par un Esprit obsesseur, ignorant ou orgueilleux, la communication en sera altérée. Ici, les qualités personnelles du médium jouent forcément un rôle important, par la nature des Esprits qu'il attire à lui. Les médiums les plus indignes peuvent avoir de puissantes facultés, mais les plus sûrs sont ceux qui, à cette puissance, joignent les meilleures sympathies dans le monde invisible ; or, ces sympathies ne sont nullement garanties par les noms plus ou moins imposants des Esprits qui signent les communications, mais par la nature constamment bonne des communications qu'ils en reçoivent.
Ces principes sont à la fois fondés sur la logique et sur l'expérience ; les difficultés même qu'ils accusent, prouvent que la pratique du Spiritisme ne doit pas être traitée légèrement.
Un autre fait ressort également de la communication ci-dessus : c'est la confirmation du principe que les Esprits intelligents poursuivent dans la vie spirituelle les travaux et les études qu'ils ont entrepris dans la vie corporelle.
C'est ainsi que, dans les communications que nous publions, nous donnons la préférence à celles d'où peut sortir un enseignement utile.
Quant à la lettre du frère vivant à son frère mort, c'est une naïve et touchante expression de la foi sincère en la survivance de l'âme, en la présence des êtres qui nous sont chers, et de la possibilité de continuer avec eux les rapports d'affection qui nous unissaient à eux.
Les incrédules, sans doute, riront de ce qui, à leurs yeux, est une puérile crédulité. Ils auront beau faire, le néant qu'ils préconisent n'aura jamais de charme pour les masses, car il brise le cœur et les affections les plus saintes ; il glace au lieu de réchauffer ; il épouvante et désespère au lieu de fortifier et consoler.
Leurs diatribes contre le Spiritisme ayant pour pivot cette doctrine navrante du néant, il ne faut pas s'étonner de leur impuissance à détourner les masses des nouvelles idées. Entre une doctrine désespérante et une doctrine consolante, le choix de la majorité ne saurait être douteux.
Après l'épouvantable catastrophe de l'église de San-Yago du Chili en 1864, on trouva dans l'église une boîte aux lettres dans laquelle les fidèles déposaient les missives qu'ils adressaient à la sainte Vierge. Pourrait-on établir une parité entre ce fait qui a défrayé la verve des railleurs, et la lettre ci-dessus ? Assurément non. Cependant le tort n'était pas à ceux qui croyaient à la possibilité de correspondre avec l'autre monde, mais à ceux qui exploitaient cette croyance en proportionnant les réponses au prix d'affranchissement joint à la lettre. Il est peu de superstitions qui n'aient leur point de départ dans une vérité dénaturée par l'ignorance ; le Spiritisme, accusé de les ressusciter, vient au contraire les réduire à leur juste valeur.
Crois-moi, bon frère, évoque-moi en famille ; et toi-même, avec un peu de bonne volonté et quelques essais persévérants, tu pourras causer à ton gré avec moi. Je suis presque toujours près de toi, parce que je sais que tu es Spirite et que j'espère en toi. Il est certain que la sympathie attire la sympathie, et qu'on ne peut être expansif avec un médium qu'on voit pour la première fois ; je vais cependant tâcher de vous satisfaire.
Ma mort qui vous afflige était le terme de la captivité de mon âme ; votre amour, votre sollicitude, votre tendresse avaient rendu doux mon exil sur la terre ; mais, dans mes plus beaux moments d'inspiration musicale, je tournais mes regards vers les régions lumineuses où tout est harmonie, et je m'oubliais à écouter les accords lointains de la mélodie céleste qui m'inondait de ses douces vibrations. Que de fois je me suis oublié dans ces rêveries extatiques, auxquelles je devais le succès de mes études musicales que je continue ici ! Ce serait une étrange erreur de croire que l'aptitude individuelle se perd dans le monde spirite ; elle s'y perfectionne, au contraire, pour apporter en-suite ce perfectionnement sur les planètes où ces Esprits sont appelés à vivre.
Ne pleurez donc plus, vous tous, bien-aimés parents ! A quoi servent les pleurs ? A énerver, à décourager les âmes. Je suis parti le premier, mais vous viendrez me rejoindre ; cette certitude n'est-elle pas assez puissante pour vous consoler ? La rose, qui a exhalé ses parfums au chêne, meurt comme moi après avoir peu vécu, en jonchant le sol de ses pétales flétris ; mais le chêne meurt à son tour, et il a le sort de la rose qu'il a pleuré et dont les vives couleurs s'harmonisaient avec son sombre feuillage.
Encore quelque temps, et vous viendrez à moi ; nous chanterons alors le cantique des cantiques, et nous louerons Dieu dans ses œuvres ; car nous serons heureux ensemble, si vous vous résignez à l'épreuve qui vous frappe.
Celui qui fut ton frère sur la terre et qui t'aime toujours.
B…
Plusieurs enseignements importants ressortent de cette communication. Le premier est la difficulté qu'éprouve l'Esprit à s'exprimer à l'aide de l'instrument qui lui était donné. Nous connaissons personnellement ce médium qui a fait depuis longtemps ses preuves comme puissance et flexibilité de faculté, surtout en fait d'évocations particulières ; c'est ce qu'on peut appeler un médium sûr et bien assisté. D'où vient donc cet empêchement ? C'est que la facilité des communications dépend du degré d'affinité fluidique qui existe entre l'Esprit et le médium. Chaque médium est ainsi plus ou moins apte à recevoir l'impression ou l'impulsion de la pensée de tel ou tel Esprit ; il peut être un bon instrument pour l'un et un mauvais instrument pour l'autre, sans que cela préjuge rien contre ses qualités, cette condition étant plus organique que morale. Les Esprits recherchent donc de préférence les instruments qui vibrent à leur unisson ; leur imposer le premier venu, et croire qu'ils peuvent indifféremment s'en servir, serait comme si l'on imposait à un pianiste de jouer du violon, par la raison que, sachant la musique, il doit pouvoir jouer de tous les instruments.
Sans cette harmonie qui seule peut amener l'assimilation fluidique, aussi nécessaire dans la typtologie que dans l'écriture, les communications sont ou impossibles, ou incomplètes, ou fausses. A défaut de l'Esprit que l'on ne peut avoir, s'il ne peut se manifester librement, il n'en manque pas d'autres toujours prêts à saisir l'occasion, et qui se soucient fort peu de la vérité de ce qu'ils disent. Cette assimilation fluidique est quelquefois tout à fait impossible entre certains Esprits et certains médiums ; d'autres fois, et c'est le cas le plus ordinaire, elle ne s'établit que graduellement et à la longue, ce qui explique pourquoi les Esprits qui se manifestent d'habitude à un médium le font avec plus de facilité, et pourquoi les premières communications attestent presque toujours une certaine gêne et sont moins explicites.
Il est donc démontré à la fois par la théorie et par l'expérience qu'il n'y a pas plus de médiums universels pour les évocations que pour l'aptitude aux divers genres de manifestations. Celui qui prétendrait recevoir à volonté et à point nominé les communications de tous les Esprits, et pouvoir satisfaire, par conséquent, les légitimes désirs de tous ceux qui veulent s'entretenir avec les êtres qui leur sont chers, ferait preuve, ou d'une ignorance radicale des principes les plus élémentaires de la science, ou de charlatanisme, et, dans tous les cas, d'une présomption incompatible avec les qualités essentielles d'un bon médium. On a pu le croire dans un temps, mais aujourd'hui les progrès de la science théorique et pratique démontrent que cela ne se peut pas en principe. Lorsqu'un Esprit se communique pour la première fois à un médium sans aucune gêne, cela tient à une affinité fluidique exceptionnelle ou antérieure entre l'Esprit et son interprète.
C'est donc un tort d'imposer un médium à l'Esprit que l'on veut évoquer ; il faut lui laisser le choix de son instrument. Mais comment faire, dira-t-on, si l'on n'a qu'un seul médium, ce qui est très fréquent ? D'abord, se contenter de ce que l'on a, et se passer de ce que l'on n'a pas. Il n'est pas plus au pouvoir de la science spirite de changer les conditions normales des manifestations, qu'à la chimie de changer celles de la combinaison des éléments.
Il y a cependant ici un moyen d'atténuer la difficulté. En principe, lorsqu'il s'agit d'une évocation nouvelle, le médium doit toujours préalablement évoquer son guide spirituel, et lui demander si elle est possible ; en cas d'affirmative, demander à l'Esprit évoqué s'il trouve dans le médium l'aptitude nécessaire pour recevoir et transmettre sa pensée. S'il y a difficulté ou impossibilité, le prier de le faire par l'entremise du guide du médium ou de s'en faire assister. Dans ce cas la pensée de l'Esprit n'arrive que de seconde main, c'est-à-dire après avoir traversé deux milieux. On comprend alors combien il importe que le médium soit bien assisté, car s'il l'est par un Esprit obsesseur, ignorant ou orgueilleux, la communication en sera altérée. Ici, les qualités personnelles du médium jouent forcément un rôle important, par la nature des Esprits qu'il attire à lui. Les médiums les plus indignes peuvent avoir de puissantes facultés, mais les plus sûrs sont ceux qui, à cette puissance, joignent les meilleures sympathies dans le monde invisible ; or, ces sympathies ne sont nullement garanties par les noms plus ou moins imposants des Esprits qui signent les communications, mais par la nature constamment bonne des communications qu'ils en reçoivent.
Ces principes sont à la fois fondés sur la logique et sur l'expérience ; les difficultés même qu'ils accusent, prouvent que la pratique du Spiritisme ne doit pas être traitée légèrement.
Un autre fait ressort également de la communication ci-dessus : c'est la confirmation du principe que les Esprits intelligents poursuivent dans la vie spirituelle les travaux et les études qu'ils ont entrepris dans la vie corporelle.
C'est ainsi que, dans les communications que nous publions, nous donnons la préférence à celles d'où peut sortir un enseignement utile.
Quant à la lettre du frère vivant à son frère mort, c'est une naïve et touchante expression de la foi sincère en la survivance de l'âme, en la présence des êtres qui nous sont chers, et de la possibilité de continuer avec eux les rapports d'affection qui nous unissaient à eux.
Les incrédules, sans doute, riront de ce qui, à leurs yeux, est une puérile crédulité. Ils auront beau faire, le néant qu'ils préconisent n'aura jamais de charme pour les masses, car il brise le cœur et les affections les plus saintes ; il glace au lieu de réchauffer ; il épouvante et désespère au lieu de fortifier et consoler.
Leurs diatribes contre le Spiritisme ayant pour pivot cette doctrine navrante du néant, il ne faut pas s'étonner de leur impuissance à détourner les masses des nouvelles idées. Entre une doctrine désespérante et une doctrine consolante, le choix de la majorité ne saurait être douteux.
