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REVUE SPIRITE JOURNAL D'ETUDES PSYCHOLOGIQUES - 1864 > Avril > Instructions des Esprits
Instructions des Esprits
(Communication spontanée. ‑ Société spirite de Paris, 19 février 1864. Médium, M. Leymarie.)
C'est au quinzième siècle que fut inventée l'imprimerie. Comme tant
d'autres connus ou inconnus, il a fallu prendre la coupe et en boire le
fiel. Je ne viens pas à vous, Spirites, pour vous raconter mes déboires
ou mes souffrances ; car en ces temps d'ignorance et de tristesse, où
vos pères avaient sur la poitrine ce cauchemar appelé féodalité et une
théocratie aveugle et jalouse de son pouvoir, tout homme de progrès
avait la tête de trop. Je veux seulement vous dire quelques mots au
sujet de mon invention, de ses résultats, et de son affinité spirituelle
avec vous, avec les éléments qui font votre force expansive.
La révolution mère, celle qui portait dans ses flancs le mode d'expression de l'humanité, la pensée humaine se dépouillant du passé, de sa peau symbolique, c'est l'invention de l'imprimerie. Sous cette forme, la pensée se mêle à l'air, elle se spiritualise, elle sera indestructible ; maîtresse des siècles à venir, elle prend son vol intelligent pour relier tous les points de l'espace, et de ce jour, elle maîtrise la vieille manière de parler. Aux peuples primitifs, il fallait des monuments représentant un peuple, des montagnes de pierre disant à ceux qui savent voir : Voici ma religion, ma loi, mes espérances, ma poésie.
En effet, l'imprimerie remplace l'hiéroglyphe ; son langage est accessible à tous, son attirail est léger ; c'est qu'un livre ne demande qu'un peu de papier, un peu d'encre, quelques mains, tandis qu'une cathédrale exige plusieurs vies d'un peuple, et de l'or par tonnes.
Ici, permettez-moi une digression. L'alphabet des premiers peuples fut composé de quartiers de roche que le fer n'avait pas touchés. Les pierres levées des Celtes se retrouvent aussi bien en Sibérie qu'en Amérique. C'étaient les souvenirs humains devenus confus, écrits en monuments durables. Le Galgal hébreu, les crombels, les dolmens, les tumulus, exprimèrent plus tard des mots.
Puis vinrent la tradition et le symbole ; ces premiers monuments ne suffisant plus, on créa l'édifice, et l'architecture devint monstrueuse ; elle se fixa comme une géante, répétant aux générations nouvelles les symboles du passé ; telles furent les pagodes, les pyramides, le temple de Salomon.
C'est l'édifice qui enfermait le Verbe, cette idée mère des nations ; sa forme, son emplacement représentaient toute une pensée, et c'est pour cela que tous les symboles ont leurs grandes et magnifiques pages de pierres.
La maçonnerie, c'est l'idée écrite, intelligente, appartenant à ces hommes devenus unis par un symbole, prenant Iram pour patron et composant cette franc-maçonnerie tant conspuée qui a porté en elle le germe de toute liberté. Elle sut semer ses monuments et les symboles du passé sur le monde entier, remplaçant la théocratie des premières civilisations par la démocratie, cette loi de la liberté.
Après les monuments théocratiques de l'Inde et de l'Égypte, viennent leurs sœurs, les architectures grecque et romaine, puis le style roman si sombre, représentant l'absolu, l'unité, le prêtre ; les croisades nous apportent l'ogive, et le seigneur veut partager, en attendant le peuple qui saura bien faire sa place ; la féodalité voit naître la commune, et la face de l'Europe change, car l'ogive détrône le roman ; le maçon devient artiste et poétise la matière ; il se donne le privilège de la liberté dans l'architecture, car la pensée n'avait alors que ce mode d'expression. Que de séditions écrites aussi au front de nos monuments ! Et c'est pour cela que les poètes, les penseurs, les déshérités, tout ce qui était intelligent, a couvert l'Europe de cathédrales.
Vous le voyez, jusqu'au pauvre Guttemberg, l'architecture est l'écriture universelle ; à son tour, l'imprimerie renverse le gothique ; la théocratie, c'est l'horreur du progrès, la conservation momifiée des types primitifs ; l'ogive, c'est la transition de la nuit au crépuscule où chacun peut lire la pierre facile à comprendre ; mais l'imprimerie, c'est le jour complet, renversant le manuscrit, demandant la place la plus large que désormais nul ne pourra restreindre.
Comme le soleil, l'imprimerie fécondera le monde de ses rayons bienfaisants ; l'architecture ne représentera plus la société ; elle sera classique et renaissance, et ce monde d'artistes, divorçant avec le passé, fait de rudes brèches aux théogonies humaines pour suivre la route tracée par Dieu ; il laisse de simples manœuvres aux monuments de la renaissance pour se faire statuaire, peintre, musicien ; la force d'harmonie se dépense en livres, et déjà, au seizième siècle, elle est si robuste, si forte cette imprimerie de Nuremberg, qu'elle est l'avènement d'un siècle littéraire ; elle est tout à la fois Luther, Jean Goujon, Rousseau, Voltaire ; elle livre à la vieille Europe ce combat lent mais sûr qui sait reconstruire après avoir détruit.
Et maintenant que la pensée est émancipée, quelle est la puissance qui pourrait écrire le livre architectural de notre époque ? Tous les milliards de notre planète ne sauraient y suffire, et nul ne saura relever ce qui est au passé et lui appartient exclusivement.