Après l'épouvantable catastrophe de l'église de San-Yago du Chili en 1864, on trouva dans l'église une boîte aux lettres dans laquelle les fidèles déposaient les missives qu'ils adressaient à la sainte Vierge. Pourrait-on établir une parité entre ce fait qui a défrayé la verve des railleurs, et la lettre ci-dessus ? Assurément non. Cependant le tort n'était pas à ceux qui croyaient à la possibilité de correspondre avec l'autre monde, mais à ceux qui exploitaient cette croyance en proportionnant les réponses au prix d'affranchissement joint à la lettre. Il est peu de superstitions qui n'aient leur point de départ dans une vérité dénaturée par l'ignorance ; le Spiritisme, accusé de les ressusciter, vient au contraire les réduire à leur juste valeur.
Puissance curative du magnétisme spirituel
Esprit du docteur Demeure
Dans notre article du mois précédent sur le docteur Demeure, nous avons rendu un juste hommage à ses éminentes qualités comme homme et comme Esprit. Le fait suivant est une nouvelle preuve de sa bienveillance, en même temps qu'il constate la puissance curative de la magnétisation spirituelle.
On nous écrit de Montauban :
L'Esprit du bon père Demeure, en venant grossir le nombre de nos amis les invisibles qui nous soignent au moral et au physique, a voulu se manifester dès les premiers jours par un bienfait. La nouvelle de sa mort n'était pas encore connue de nos frères de Montauban, qu'il entreprenait spontanément et directement la guérison de l'un d'eux au moyen du magnétisme spirituel par l'action fluidique seule. Vous voyez qu'il ne perdait pas de temps, et continuait comme Esprit, ainsi que vous le dites, son œuvre de soulagement de l'humanité souffrante. Il y a cependant ici une importante distinction à faire. Certains Esprits continuent à vaquer à leurs occupations terrestres sans avoir la conscience de leur état, se croyant toujours vivants ; c'est le propre des Esprits peu avancés, tandis que M. Demeure s'est reconnu immédiatement, et agit volontairement comme Esprit avec la conscience d'avoir en cet état une plus grande puissance.
Nous avions caché à madame G…, médium voyant et somnambule très lucide, la mort de M. Demeure pour ménager son extrême sensibilité, et le bon docteur, entrant sans doute dans nos vues, avait évité de se manifester à elle. Le 10 février dernier, nous étions réunis sur l'invitation de nos guides qui, disaient-ils, voulaient soulager madame G… d'une entorse dont elle souffrait cruellement depuis la veille. Nous n'en savions pas davantage, et nous étions loin de nous attendre à la surprise qu'ils nous ménageaient. A peine cette dame fut-elle en somnambulisme, qu'elle fit entendre des cris déchirants en montrant son pied. Voici ce qui se passait :
Madame G… voyait un Esprit courbé sur sa jambe, et dont les traits lui restaient cachés ; il opérait des frictions et des massages, en exerçant de temps à autre sur la partie malade une traction longitudinale, absolument comme aurait pu le faire un médecin. L'opération était si douloureuse que la patiente se laissait aller parfois à des vociférations et à des mouvements désordonnés. Mais la crise ne fut pas de longue durée ; au bout de dix minutes toute trace d'entorse avait disparu, plus d'enflure, le pied avait repris son apparence normale ; madame G… était guérie.
Quand on songe que pour guérir complètement une affection de ce genre, les magnétiseurs les mieux doués et les plus exercés, sans parler de la médecine officielle qui n'en finit pas, ont besoin d'un traitement dont la durée n'est jamais moindre de trente-six heures, en y consacrant trois séances par jour d'une heure chacune, cette guérison en dix minutes, par le fluide spirituel, peut bien être considérée comme instantanée, avec d'autant plus de raison, ainsi que le dit l'Esprit lui-même dans une communication que vous trouverez ci-après, que c'était de sa part une première expérience faite en vue d'une application ultérieure en cas de réussite.
Cependant l'Esprit restait toujours inconnu du médium, et persistait à ne pas montrer ses traits ; il avait même l'air de vouloir s'enfuir, lorsque d'un bond notre malade, qui, quelques minutes auparavant, ne pouvait faire un pas, s'élance au milieu de la chambre pour saisir et presser la main de son docteur spirituel. Cette fois encore l'Esprit avait détourné la tête tout en laissant sa main dans la sienne. A ce moment madame G… jette un cri, et tombe évanouie sur le parquet ; elle venait de reconnaître M. Demeure dans l'Esprit guérisseur. Pendant la syncope, elle recevait les soins empressés de plusieurs Esprits sympathiques. Enfin la lucidité somnambulique ayant reparu, elle causa avec les Esprits, échangeant avec eux de chaudes poignées de main, notamment avec l'Esprit du docteur qui répondait à ses témoignages d'affection en la pénétrant d'un fluide réparateur.
Cette scène n'est-elle pas saisissante et dramatique, et ne croirait-on pas voir tous ces personnages jouer leur rôle dans la vie humaine ? N'est-ce pas une preuve entre mille que les Esprits sont des êtres bien réels, ayant un corps et agissant comme ils le faisaient sur la terre ? Nous étions heureux de retrouver notre ami spiritualisé, avec son excellent cœur et sa délicate sollicitude. Il avait été, pendant sa vie, le médecin du médium ; il connaissait son extrême sensibilité, et l'avait ménagé comme son propre enfant. Cette preuve d'identité donnée à ceux que l'Esprit aimait, n'est-elle pas frappante et n'est-elle pas bien faite pour faire envisager la vie future sous son aspect le plus consolant ?
Voici la communication que nous avons reçue de M. Demeure, le lendemain de cette séance :
« Mes bons amis, je suis auprès de vous, et vous aime toujours comme par le passé. Quel bonheur de pouvoir me communiquer à ceux qui me sont chers ! Comme j'ai été heureux, hier soir, de pouvoir me rendre utile et de soulager notre cher médium voyant ! C'est une expérience qui me servira et que je mettrai en pratique à l'avenir toutes les fois qu'une occasion favorable se présentera. Aujourd'hui, son fils est bien malade, mais j'espère que nous le guérirons bientôt ; tout cela lui donnera du courage pour persévérer dans l'étude du développement de sa faculté. (L'enfant de madame G… fut en effet guéri d'une angine couenneuse, au moyen d'un traitement homéopathique ordonné par l'Esprit.)
Nous pourrons, d'ici à quelque temps, vous fournir l'occasion d'être témoins de phénomènes que vous ne connaissez pas encore, et qui seront d'une grande utilité pour la science spirite. Je serai heureux de pouvoir contribuer moi-même à ces manifestations qui m'auraient fait tant de plaisir à voir de mon vivant ; mais, grâce à Dieu, aujourd'hui j'y assiste d'une manière toute particulière, et qui me prouve évidemment la vérité de ce qui se passe chez vous. Croyez, mes bons amis, que je me fais toujours un vrai plaisir de me rendre utile à mes semblables, et de les aider à propager ces belles vérités qui doivent changer le monde en le ramenant à des sentiments meilleurs. Adieu, mes amis ; au revoir.
Antoine Demeure. »
N'est-il pas curieux de voir un Esprit, déjà savant sur la terre, faire comme Esprit des études et des expériences pour acquérir plus d'habileté dans le soulagement de ses semblables ? Il y a dans cet aveu une louable modestie qui décèle le vrai mérite, tandis que les Esprits faux savants sont généralement présomptueux.
Le dernier numéro de la Revue cite une communication de M. Demeure, comme ayant été donnée à Montauban le 1er février. C'est le 26 janvier qu'il l'a dictée ; cette date est, à mon avis, d'une certaine importance, parce que c'est celle du lendemain de sa mort. Dans le deuxième paragraphe, il dit : « Je jouis d'une lucidité rare chez les Esprits dégagés de la matière depuis si peu de temps. » Cette lucidité prouve en effet une rapidité de dégagement qui n'est le propre que des Esprits très avancés moralement.
Remarque. – La guérison rapportée ci-dessus est un exemple de l'action du magnétisme spirituel pur, sans aucun mélange de magnétisme humain. Parfois les Esprits se servent de médiums spéciaux comme conducteurs de leur fluide ; ce sont là les médiums guérisseurs proprement dits, dont la faculté présente des degrés très divers d'énergie, selon leur aptitude personnelle et la nature des Esprits dont ils sont assistés. Nous connaissons à Paris une personne atteinte depuis huit mois d'exostoses à la hanche et au genou, qui lui causent de grandes souffrances et l'obligent à garder le lit. Un jeune homme de ses amis, doué de cette précieuse faculté, lui donna des soins par la seule imposition des mains pendant quelques minutes sur la tête, et la prière à laquelle le malade s'associait avec une ferveur édifiante. Ce dernier éprouvait à ce moment une crise très douloureuse analogue à celle qu'a ressentie madame G…, bientôt suivie d'un calme parfait. Il sentait alors l'impression énergique de plusieurs mains qui massaient et étiraient la jambe que l'on voyait s'allonger de 10 à 12 centimètres. Il y a déjà chez lui une amélioration très sensible, car il commence à marcher ; mais l'ancienneté et la gravité du mal rendent la cure nécessairement plus difficile et plus longue que celle d'une simple entorse.
Nous ferons observer que la médiumnité guérissante ne s'est point encore présentée, à notre connaissance, avec des caractères de généralité et d'universalité, mais au contraire restreinte comme application, c'est-à-dire que le médium a une action plus puissante sur certains individus que sur d'autres, et ne guérit pas toutes les maladies. On comprend qu'il en doit être ainsi lorsque l'on connaît le rôle capital que jouent les affinités fluidiques dans tous les phénomènes de médianimité. Quelques personnes même n'en jouissent qu'accidentellement et pour un cas déterminé. Ce serait donc une erreur de croire que, parce qu'on a obtenu une guérison, même difficile, on peut les obtenir toutes, par la raison que le fluide propre de certains malades est réfractaire au fluide du médium ; la guérison est d'autant plus facile que l'assimilation des fluides s'opère naturellement. Aussi est-on surpris de voir quelquefois des personnes frêles et délicates exercer une action puissante sur des individus forts et robustes. C'est qu'alors ces personnes sont de bons conducteurs du fluide spirituel, tandis que des hommes vigoureux peuvent être de très mauvais conducteurs. Ils n'ont que leur fluide personnel, fluide humain qui n'a jamais la pureté et la puissance réparatrice du fluide épuré des bons Esprits.
On comprend, d'après cela, les causes majeures qui s'opposent à ce que la médiumnité guérissante devienne une profession. Pour s'en faire un état, il faudrait être doué d'une faculté universelle ; or, des Esprits incarnés de l'ordre le plus élevé pourraient seuls la posséder à ce
degré. Avoir cette présomption, en l'exerçant même avec désintéressement et par pure philanthropie, serait une preuve d'orgueil qui, à elle seule, serait un signe d'infériorité morale. La véritable supériorité est modeste ; elle fait le bien sans ostentation, et s'efface au lieu de chercher l'éclat ; la renommée va la chercher et la découvre, tandis que le présomptueux court après la renommée qui lui échappe souvent. Jésus disait à ceux qu'il avait guéris : « Allez, rendez grâce à Dieu, et n'en parlez à personne. » C'est une grande leçon pour les médiums guérisseurs.
Nous rappellerons ici que la médiumnité guérissante est exclusivement dans l'action fluidique plus ou moins instantanée ; qu'il ne faut la confondre ni avec le magnétisme humain, ni avec la faculté qu'ont certains médiums de recevoir des Esprits l'indication de remèdes ; ces derniers sont simplement des médiums médicaux, comme d'autres sont médiums poètes ou dessinateurs.
Dans notre article du mois précédent sur le docteur Demeure, nous avons rendu un juste hommage à ses éminentes qualités comme homme et comme Esprit. Le fait suivant est une nouvelle preuve de sa bienveillance, en même temps qu'il constate la puissance curative de la magnétisation spirituelle.
On nous écrit de Montauban :
L'Esprit du bon père Demeure, en venant grossir le nombre de nos amis les invisibles qui nous soignent au moral et au physique, a voulu se manifester dès les premiers jours par un bienfait. La nouvelle de sa mort n'était pas encore connue de nos frères de Montauban, qu'il entreprenait spontanément et directement la guérison de l'un d'eux au moyen du magnétisme spirituel par l'action fluidique seule. Vous voyez qu'il ne perdait pas de temps, et continuait comme Esprit, ainsi que vous le dites, son œuvre de soulagement de l'humanité souffrante. Il y a cependant ici une importante distinction à faire. Certains Esprits continuent à vaquer à leurs occupations terrestres sans avoir la conscience de leur état, se croyant toujours vivants ; c'est le propre des Esprits peu avancés, tandis que M. Demeure s'est reconnu immédiatement, et agit volontairement comme Esprit avec la conscience d'avoir en cet état une plus grande puissance.
Nous avions caché à madame G…, médium voyant et somnambule très lucide, la mort de M. Demeure pour ménager son extrême sensibilité, et le bon docteur, entrant sans doute dans nos vues, avait évité de se manifester à elle. Le 10 février dernier, nous étions réunis sur l'invitation de nos guides qui, disaient-ils, voulaient soulager madame G… d'une entorse dont elle souffrait cruellement depuis la veille. Nous n'en savions pas davantage, et nous étions loin de nous attendre à la surprise qu'ils nous ménageaient. A peine cette dame fut-elle en somnambulisme, qu'elle fit entendre des cris déchirants en montrant son pied. Voici ce qui se passait :
Madame G… voyait un Esprit courbé sur sa jambe, et dont les traits lui restaient cachés ; il opérait des frictions et des massages, en exerçant de temps à autre sur la partie malade une traction longitudinale, absolument comme aurait pu le faire un médecin. L'opération était si douloureuse que la patiente se laissait aller parfois à des vociférations et à des mouvements désordonnés. Mais la crise ne fut pas de longue durée ; au bout de dix minutes toute trace d'entorse avait disparu, plus d'enflure, le pied avait repris son apparence normale ; madame G… était guérie.
Quand on songe que pour guérir complètement une affection de ce genre, les magnétiseurs les mieux doués et les plus exercés, sans parler de la médecine officielle qui n'en finit pas, ont besoin d'un traitement dont la durée n'est jamais moindre de trente-six heures, en y consacrant trois séances par jour d'une heure chacune, cette guérison en dix minutes, par le fluide spirituel, peut bien être considérée comme instantanée, avec d'autant plus de raison, ainsi que le dit l'Esprit lui-même dans une communication que vous trouverez ci-après, que c'était de sa part une première expérience faite en vue d'une application ultérieure en cas de réussite.
Cependant l'Esprit restait toujours inconnu du médium, et persistait à ne pas montrer ses traits ; il avait même l'air de vouloir s'enfuir, lorsque d'un bond notre malade, qui, quelques minutes auparavant, ne pouvait faire un pas, s'élance au milieu de la chambre pour saisir et presser la main de son docteur spirituel. Cette fois encore l'Esprit avait détourné la tête tout en laissant sa main dans la sienne. A ce moment madame G… jette un cri, et tombe évanouie sur le parquet ; elle venait de reconnaître M. Demeure dans l'Esprit guérisseur. Pendant la syncope, elle recevait les soins empressés de plusieurs Esprits sympathiques. Enfin la lucidité somnambulique ayant reparu, elle causa avec les Esprits, échangeant avec eux de chaudes poignées de main, notamment avec l'Esprit du docteur qui répondait à ses témoignages d'affection en la pénétrant d'un fluide réparateur.
Cette scène n'est-elle pas saisissante et dramatique, et ne croirait-on pas voir tous ces personnages jouer leur rôle dans la vie humaine ? N'est-ce pas une preuve entre mille que les Esprits sont des êtres bien réels, ayant un corps et agissant comme ils le faisaient sur la terre ? Nous étions heureux de retrouver notre ami spiritualisé, avec son excellent cœur et sa délicate sollicitude. Il avait été, pendant sa vie, le médecin du médium ; il connaissait son extrême sensibilité, et l'avait ménagé comme son propre enfant. Cette preuve d'identité donnée à ceux que l'Esprit aimait, n'est-elle pas frappante et n'est-elle pas bien faite pour faire envisager la vie future sous son aspect le plus consolant ?
Voici la communication que nous avons reçue de M. Demeure, le lendemain de cette séance :
« Mes bons amis, je suis auprès de vous, et vous aime toujours comme par le passé. Quel bonheur de pouvoir me communiquer à ceux qui me sont chers ! Comme j'ai été heureux, hier soir, de pouvoir me rendre utile et de soulager notre cher médium voyant ! C'est une expérience qui me servira et que je mettrai en pratique à l'avenir toutes les fois qu'une occasion favorable se présentera. Aujourd'hui, son fils est bien malade, mais j'espère que nous le guérirons bientôt ; tout cela lui donnera du courage pour persévérer dans l'étude du développement de sa faculté. (L'enfant de madame G… fut en effet guéri d'une angine couenneuse, au moyen d'un traitement homéopathique ordonné par l'Esprit.)
Nous pourrons, d'ici à quelque temps, vous fournir l'occasion d'être témoins de phénomènes que vous ne connaissez pas encore, et qui seront d'une grande utilité pour la science spirite. Je serai heureux de pouvoir contribuer moi-même à ces manifestations qui m'auraient fait tant de plaisir à voir de mon vivant ; mais, grâce à Dieu, aujourd'hui j'y assiste d'une manière toute particulière, et qui me prouve évidemment la vérité de ce qui se passe chez vous. Croyez, mes bons amis, que je me fais toujours un vrai plaisir de me rendre utile à mes semblables, et de les aider à propager ces belles vérités qui doivent changer le monde en le ramenant à des sentiments meilleurs. Adieu, mes amis ; au revoir.
Antoine Demeure. »
N'est-il pas curieux de voir un Esprit, déjà savant sur la terre, faire comme Esprit des études et des expériences pour acquérir plus d'habileté dans le soulagement de ses semblables ? Il y a dans cet aveu une louable modestie qui décèle le vrai mérite, tandis que les Esprits faux savants sont généralement présomptueux.
Le dernier numéro de la Revue cite une communication de M. Demeure, comme ayant été donnée à Montauban le 1er février. C'est le 26 janvier qu'il l'a dictée ; cette date est, à mon avis, d'une certaine importance, parce que c'est celle du lendemain de sa mort. Dans le deuxième paragraphe, il dit : « Je jouis d'une lucidité rare chez les Esprits dégagés de la matière depuis si peu de temps. » Cette lucidité prouve en effet une rapidité de dégagement qui n'est le propre que des Esprits très avancés moralement.
Remarque. – La guérison rapportée ci-dessus est un exemple de l'action du magnétisme spirituel pur, sans aucun mélange de magnétisme humain. Parfois les Esprits se servent de médiums spéciaux comme conducteurs de leur fluide ; ce sont là les médiums guérisseurs proprement dits, dont la faculté présente des degrés très divers d'énergie, selon leur aptitude personnelle et la nature des Esprits dont ils sont assistés. Nous connaissons à Paris une personne atteinte depuis huit mois d'exostoses à la hanche et au genou, qui lui causent de grandes souffrances et l'obligent à garder le lit. Un jeune homme de ses amis, doué de cette précieuse faculté, lui donna des soins par la seule imposition des mains pendant quelques minutes sur la tête, et la prière à laquelle le malade s'associait avec une ferveur édifiante. Ce dernier éprouvait à ce moment une crise très douloureuse analogue à celle qu'a ressentie madame G…, bientôt suivie d'un calme parfait. Il sentait alors l'impression énergique de plusieurs mains qui massaient et étiraient la jambe que l'on voyait s'allonger de 10 à 12 centimètres. Il y a déjà chez lui une amélioration très sensible, car il commence à marcher ; mais l'ancienneté et la gravité du mal rendent la cure nécessairement plus difficile et plus longue que celle d'une simple entorse.
Nous ferons observer que la médiumnité guérissante ne s'est point encore présentée, à notre connaissance, avec des caractères de généralité et d'universalité, mais au contraire restreinte comme application, c'est-à-dire que le médium a une action plus puissante sur certains individus que sur d'autres, et ne guérit pas toutes les maladies. On comprend qu'il en doit être ainsi lorsque l'on connaît le rôle capital que jouent les affinités fluidiques dans tous les phénomènes de médianimité. Quelques personnes même n'en jouissent qu'accidentellement et pour un cas déterminé. Ce serait donc une erreur de croire que, parce qu'on a obtenu une guérison, même difficile, on peut les obtenir toutes, par la raison que le fluide propre de certains malades est réfractaire au fluide du médium ; la guérison est d'autant plus facile que l'assimilation des fluides s'opère naturellement. Aussi est-on surpris de voir quelquefois des personnes frêles et délicates exercer une action puissante sur des individus forts et robustes. C'est qu'alors ces personnes sont de bons conducteurs du fluide spirituel, tandis que des hommes vigoureux peuvent être de très mauvais conducteurs. Ils n'ont que leur fluide personnel, fluide humain qui n'a jamais la pureté et la puissance réparatrice du fluide épuré des bons Esprits.
On comprend, d'après cela, les causes majeures qui s'opposent à ce que la médiumnité guérissante devienne une profession. Pour s'en faire un état, il faudrait être doué d'une faculté universelle ; or, des Esprits incarnés de l'ordre le plus élevé pourraient seuls la posséder à ce
degré. Avoir cette présomption, en l'exerçant même avec désintéressement et par pure philanthropie, serait une preuve d'orgueil qui, à elle seule, serait un signe d'infériorité morale. La véritable supériorité est modeste ; elle fait le bien sans ostentation, et s'efface au lieu de chercher l'éclat ; la renommée va la chercher et la découvre, tandis que le présomptueux court après la renommée qui lui échappe souvent. Jésus disait à ceux qu'il avait guéris : « Allez, rendez grâce à Dieu, et n'en parlez à personne. » C'est une grande leçon pour les médiums guérisseurs.
Nous rappellerons ici que la médiumnité guérissante est exclusivement dans l'action fluidique plus ou moins instantanée ; qu'il ne faut la confondre ni avec le magnétisme humain, ni avec la faculté qu'ont certains médiums de recevoir des Esprits l'indication de remèdes ; ces derniers sont simplement des médiums médicaux, comme d'autres sont médiums poètes ou dessinateurs.
Entretiens familiers d'outre-tombe
Pierre Legay dit Grand-Pierrot
Suite - Voir la Revue de novembre 1864
Pierre Legay, parent de madame Delanne, nous a offert le singulier spectacle d'un Esprit qui, deux ans après sa mort, se croyait encore vivant, vaquait à ses affaires, voyageait en voiture, payait sa place en chemin de fer, visitait Paris pour la première fois, etc. Nous donnons aujourd'hui la conclusion de cet état, qu'il serait difficile de comprendre, si l'on ne se reportait aux détails donnés dans la Revue de novembre 1864, page 339.
M. et Mme Delanne avaient inutilement cherché à tirer leur parent de son erreur ; leur guide spirituel leur avait dit d'attendre, le moment n'étant pas encore venu.
Dans les premiers jours du mois de mars dernier, ils adressèrent la question suivante à leur guide :
Depuis la dernière visite de Pierre Legay, mentionnée dans la Revue Spirite, nous n'avons pu obtenir de lui aucune réponse. Vous nous avez dit à ce sujet que, lorsque le moment serait venu, il nous donnerait lui-même ses impressions. Pensez-vous qu'il le puisse maintenant ? – R. Oui, mes enfants ; l'heure est arrivée. Il pourra vous répondre et il vous fournira divers sujets d'études et d'enseignements. Dieu a ses vues.
D. (A Pierre Legay). Cher ami, êtes-vous là ? – R. Oui, mon ami.
D. Voyez-vous mon but en vous évoquant aujourd'hui ? – R. Oui, car j'ai près de moi des amis qui m'ont instruit sur tout ce qui se passe d'étonnant en ce moment sur la terre. Mon Dieu quelle chose étrange que tout cela !
D. Vous dites que vous avez des amis qui vous entourent et qui vous instruisent ; pouvez-vous nous dire qui ils sont ? – R. Oui, ce sont des amis, mais je ne les connais que depuis que je suis réveillé ; car savez-vous que j'ai dormi ? J'appelle dormir ce que vous appelez mourir.
D. Pouvez-vous nous dire le nom de quelques-uns de ces amis ? – R. J'ai constamment à mes côtés un homme, que je devrais plutôt nommer un ange, car il est si doux, si bon, si beau que je crois que les anges doivent être tous comme ça là. Et puis il y a Didelot (le père de madame Delanne) qui est là aussi ; puis vos parents, mon ami. Oh ! comme ils sont bons ! Il y a aussi : ah ! c'est drôle, comme on se retrouve, notre sœur supérieure. Par exemple, elle est toujours la même ; elle n'a point changé. Mais que c'est donc curieux que tout cela !
Nota. La sœur que l'Esprit désigne habitait la commune de Treveray et avait donné les premières instructions à madame Delanne. Elle ne s'était manifestée qu'une seule fois, trois ans auparavant.
Tiens ! vous aussi, jardinier ! (nom familier donné à un oncle de madame Delanne, et qui ne s'était jamais manifesté). Mais, que je suis bête ! C'est chez votre nièce que nous sommes. Eh bien, je suis content de vous voir ; ça me met à mon aise ; car, ma parole d'honneur, je suis transporté je ne sais où depuis quelque temps ; je vais plus vite que le chemin de fer, et je parcours l'espace sans pouvoir me rendre compte comment. Etes-vous comme moi, Didelot ? Il a l'air de trouver cela tout naturel ; il paraît qu'il y est déjà habitué. Du reste, il y a plus longtemps que moi qu'il le fait (il est mort depuis six ans), et je comprends qu'il en soit moins étonné. Mais que c'est donc drôle ! ah ! c'est bien drôle ! Dites-moi, vous savez, avec vous, mon cousin, je suis à mon aise. Eh bien, franchement, dites-moi donc, qu'appelle-t-on mourir ?
M. Delanne : On appelle mourir, mon ami, laisser son corps grossier à la terre pour donner à l'âme le dégagement dont elle a besoin pour rentrer dans la vie réelle, la grande vie de l'Esprit. Oui, vous y êtes, cher ami, dans ce monde encore inconnu pour beaucoup d'hommes de la terre. Vous voilà sorti de la léthargie ou engourdissement qui suit la séparation du corps et de l'âme. Vous voyez votre ange gardien, des amis qui vous entourent ; ce sont eux qui vous ont amené parmi nous, pour vous prouver l'immortalité et l'individualité de votre âme. Soyez-en fier et heureux, car, vous le voyez maintenant, la mort c'est la vie. Voilà pourquoi aussi vous traversez l'espace avec la rapidité de l'éclair, et que vous pouvez causer avec nous à Paris, comme si vous aviez un corps matériel comme le nôtre. Ce corps, vous ne l'avez plus ; vous n'avez maintenant qu'une enveloppe fluidique et légère qui ne vous retient plus à la terre.
P. Legay : Singulière expression : mourir ! Mais donnez donc un autre nom au moment où l'âme laisse son corps à la terre, car cet instant n'est pas celui de la mort… Je me souviens… J'étais à peine débarrassé des liens qui me retenaient à mon corps, que mes souffrances, au lieu de diminuer, ne firent qu'accroître. Je voyais mes enfants qui se disputaient pour avoir chacun la part de ce qui leur revenait. Je les voyais ne pas prendre soin des terres que je leur laissais, et alors je m'étais mis à travailler avec encore plus de force que jamais. J'étais là, regrettant de voir qu'on ne me comprenait pas ; donc je n'étais pas mort. Je vous assure que j'éprouvais les mêmes craintes et les mêmes fatigues qu'avec mon corps, et pourtant je ne l'avais plus. Expliquez-moi cela ; si c'est comme ça qu'on meurt, c'est une drôle de manière de mourir. Dites-moi votre idée là-dessus, et puis après je vous dirai la mienne, car maintenant, ces bons amis-là ont la bonté de me le dire. Allons, mon cousin, dites-moi votre idée.
M. Delanne : Mon ami, lorsque les Esprits quittent leur corps, ils sont enveloppés d'un deuxième corps, comme je vous l'ai dit ; celui-ci est fluidique ; ils ne le quittent jamais. Eh bien, c'est avec ce corps que vous croyiez travailler, comme du vivant de l'autre. Vous pouvez épurer ce corps à moitié matériel par votre avancement moral ; et si le mot mort ne vous convient pas pour préciser ce moment, appelez-le transformation si vous voulez. Si vous avez eu à souffrir des choses qui vous ont été pénibles, c'est que vous-même, de votre vivant, vous vous êtes peut-être un peu trop attaché aux choses matérielles, en négligeant les choses spirituelles qui intéressaient votre avenir. (Il était très intéressé.) C'est un petit châtiment que Dieu vous a imposé pour racheter vos fautes en vous donnant le moyen de vous instruire et d'ouvrir vos yeux à la lumière.
P. Legay : Eh bien ! mon cher, ce n'est pas à ce moment qu'il faut donner le nom de transformation, car l'Esprit ne se transforme pas si vite s'il n'est aidé immédiatement à se reconnaître par la prière, et si on ne l'éclaire pas sur sa véritable position, soit, comme je viens de le dire, en priant pour lui, soit en l'évoquant. C'est pourquoi il y a tant d'Esprits, comme le mien, qui restent stationnaires. Il y a pour l'Esprit de la catégorie du mien transition, mais non transformation ; il ne sait pas se rendre compte de ce qui lui arrive. J'ai traîné, ou plutôt j'ai cru traîner mon corps avec la même peine et les mêmes maux que sur la terre. Lorsque j'ai été détaché de mon corps, savez-vous ce que j'ai éprouvé ? Eh bien ! ce que l'on éprouve après une chute qui vous étourdit un moment, ou plutôt après une faiblesse, et que l'on vous fait revenir avec du vinaigre. Je me suis réveillé sans m'apercevoir que mon corps m'avait quitté. Je suis venu ici à Paris, où je suis, pensant bien y être en chair et en os, et vous n'auriez pas pu me convaincre du contraire si depuis je n'étais pas mort.
Oui, on meurt, mais ce n'est pas au moment où l'on quitte son corps ; c'est au moment où l'Esprit s'apercevant de sa véritable position, il lui prend un vertige, ne sait plus comprendre ce qu'on lui dit, ne voit plus les choses qu'on lui explique de la même manière ; alors il se trouble ; voyant qu'il n'est plus compris, il cherche, et, comme l'aveugle qui est frappé subitement, il demande un conducteur qui ne vient pas de suite, non dà ; il faut qu'il reste quelque temps dans les ténèbres où tout est confus pour lui ; il est troublé, et il faut que le désir le pousse avec ardeur à demander la lumière, qui ne lui est accordée qu'après que l'agonie est terminée et que l'heure de la délivrance est arrivée. Eh bien, mon cousin, c'est quand l'Esprit se trouve dans ce moment que c'est le moment de la mort, car on ne sait plus se reconnaître. Il faut, je le répète, qu'on soit aidé par la prière pour sortir de cet état, et c'est aussi lorsque l'heure de la délivrance est arrivée qu'il faut employer le mot transformation pour les Esprits de mon ordre.
Oh ! merci de vos bonnes prières, merci, mon ami ; vous savez combien je vous aimais, je vous aimerai bien davantage encore maintenant. Continuez-moi vos bonnes prières pour mon avancement. Merci à l'homme qui a su mettre au jour ces grandes vérités saintes dont tant d'autres avant lui avaient dédaigné de s'occuper. Oui, merci d'avoir associé mon nom à tant d'autres. On a prié pour moi en lisant les quelques lignes que j'étais venu vous donner. Merci donc aussi à tous ceux qui ont prié pour moi, et aujourd'hui, grâce à la prière, je suis arrivé à en comprendre la portée. A mon tour, je tâcherai de vous être utile à tous.
Voilà ce que j'avais à vous dire, et soyez tranquilles ; aujourd'hui, je n'ai plus d'argent à regretter, mais au contraire j'ai tout mon temps à vous donner.
N'est-ce pas que ce changement doit vous étonner beaucoup ? Eh bien, désormais, comme à présent, ça sera comme ça, car je vois bien clair maintenant, là, et de très loin.
P. Legay.
Remarque. – Le nouvel état où se trouve Pierre Legay en cessant de se croire de ce monde, peut être considéré comme un second réveil de l'Esprit. Cette situation se rattache à la grande question de la mort spirituelle qui est à l'étude en ce moment. Nous remercions les Spirites qui, sur notre récit, ont prié pour cet Esprit. Ils peuvent voir qu'il s'en est aperçu et s'en est bien trouvé.
Suite - Voir la Revue de novembre 1864
Pierre Legay, parent de madame Delanne, nous a offert le singulier spectacle d'un Esprit qui, deux ans après sa mort, se croyait encore vivant, vaquait à ses affaires, voyageait en voiture, payait sa place en chemin de fer, visitait Paris pour la première fois, etc. Nous donnons aujourd'hui la conclusion de cet état, qu'il serait difficile de comprendre, si l'on ne se reportait aux détails donnés dans la Revue de novembre 1864, page 339.
M. et Mme Delanne avaient inutilement cherché à tirer leur parent de son erreur ; leur guide spirituel leur avait dit d'attendre, le moment n'étant pas encore venu.
Dans les premiers jours du mois de mars dernier, ils adressèrent la question suivante à leur guide :
Depuis la dernière visite de Pierre Legay, mentionnée dans la Revue Spirite, nous n'avons pu obtenir de lui aucune réponse. Vous nous avez dit à ce sujet que, lorsque le moment serait venu, il nous donnerait lui-même ses impressions. Pensez-vous qu'il le puisse maintenant ? – R. Oui, mes enfants ; l'heure est arrivée. Il pourra vous répondre et il vous fournira divers sujets d'études et d'enseignements. Dieu a ses vues.
D. (A Pierre Legay). Cher ami, êtes-vous là ? – R. Oui, mon ami.
D. Voyez-vous mon but en vous évoquant aujourd'hui ? – R. Oui, car j'ai près de moi des amis qui m'ont instruit sur tout ce qui se passe d'étonnant en ce moment sur la terre. Mon Dieu quelle chose étrange que tout cela !
D. Vous dites que vous avez des amis qui vous entourent et qui vous instruisent ; pouvez-vous nous dire qui ils sont ? – R. Oui, ce sont des amis, mais je ne les connais que depuis que je suis réveillé ; car savez-vous que j'ai dormi ? J'appelle dormir ce que vous appelez mourir.
D. Pouvez-vous nous dire le nom de quelques-uns de ces amis ? – R. J'ai constamment à mes côtés un homme, que je devrais plutôt nommer un ange, car il est si doux, si bon, si beau que je crois que les anges doivent être tous comme ça là. Et puis il y a Didelot (le père de madame Delanne) qui est là aussi ; puis vos parents, mon ami. Oh ! comme ils sont bons ! Il y a aussi : ah ! c'est drôle, comme on se retrouve, notre sœur supérieure. Par exemple, elle est toujours la même ; elle n'a point changé. Mais que c'est donc curieux que tout cela !
Nota. La sœur que l'Esprit désigne habitait la commune de Treveray et avait donné les premières instructions à madame Delanne. Elle ne s'était manifestée qu'une seule fois, trois ans auparavant.
Tiens ! vous aussi, jardinier ! (nom familier donné à un oncle de madame Delanne, et qui ne s'était jamais manifesté). Mais, que je suis bête ! C'est chez votre nièce que nous sommes. Eh bien, je suis content de vous voir ; ça me met à mon aise ; car, ma parole d'honneur, je suis transporté je ne sais où depuis quelque temps ; je vais plus vite que le chemin de fer, et je parcours l'espace sans pouvoir me rendre compte comment. Etes-vous comme moi, Didelot ? Il a l'air de trouver cela tout naturel ; il paraît qu'il y est déjà habitué. Du reste, il y a plus longtemps que moi qu'il le fait (il est mort depuis six ans), et je comprends qu'il en soit moins étonné. Mais que c'est donc drôle ! ah ! c'est bien drôle ! Dites-moi, vous savez, avec vous, mon cousin, je suis à mon aise. Eh bien, franchement, dites-moi donc, qu'appelle-t-on mourir ?
M. Delanne : On appelle mourir, mon ami, laisser son corps grossier à la terre pour donner à l'âme le dégagement dont elle a besoin pour rentrer dans la vie réelle, la grande vie de l'Esprit. Oui, vous y êtes, cher ami, dans ce monde encore inconnu pour beaucoup d'hommes de la terre. Vous voilà sorti de la léthargie ou engourdissement qui suit la séparation du corps et de l'âme. Vous voyez votre ange gardien, des amis qui vous entourent ; ce sont eux qui vous ont amené parmi nous, pour vous prouver l'immortalité et l'individualité de votre âme. Soyez-en fier et heureux, car, vous le voyez maintenant, la mort c'est la vie. Voilà pourquoi aussi vous traversez l'espace avec la rapidité de l'éclair, et que vous pouvez causer avec nous à Paris, comme si vous aviez un corps matériel comme le nôtre. Ce corps, vous ne l'avez plus ; vous n'avez maintenant qu'une enveloppe fluidique et légère qui ne vous retient plus à la terre.
P. Legay : Singulière expression : mourir ! Mais donnez donc un autre nom au moment où l'âme laisse son corps à la terre, car cet instant n'est pas celui de la mort… Je me souviens… J'étais à peine débarrassé des liens qui me retenaient à mon corps, que mes souffrances, au lieu de diminuer, ne firent qu'accroître. Je voyais mes enfants qui se disputaient pour avoir chacun la part de ce qui leur revenait. Je les voyais ne pas prendre soin des terres que je leur laissais, et alors je m'étais mis à travailler avec encore plus de force que jamais. J'étais là, regrettant de voir qu'on ne me comprenait pas ; donc je n'étais pas mort. Je vous assure que j'éprouvais les mêmes craintes et les mêmes fatigues qu'avec mon corps, et pourtant je ne l'avais plus. Expliquez-moi cela ; si c'est comme ça qu'on meurt, c'est une drôle de manière de mourir. Dites-moi votre idée là-dessus, et puis après je vous dirai la mienne, car maintenant, ces bons amis-là ont la bonté de me le dire. Allons, mon cousin, dites-moi votre idée.
M. Delanne : Mon ami, lorsque les Esprits quittent leur corps, ils sont enveloppés d'un deuxième corps, comme je vous l'ai dit ; celui-ci est fluidique ; ils ne le quittent jamais. Eh bien, c'est avec ce corps que vous croyiez travailler, comme du vivant de l'autre. Vous pouvez épurer ce corps à moitié matériel par votre avancement moral ; et si le mot mort ne vous convient pas pour préciser ce moment, appelez-le transformation si vous voulez. Si vous avez eu à souffrir des choses qui vous ont été pénibles, c'est que vous-même, de votre vivant, vous vous êtes peut-être un peu trop attaché aux choses matérielles, en négligeant les choses spirituelles qui intéressaient votre avenir. (Il était très intéressé.) C'est un petit châtiment que Dieu vous a imposé pour racheter vos fautes en vous donnant le moyen de vous instruire et d'ouvrir vos yeux à la lumière.
P. Legay : Eh bien ! mon cher, ce n'est pas à ce moment qu'il faut donner le nom de transformation, car l'Esprit ne se transforme pas si vite s'il n'est aidé immédiatement à se reconnaître par la prière, et si on ne l'éclaire pas sur sa véritable position, soit, comme je viens de le dire, en priant pour lui, soit en l'évoquant. C'est pourquoi il y a tant d'Esprits, comme le mien, qui restent stationnaires. Il y a pour l'Esprit de la catégorie du mien transition, mais non transformation ; il ne sait pas se rendre compte de ce qui lui arrive. J'ai traîné, ou plutôt j'ai cru traîner mon corps avec la même peine et les mêmes maux que sur la terre. Lorsque j'ai été détaché de mon corps, savez-vous ce que j'ai éprouvé ? Eh bien ! ce que l'on éprouve après une chute qui vous étourdit un moment, ou plutôt après une faiblesse, et que l'on vous fait revenir avec du vinaigre. Je me suis réveillé sans m'apercevoir que mon corps m'avait quitté. Je suis venu ici à Paris, où je suis, pensant bien y être en chair et en os, et vous n'auriez pas pu me convaincre du contraire si depuis je n'étais pas mort.
Oui, on meurt, mais ce n'est pas au moment où l'on quitte son corps ; c'est au moment où l'Esprit s'apercevant de sa véritable position, il lui prend un vertige, ne sait plus comprendre ce qu'on lui dit, ne voit plus les choses qu'on lui explique de la même manière ; alors il se trouble ; voyant qu'il n'est plus compris, il cherche, et, comme l'aveugle qui est frappé subitement, il demande un conducteur qui ne vient pas de suite, non dà ; il faut qu'il reste quelque temps dans les ténèbres où tout est confus pour lui ; il est troublé, et il faut que le désir le pousse avec ardeur à demander la lumière, qui ne lui est accordée qu'après que l'agonie est terminée et que l'heure de la délivrance est arrivée. Eh bien, mon cousin, c'est quand l'Esprit se trouve dans ce moment que c'est le moment de la mort, car on ne sait plus se reconnaître. Il faut, je le répète, qu'on soit aidé par la prière pour sortir de cet état, et c'est aussi lorsque l'heure de la délivrance est arrivée qu'il faut employer le mot transformation pour les Esprits de mon ordre.
Oh ! merci de vos bonnes prières, merci, mon ami ; vous savez combien je vous aimais, je vous aimerai bien davantage encore maintenant. Continuez-moi vos bonnes prières pour mon avancement. Merci à l'homme qui a su mettre au jour ces grandes vérités saintes dont tant d'autres avant lui avaient dédaigné de s'occuper. Oui, merci d'avoir associé mon nom à tant d'autres. On a prié pour moi en lisant les quelques lignes que j'étais venu vous donner. Merci donc aussi à tous ceux qui ont prié pour moi, et aujourd'hui, grâce à la prière, je suis arrivé à en comprendre la portée. A mon tour, je tâcherai de vous être utile à tous.
Voilà ce que j'avais à vous dire, et soyez tranquilles ; aujourd'hui, je n'ai plus d'argent à regretter, mais au contraire j'ai tout mon temps à vous donner.
N'est-ce pas que ce changement doit vous étonner beaucoup ? Eh bien, désormais, comme à présent, ça sera comme ça, car je vois bien clair maintenant, là, et de très loin.
P. Legay.
Remarque. – Le nouvel état où se trouve Pierre Legay en cessant de se croire de ce monde, peut être considéré comme un second réveil de l'Esprit. Cette situation se rattache à la grande question de la mort spirituelle qui est à l'étude en ce moment. Nous remercions les Spirites qui, sur notre récit, ont prié pour cet Esprit. Ils peuvent voir qu'il s'en est aperçu et s'en est bien trouvé.
Manifestations spontanées de Marseille
Les manifestations de Poitiers ont en ce moment leur pendant à Marseille. En faut-il conclure que les soi-disant mauvais plaisants qui ont mis en émoi la première ville, sans pouvoir être découverts, se sont transportés dans la seconde où ils ne le sont pas davantage ? Il faut convenir que ce sont des mystificateurs bien adroits pour déjouer ainsi les recherches de la police et de tous ceux qui sont intéressés à les découvrir.
La Gazette du Midi du 5 mars contient à ce sujet la courte notice suivante :
« Pendant la journée du vendredi, le quartier Chave était en émoi, et sur le boulevard de ce nom, des groupes nombreux stationnaient aux approches de la maison n° 80. Le bruit courait que dans cette maison se passaient des scènes étranges qui avaient mis en fuite les habitants de l'immeuble ensorcelé. Des fantômes s'y promènent, disait-on ; à certaine heure des bruits étranges s'y font entendre, et des mains invisibles font entrechoquer meubles, vaisselle et batterie de cuisine. L'intervention de la police a été nécessaire pour maintenir l'ordre au sein de ces groupes qui grossissaient à chaque instant. A ce propos, ce qu'il y a de raisonnable à dire, paraît-il, c'est que la maison dont il s'agit n'offre peut-être pas toute la solidité voulue, sur un terrain miné par les eaux ; quelques craquements entendus, et transformés par la peur en jeux de sorcellerie, auront motivé des rumeurs qui ne sauraient tarder à se dissiper. »
Cauvière
Voici le récit circonstancié qui nous est transmis par le docteur Chavaux de Marseille, en date du 14 mars :
« Il y a une quinzaine de jours, j'ai eu l'honneur de vous donner quelques détails sur les manifestations qui se produisent depuis plus d'un mois dans la maison n° 80 du boulevard Chave. Je ne vous disais que ce que j'avais entendu dire, aujourd'hui je viens vous dire ce que j'ai vu et entendu par moi-même.
Ayant obtenu la permission de visiter la maison, je me suis rendu vendredi 10 mars dans l'appartement du premier étage, occupé par madame A… et ses deux filles, l'une de huit ans et l'autre de seize ans. A une heure juste, une vive détonation eut lieu dans la maison même, et fut suivie de neuf autres dans l'espace de trois quarts d'heure. A la seconde détonation, qui me sembla partir de l'intérieur de la chambre où nous étions, je vis une légère vapeur se former, puis une odeur bien prononcée de poudre se fit sentir. Madame R… étant entrée à la huitième détonation, dit qu'il y avait une odeur de poudre ; cela me fit plaisir, car cela me prouvait que mon imagination n'y était pour rien.
Le lundi 13, je me rendis de nouveau dans la maison à huit heures et demie du soir. A neuf heures, la première détonation se fit entendre, et dans l'espace d'une heure il y en eut trente-huit. Madame C… dit : « Si ces bruits sont occasionnés par des Esprits, qu'ils en fassent encore deux, cela fera quarante. » Au même moment, les deux détonations se firent coup sur coup avec un bruit effrayant. Nous nous regardâmes tous avec surprise et même frayeur. « Madame C… dit encore : « Je commence à comprendre qu'il y a des Esprits dans cette affaire ; je voudrais, pour me convaincre tout à fait, que les Esprits frappassent encore dix fois, cela fera cinquante. » Les dix détonations eurent lieu en moins d'un quart d'heure.
Ces bruits ont parfois la force de coups d'un canon de petit calibre que l'on tirerait dans une maison ; les portes et les fenêtres sont ébranlées ainsi que les murailles et le plancher ; les objets appendus aux murs sont vivement agités ; on dirait que la maison s'ébranle de tous côtés et qu'elle va tomber ; mais il n'en est rien. Après le coup, il n'y a pas la plus petite fente, rien n'est endommagé et tout rentre dans le calme ordinaire. Ces coups sont tantôt distancés de une à cinq minutes ; d'autres fois, ils frappent jusqu'à six fois coup sur coup. La police a fait une apparition et n'a rien découvert.
Voilà, cher maître, toute la vérité et la plus exacte vérité.
Agréez, etc.
Chavaux, D.M.P.
24, rue du Petit Saint-Jean. »
Une autre lettre du 17 mars contient ce qui suit :
« Hier nous avons passé une partie de la soirée dans la maison du boulevard Chave, n° 80 ; la réunion était composée de sept personnes. Les détonations ont commencé à onze heures, et, dans l'intervalle de dix minutes, nous en avons compté vingt-deux. Nous pouvons les comparer à celles d'une petite pièce de canon ; on pouvait les entendre à une grande distance de la maison. Cette maison est dans de très bonnes conditions de solidité, contrairement au dire de la Gazette du Midi.
On m'a dit qu'hier soir quatre détonations ont eu lieu dans une autre maison du même boulevard, et qu'elles étaient plus fortes que les premières.
Recevez, etc.
Carrier. »
Voilà la cause toute trouvée, dira-t-on ; on voit de la fumée, on sent l'odeur de la poudre, et vous ne devinez pas le moyen qu'emploient les mystificateurs ? – Il nous semble que des mystificateurs qui se serviraient de la poudre pour produire, pendant plus d'un mois, de pareilles détonations dans l'appartement même où se trouvent les témoins, qui ont la complaisance de les répéter selon le désir qui leur en est exprimé, ne doivent être ni fort loin, ni bien cachés ; pourquoi donc ne les a-t-on pas découverts ? – Mais alors, d'où vient cette odeur de poudre ? – Ceci est une autre question qui sera traitée en son temps ; en attendant, les bruits sont un fait, ce fait a une cause. Vous les attribuez à la malveillance ? cherchez donc les malveillants.
La Gazette du Midi du 5 mars contient à ce sujet la courte notice suivante :
« Pendant la journée du vendredi, le quartier Chave était en émoi, et sur le boulevard de ce nom, des groupes nombreux stationnaient aux approches de la maison n° 80. Le bruit courait que dans cette maison se passaient des scènes étranges qui avaient mis en fuite les habitants de l'immeuble ensorcelé. Des fantômes s'y promènent, disait-on ; à certaine heure des bruits étranges s'y font entendre, et des mains invisibles font entrechoquer meubles, vaisselle et batterie de cuisine. L'intervention de la police a été nécessaire pour maintenir l'ordre au sein de ces groupes qui grossissaient à chaque instant. A ce propos, ce qu'il y a de raisonnable à dire, paraît-il, c'est que la maison dont il s'agit n'offre peut-être pas toute la solidité voulue, sur un terrain miné par les eaux ; quelques craquements entendus, et transformés par la peur en jeux de sorcellerie, auront motivé des rumeurs qui ne sauraient tarder à se dissiper. »
Cauvière
Voici le récit circonstancié qui nous est transmis par le docteur Chavaux de Marseille, en date du 14 mars :
« Il y a une quinzaine de jours, j'ai eu l'honneur de vous donner quelques détails sur les manifestations qui se produisent depuis plus d'un mois dans la maison n° 80 du boulevard Chave. Je ne vous disais que ce que j'avais entendu dire, aujourd'hui je viens vous dire ce que j'ai vu et entendu par moi-même.
Ayant obtenu la permission de visiter la maison, je me suis rendu vendredi 10 mars dans l'appartement du premier étage, occupé par madame A… et ses deux filles, l'une de huit ans et l'autre de seize ans. A une heure juste, une vive détonation eut lieu dans la maison même, et fut suivie de neuf autres dans l'espace de trois quarts d'heure. A la seconde détonation, qui me sembla partir de l'intérieur de la chambre où nous étions, je vis une légère vapeur se former, puis une odeur bien prononcée de poudre se fit sentir. Madame R… étant entrée à la huitième détonation, dit qu'il y avait une odeur de poudre ; cela me fit plaisir, car cela me prouvait que mon imagination n'y était pour rien.
Le lundi 13, je me rendis de nouveau dans la maison à huit heures et demie du soir. A neuf heures, la première détonation se fit entendre, et dans l'espace d'une heure il y en eut trente-huit. Madame C… dit : « Si ces bruits sont occasionnés par des Esprits, qu'ils en fassent encore deux, cela fera quarante. » Au même moment, les deux détonations se firent coup sur coup avec un bruit effrayant. Nous nous regardâmes tous avec surprise et même frayeur. « Madame C… dit encore : « Je commence à comprendre qu'il y a des Esprits dans cette affaire ; je voudrais, pour me convaincre tout à fait, que les Esprits frappassent encore dix fois, cela fera cinquante. » Les dix détonations eurent lieu en moins d'un quart d'heure.
Ces bruits ont parfois la force de coups d'un canon de petit calibre que l'on tirerait dans une maison ; les portes et les fenêtres sont ébranlées ainsi que les murailles et le plancher ; les objets appendus aux murs sont vivement agités ; on dirait que la maison s'ébranle de tous côtés et qu'elle va tomber ; mais il n'en est rien. Après le coup, il n'y a pas la plus petite fente, rien n'est endommagé et tout rentre dans le calme ordinaire. Ces coups sont tantôt distancés de une à cinq minutes ; d'autres fois, ils frappent jusqu'à six fois coup sur coup. La police a fait une apparition et n'a rien découvert.
Voilà, cher maître, toute la vérité et la plus exacte vérité.
Agréez, etc.
Chavaux, D.M.P.
24, rue du Petit Saint-Jean. »
Une autre lettre du 17 mars contient ce qui suit :
« Hier nous avons passé une partie de la soirée dans la maison du boulevard Chave, n° 80 ; la réunion était composée de sept personnes. Les détonations ont commencé à onze heures, et, dans l'intervalle de dix minutes, nous en avons compté vingt-deux. Nous pouvons les comparer à celles d'une petite pièce de canon ; on pouvait les entendre à une grande distance de la maison. Cette maison est dans de très bonnes conditions de solidité, contrairement au dire de la Gazette du Midi.
On m'a dit qu'hier soir quatre détonations ont eu lieu dans une autre maison du même boulevard, et qu'elles étaient plus fortes que les premières.
Recevez, etc.
Carrier. »
Voilà la cause toute trouvée, dira-t-on ; on voit de la fumée, on sent l'odeur de la poudre, et vous ne devinez pas le moyen qu'emploient les mystificateurs ? – Il nous semble que des mystificateurs qui se serviraient de la poudre pour produire, pendant plus d'un mois, de pareilles détonations dans l'appartement même où se trouvent les témoins, qui ont la complaisance de les répéter selon le désir qui leur en est exprimé, ne doivent être ni fort loin, ni bien cachés ; pourquoi donc ne les a-t-on pas découverts ? – Mais alors, d'où vient cette odeur de poudre ? – Ceci est une autre question qui sera traitée en son temps ; en attendant, les bruits sont un fait, ce fait a une cause. Vous les attribuez à la malveillance ? cherchez donc les malveillants.
Poésies spirites
Le Spiritisme
Le Spiritisme est le développement de l'Évangile, l'extension et l'expansion de la vie.
Il est donc vrai ! son ombre si chérie
Vient soutenir, encourager mes chants,
Et pénétrer d'une ivresse infinie
Le vague heureux de mes pressentiments.
Comme un reflet épanché de mon âme,
Son noble esprit, rayonnant de clartés,
Remplit mes jours d'une invisible flamme,
Remplit mes nuits de rêves enchantés.
Alors des cieux, si j'invoque les âges,
Son souffle pur m'apporte un souvenir,
Et du présent dissipant les nuages,
Sait au passé renouer l'avenir.
« Enfant, dit-il, abandonnant la terre,
« Tu trouveras de nouveaux, d'anciens jours ;
« A tes côtés, celui qui fut ton père,
« Et dans nos cœurs d'éternelles amours.
Marie-Caroline Quillet,
Membre de la Société des gens de lettres.
Pont-l'Évêque (Calvados).
Madame Quillet, auteur d'Églantine solitaire, vient de publier un charmant petit volume sous le titre de : Une heure de poésie[1], qui sera apprécié par tous les amateurs de bons vers. Cet ouvrage étant étranger à la doctrine spirite, bien que n'y étant nullement contraire, son appréciation sort de la spécialité de notre Revue. Nous nous bornerons à dire que l'auteur prouve une chose, c'est que, contrairement à l'opinion de quelques-uns de ses confrères en littérature, on peut avoir de l'esprit et croire aux Esprits.
Madame Quillet nous écrit ce qui suit au sujet d'une des communications de madame Foulon publiée dans le numéro de mars.
« Madame Foulon pense que les hommes ne comprendraient pas la poésie du Spiritisme. Elle doit avoir raison à son point de vue lumineux. Sans doute les poètes sentent leurs ailes alourdies par les ténèbres de notre atmosphère ; mais l'instinct, mais la double vue dont ils sont doués viennent en aide à leur intelligence. Moi, je crois que chacun est appelé, selon ses aptitudes, au grand travail de la rénovation terrestre : les poètes, les philosophes, par l'inspiration des Esprits ; les martyrs, les travailleurs, par le génie des philosophes et les chants du poète. Ces chants ne sont qu'un soupir, il est vrai ; mais dans l'exil les soupirs forment la base et le complément du concert. »
A l'appui de ces paroles elle joint les strophes suivantes :
Vient soutenir, encourager mes chants,
Et pénétrer d'une ivresse infinie
Le vague heureux de mes pressentiments.
Comme un reflet épanché de mon âme,
Son noble esprit, rayonnant de clartés,
Remplit mes jours d'une invisible flamme,
Remplit mes nuits de rêves enchantés.
Alors des cieux, si j'invoque les âges,
Son souffle pur m'apporte un souvenir,
Et du présent dissipant les nuages,
Sait au passé renouer l'avenir.
« Enfant, dit-il, abandonnant la terre,
« Tu trouveras de nouveaux, d'anciens jours ;
« A tes côtés, celui qui fut ton père,
« Et dans nos cœurs d'éternelles amours.
Marie-Caroline Quillet,
Membre de la Société des gens de lettres.
Pont-l'Évêque (Calvados).
Madame Quillet, auteur d'Églantine solitaire, vient de publier un charmant petit volume sous le titre de : Une heure de poésie[1], qui sera apprécié par tous les amateurs de bons vers. Cet ouvrage étant étranger à la doctrine spirite, bien que n'y étant nullement contraire, son appréciation sort de la spécialité de notre Revue. Nous nous bornerons à dire que l'auteur prouve une chose, c'est que, contrairement à l'opinion de quelques-uns de ses confrères en littérature, on peut avoir de l'esprit et croire aux Esprits.
Madame Quillet nous écrit ce qui suit au sujet d'une des communications de madame Foulon publiée dans le numéro de mars.
« Madame Foulon pense que les hommes ne comprendraient pas la poésie du Spiritisme. Elle doit avoir raison à son point de vue lumineux. Sans doute les poètes sentent leurs ailes alourdies par les ténèbres de notre atmosphère ; mais l'instinct, mais la double vue dont ils sont doués viennent en aide à leur intelligence. Moi, je crois que chacun est appelé, selon ses aptitudes, au grand travail de la rénovation terrestre : les poètes, les philosophes, par l'inspiration des Esprits ; les martyrs, les travailleurs, par le génie des philosophes et les chants du poète. Ces chants ne sont qu'un soupir, il est vrai ; mais dans l'exil les soupirs forment la base et le complément du concert. »
A l'appui de ces paroles elle joint les strophes suivantes :
Aux poètes
Éveillez-vous, apôtres et poètes ;
Prêtez l'oreille aux oracles du temps.
L'air est chargé du souffle des prophètes,
Et l'hosannah retentit dans les vents.
Le Sinaï s'est couvert de nuages ;
L'Etna mugit dans l'horreur de ses feux ;
Mais l'Eternel disperse les orages,
Et pour la terre illumine les cieux.
La vérité sort de la parabole ;
Son pur éclat, en effleurant nos fronts,
D'un nouveau jour éclaire le symbole,
Et de la foi réchauffe les rayons.
La foi, l'amour, le vrai soleil des âmes,
Aux plus obscurs épanche la clarté ;
Et de son disque alimente les flammes,
Par le travail et par la charité.
Accourez tous, martyrs, aux chants sublimes ;
Ouvrez la voie aux lutteurs inconnus.
A tous les vents, sur les plus nobles cimes,
Allez planter l'humble croix de Jésus.
Madame Quillet est dans le vrai quand elle dit que chacun est appelé à concourir à l'œuvre de la rénovation terrestre ; personne ne conteste l'influence de la poésie, mais elle se trompe sur la pensée de madame Foulon lorsque celle-ci dit : « L'enthousiasme a envahi mon âme, et j'attends qu'il soit un peu passé pour vous entretenir du Spiritisme sérieux, et non du Spiritisme poétique qui n'est pas bon pour les hommes ; ils ne le comprendraient pas. » L'Esprit n'entend point, par Spiritisme poétique, les idées spirites traduites par la poésie, mais le Spiritisme idéal, produit d'une imagination enthousiaste ; et par Spiritisme sérieux, le Spiritisme scientifique, appuyé sur les faits et la logique, qui convient mieux à la nature positive des hommes de notre époque, celui qui fait l'objet de nos études.
Prêtez l'oreille aux oracles du temps.
L'air est chargé du souffle des prophètes,
Et l'hosannah retentit dans les vents.
Le Sinaï s'est couvert de nuages ;
L'Etna mugit dans l'horreur de ses feux ;
Mais l'Eternel disperse les orages,
Et pour la terre illumine les cieux.
La vérité sort de la parabole ;
Son pur éclat, en effleurant nos fronts,
D'un nouveau jour éclaire le symbole,
Et de la foi réchauffe les rayons.
La foi, l'amour, le vrai soleil des âmes,
Aux plus obscurs épanche la clarté ;
Et de son disque alimente les flammes,
Par le travail et par la charité.
Accourez tous, martyrs, aux chants sublimes ;
Ouvrez la voie aux lutteurs inconnus.
A tous les vents, sur les plus nobles cimes,
Allez planter l'humble croix de Jésus.
Madame Quillet est dans le vrai quand elle dit que chacun est appelé à concourir à l'œuvre de la rénovation terrestre ; personne ne conteste l'influence de la poésie, mais elle se trompe sur la pensée de madame Foulon lorsque celle-ci dit : « L'enthousiasme a envahi mon âme, et j'attends qu'il soit un peu passé pour vous entretenir du Spiritisme sérieux, et non du Spiritisme poétique qui n'est pas bon pour les hommes ; ils ne le comprendraient pas. » L'Esprit n'entend point, par Spiritisme poétique, les idées spirites traduites par la poésie, mais le Spiritisme idéal, produit d'une imagination enthousiaste ; et par Spiritisme sérieux, le Spiritisme scientifique, appuyé sur les faits et la logique, qui convient mieux à la nature positive des hommes de notre époque, celui qui fait l'objet de nos études.
Enterrement spirite
Sous ce titre, le Monde musical de Bruxelles, du 5 mars 1865, rend compte, dans les termes suivants, des obsèques de madame Vauchez, mère d'un de nos excellents frères en Spiritisme :
« Nos amis et collaborateurs Vauchez frères ont perdu il y a quelques jours leur mère. Les soins dont l'un et l'autre ont entouré les derniers temps de cette femme respectable étaient le signe et l'effet d'une tendresse que nous n'avons point pour tâche de décrire.
Les deux frères sont Spirites. Réunis à des amis qui ont la même croyance qu'eux, ils ont accompagné le corps de leur mère jusqu'à la tombe. Là, Vauchez aîné a exprimé, en paroles aussi simples que justes, à l'Esprit de sa mère, qui, dans la foi des Spirites, était présente et les entendait, la tristesse que répandait parmi eux cette séparation, alors même que, d'autre part, il y eût à être persuadé qu'elle entrait dans une vie meilleure, et qu'elle ne cesserait d'être en communication avec eux, et de les inspirer en les confirmant sans relâche dans la voie du bien. Il lui a répété l'assurance que ses vœux de mourante seraient accomplis par la consécration à deux bonnes œuvres, entre autres des frais économisés sur l'enterrement demeuré purement civil et sans aucun cérémonial. Ces vœux sont : qu'il soit fait une fondation en faveur de la crèche de Saint-Josse-ten-Noode, et une allocation d'assistance au profit de vieillards pauvres.
Après cette sorte d'entretien entre le fils et l'âme de sa mère, M. Herezka, l'un des amis spirites de la famille, a exprimé en vers, avec la même simplicité, quelques paroles dont la reproduction va faire connaître une partie de ce qu'il y a de bon et de bien dans une croyance qui devient journellement partout celle d'un plus grand nombre d'hommes que l'on compte parmi les gens instruits. Voici les paroles de M. Herezka à l'âme de la défunte :
Déjà la fosse est large ouverte,
Bientôt dans ce béant tombeau
Descendra ta dépouille inerte ;
Mais, libre de ce vil fardeau,
Tu t'en vas, planant dans l'espace,
Du progrès poursuivre la trace.
Plus de doute, plus de douleur !
Du mal tu as brisé la chaîne,
Seul le bien possède ton cœur,
Avec le corps morte est la haine.
Que l'amour et la charité
Te guident dans l'éternité !
A nos frères des autres mondes
Va porter nos vœux fraternels ;
Dis-leur que des âmes fécondes,
Mûrissant des fruits éternels,
Ont révélé, sur notre terre,
De la mort le joyeux mystère.
Dis-leur ! « Vos amis de là-bas,
« Contre l'ignorance orgueilleuse
« Vont rendre de mortels combats ;
« Pour cette cause glorieuse,
« Ils invoquent votre concours,
« Esprits ! courons à leur secours !
Viens souvent calmer nos souffrances,
Oh ! reviens nous parler des cieux
Aux moments de nos défaillances ;
Et fais resplendir à nos yeux
Quelque lumineuse étincelle
Emanant de source immortelle.
Après ces paroles, les frères Vauchez et leurs amis se sont retirés, sans bruit, sans ostentation, sans émotion douloureuse et comme on viendrait d'accompagner quelqu'un qui entreprend un voyage de long cours, dans toutes les conditions désirables de bien-être et de sécurité. Sans être nous-même Spirite, nous avions pris place dans le cortège ; nous ne sommes ici que le narrateur d'un fait : la cérémonie aussi touchante que remarquable par la simplicité et la sincérité de la croyance et des intentions.
Roselli.
Madame Vauchez a succombé après trente-deux ans d'une maladie qui la retenait au lit depuis vingt ans. Elle avait accepté avec joie les croyances spirites, et y avait puisé de grandes consolations dans ses longues et cruelles souffrances. Nous l'avons vue lors de notre dernier voyage à Bruxelles, et nous avons été édifié de son courage, de sa résignation et de sa confiance en la miséricorde de Dieu.
Voici les premières paroles qu'elle a dictées à ses enfants peu de temps après avoir rendu le dernier soupir :
« Le voile qui nous couvre encore le monde extra-terrestre vient d'être découvert pour moi. Je vois, je sens, je vis ! Dieu tout-puissant, merci ! Vous, mes guides, mes anges gardiens et protecteurs, merci ! Vous, mes fils, toi, ma fille, de la résignation, car vous êtes spirites ; ne me pleurez pas : je vis de la vie éternelle, je vis dans la lumière éthérée ; je vis et je ne souffre plus ; mes douleurs ont cessé, mon épreuve est terminée. Merci à vous, mes amis, d'avoir sitôt pensé à m'évoquer ; faites-le souvent ; je vous assisterai, je serai avec vous.
Dieu a eu pitié de mes souffrances. Oh ! mes amis, que la vie de l'âme est belle lorsqu'elle est dégagée de la matière ! De bons Esprits veillent sur vous, rendez-vous dignes de leur protection. En ce moment, je suis assisté par votre protecteur, le bon saint Vincent de Paul.
Marguerite Vauchez. »
« Nos amis et collaborateurs Vauchez frères ont perdu il y a quelques jours leur mère. Les soins dont l'un et l'autre ont entouré les derniers temps de cette femme respectable étaient le signe et l'effet d'une tendresse que nous n'avons point pour tâche de décrire.
Les deux frères sont Spirites. Réunis à des amis qui ont la même croyance qu'eux, ils ont accompagné le corps de leur mère jusqu'à la tombe. Là, Vauchez aîné a exprimé, en paroles aussi simples que justes, à l'Esprit de sa mère, qui, dans la foi des Spirites, était présente et les entendait, la tristesse que répandait parmi eux cette séparation, alors même que, d'autre part, il y eût à être persuadé qu'elle entrait dans une vie meilleure, et qu'elle ne cesserait d'être en communication avec eux, et de les inspirer en les confirmant sans relâche dans la voie du bien. Il lui a répété l'assurance que ses vœux de mourante seraient accomplis par la consécration à deux bonnes œuvres, entre autres des frais économisés sur l'enterrement demeuré purement civil et sans aucun cérémonial. Ces vœux sont : qu'il soit fait une fondation en faveur de la crèche de Saint-Josse-ten-Noode, et une allocation d'assistance au profit de vieillards pauvres.
Après cette sorte d'entretien entre le fils et l'âme de sa mère, M. Herezka, l'un des amis spirites de la famille, a exprimé en vers, avec la même simplicité, quelques paroles dont la reproduction va faire connaître une partie de ce qu'il y a de bon et de bien dans une croyance qui devient journellement partout celle d'un plus grand nombre d'hommes que l'on compte parmi les gens instruits. Voici les paroles de M. Herezka à l'âme de la défunte :
Déjà la fosse est large ouverte,
Bientôt dans ce béant tombeau
Descendra ta dépouille inerte ;
Mais, libre de ce vil fardeau,
Tu t'en vas, planant dans l'espace,
Du progrès poursuivre la trace.
Plus de doute, plus de douleur !
Du mal tu as brisé la chaîne,
Seul le bien possède ton cœur,
Avec le corps morte est la haine.
Que l'amour et la charité
Te guident dans l'éternité !
A nos frères des autres mondes
Va porter nos vœux fraternels ;
Dis-leur que des âmes fécondes,
Mûrissant des fruits éternels,
Ont révélé, sur notre terre,
De la mort le joyeux mystère.
Dis-leur ! « Vos amis de là-bas,
« Contre l'ignorance orgueilleuse
« Vont rendre de mortels combats ;
« Pour cette cause glorieuse,
« Ils invoquent votre concours,
« Esprits ! courons à leur secours !
Viens souvent calmer nos souffrances,
Oh ! reviens nous parler des cieux
Aux moments de nos défaillances ;
Et fais resplendir à nos yeux
Quelque lumineuse étincelle
Emanant de source immortelle.
Après ces paroles, les frères Vauchez et leurs amis se sont retirés, sans bruit, sans ostentation, sans émotion douloureuse et comme on viendrait d'accompagner quelqu'un qui entreprend un voyage de long cours, dans toutes les conditions désirables de bien-être et de sécurité. Sans être nous-même Spirite, nous avions pris place dans le cortège ; nous ne sommes ici que le narrateur d'un fait : la cérémonie aussi touchante que remarquable par la simplicité et la sincérité de la croyance et des intentions.
Roselli.
Madame Vauchez a succombé après trente-deux ans d'une maladie qui la retenait au lit depuis vingt ans. Elle avait accepté avec joie les croyances spirites, et y avait puisé de grandes consolations dans ses longues et cruelles souffrances. Nous l'avons vue lors de notre dernier voyage à Bruxelles, et nous avons été édifié de son courage, de sa résignation et de sa confiance en la miséricorde de Dieu.
Voici les premières paroles qu'elle a dictées à ses enfants peu de temps après avoir rendu le dernier soupir :
« Le voile qui nous couvre encore le monde extra-terrestre vient d'être découvert pour moi. Je vois, je sens, je vis ! Dieu tout-puissant, merci ! Vous, mes guides, mes anges gardiens et protecteurs, merci ! Vous, mes fils, toi, ma fille, de la résignation, car vous êtes spirites ; ne me pleurez pas : je vis de la vie éternelle, je vis dans la lumière éthérée ; je vis et je ne souffre plus ; mes douleurs ont cessé, mon épreuve est terminée. Merci à vous, mes amis, d'avoir sitôt pensé à m'évoquer ; faites-le souvent ; je vous assisterai, je serai avec vous.
Dieu a eu pitié de mes souffrances. Oh ! mes amis, que la vie de l'âme est belle lorsqu'elle est dégagée de la matière ! De bons Esprits veillent sur vous, rendez-vous dignes de leur protection. En ce moment, je suis assisté par votre protecteur, le bon saint Vincent de Paul.
Marguerite Vauchez. »
Notices bibliographiques
Désarroi de l'empire de Satan
Preuves données au fanatisme religieux que les Esprits ne sont pas des
démons, en réponse aux entretiens sur les Esprits, du jésuite le P.
Xavier Pailloux. Digression historique provoquée par lui, et
démonstration que Satan et l'enfer des satanistes
sont un mythe ; suivies de données des Esprits sur l'état posthume de
l'homme et d'impressions après la mort ; par L.–A.–G. Salgues
(d'Angers). Broch. petit in-8° de 150 pages. – Angers, chez Lemesle et Ce. Paris, Dentu, Palais-Royal. – Prix : 2 fr.
Nous rendrons compte ultérieurement de cet ouvrage.
L'Echo d'outre-tombe
L'Echo d'outre-tombe, journal spirite,
publié à Marseille sous la direction de M. Gilet, et paraissant tous les
dimanches. Bureaux à Marseille, boulevard Chave, n° 81. – Prix : 10 fr.
par an. Ce journal porte en tête la devise : Hors la charité point de salut.
Nous sommes heureux de lui voir arborer un drapeau qui est le signe de
ralliement de tous les Spirites sincères ; en suivant sans dévier la
route qu'il indique, on est certain de ne pas s'égarer. Ainsi que nous
l'avons dit à propos du médium évangélique
de Toulouse : comme noblesse, titre oblige. Le Spiritisme compte ainsi
un organe de plus dans une des principales villes de France.
Accord de la foi et de la raison, par M. J.-B.
Dédié au clergé. Broch. in-8° de 100 pages. – Paris, Didier et Ce. – Prix : 1 fr. 50 c. Cette brochure est du même auteur que les Lettres sur le Spiritisme écrites à des ecclésiastiques.
Ce dernier ouvrage traite plus spécialement la question religieuse, et
nous sommes heureux de constater que l'auteur le fait avec une
remarquable force de logique, en même temps qu'il apporte une modération
louable dans ses réfutations. Dans un style élégant et correct, il dit
les plus grandes vérités sans froisser personne ; c'est le meilleur
moyen de persuader. Nous le recommandons à nos lecteurs, qui y puiseront
d'excellents arguments.