Sans dédaigner le grand livre de l'architecture qui est le passé et son enseignement, remercions Dieu qui sait, aux époques voulues, mettre en notre puissance une arme si forte qu'elle devient le pain de l'Esprit, l'émancipation du corps, le libre arbitre de l'homme, l'idée commune à tous, la science un a, b, c qui féconde la terre en nous rendant meilleurs. Mais si l'imprimerie vous a émancipés, l'électricité vous fera vraiment libres, c'est elle qui détrônera la presse de Guttemberg pour mettre en vos mains une puissance bien autrement redoutable, et cela sera bientôt.
La science spirite, cette sauvegarde de l'humanité, vous aidera à comprendre la nouvelle puissance dont je vous parle. Guttemberg, à qui Dieu donna une mission providentielle, fera sans doute partie de la seconde, c'est-à-dire de celle qui vous guidera dans l'étude des fluides.
Bientôt vous serez prêts, chers amis ; mais aussi, il ne s'agit plus seulement d'être Spirites fervents, il faut aussi étudier, afin que tout ce qui vous a été enseigné sur l'électricité et tous les fluides en général soit pour vous une grammaire sue par cœur. Rien n'est étranger à la science des Esprits ; plus votre bagage intellectuel sera solide, moins vous serez étonnés des nouvelles découvertes ; devant être les initiateurs à de nouvelles formes de pensée, vous devez être forts et sûrs de vos facultés spirituelles.
J'avais donc raison de vous parler de ma mission, sœur de la vôtre. Vous êtes les élus parmi les hommes. Les bons Esprits vous donnent un livre qui fait le tour de la terre, et sans l'imprimerie vous ne seriez rien. Par vous, l'obsession qui voile la vérité aux hommes disparaîtra ; mais, je le répète, préparez-vous et étudiez pour ne pas être indignes du nouveau bienfait, et pour savoir au contraire plus intelligemment que d'autres le répandre et le faire accepter.
Guttemberg.
Remarque. ‑ L'imprimerie, par la diffusion des idées qu'elle a rendues impérissables et qu'elle répand aux quatre coins du monde, a produit une révolution intellectuelle que nul ne peut méconnaître. C'est parce que ce résultat était entrevu qu'elle fut, à son début, qualifiée, par quelques-uns, d'invention diabolique ; c'est un rapport de plus qu'elle a avec le Spiritisme, et dont Guttemberg a omis de parler. Il semblerait vraiment, à entendre certaines gens, que le diable a le monopole de toutes les grandes idées ; toutes celles qui tendent à faire faire un pas à l'humanité lui sont attribuées. Jésus lui-même, on le sait, fut accusé d'agir par l'entremise du démon qui, en vérité, doit être fier de toutes les bonnes et belles choses qu'on retire à Dieu pour les lui attribuer. N'est-ce pas lui qui a inspiré Galilée et toutes les découvertes scientifiques qui ont fait avancer l'humanité ? D'après cela, il faudrait qu'il fût bien modeste pour ne pas se croire le maître de l'univers.
Mais ce qui peut paraître étrange, c'est sa maladresse, puisqu'il n'est pas un seul progrès de la science qui n'ait pour effet de ruiner son empire. C'est un point auquel on n'a pas assez songé.
Si telle a été la puissance de ce moyen de propagation tout matériel, combien ne sera pas plus grande celle de l'enseignement des Esprits se communiquant partout, pénétrant là où l'accès des livres est interdit, se faisant entendre à ceux-mêmes qui ne veulent pas les écouter ! Quelle puissance humaine pourrait résister à une telle puissance ?
Cette remarquable dissertation a provoqué, dans le sein de la Société, les réflexions suivantes de la part d'un autre Esprit.
La révolution mère, celle qui portait dans ses flancs le mode d'expression de l'humanité, la pensée humaine se dépouillant du passé, de sa peau symbolique, c'est l'invention de l'imprimerie. Sous cette forme, la pensée se mêle à l'air, elle se spiritualise, elle sera indestructible ; maîtresse des siècles à venir, elle prend son vol intelligent pour relier tous les points de l'espace, et de ce jour, elle maîtrise la vieille manière de parler. Aux peuples primitifs, il fallait des monuments représentant un peuple, des montagnes de pierre disant à ceux qui savent voir : Voici ma religion, ma loi, mes espérances, ma poésie.
En effet, l'imprimerie remplace l'hiéroglyphe ; son langage est accessible à tous, son attirail est léger ; c'est qu'un livre ne demande qu'un peu de papier, un peu d'encre, quelques mains, tandis qu'une cathédrale exige plusieurs vies d'un peuple, et de l'or par tonnes.
Ici, permettez-moi une digression. L'alphabet des premiers peuples fut composé de quartiers de roche que le fer n'avait pas touchés. Les pierres levées des Celtes se retrouvent aussi bien en Sibérie qu'en Amérique. C'étaient les souvenirs humains devenus confus, écrits en monuments durables. Le Galgal hébreu, les crombels, les dolmens, les tumulus, exprimèrent plus tard des mots.
Puis vinrent la tradition et le symbole ; ces premiers monuments ne suffisant plus, on créa l'édifice, et l'architecture devint monstrueuse ; elle se fixa comme une géante, répétant aux générations nouvelles les symboles du passé ; telles furent les pagodes, les pyramides, le temple de Salomon.
C'est l'édifice qui enfermait le Verbe, cette idée mère des nations ; sa forme, son emplacement représentaient toute une pensée, et c'est pour cela que tous les symboles ont leurs grandes et magnifiques pages de pierres.
La maçonnerie, c'est l'idée écrite, intelligente, appartenant à ces hommes devenus unis par un symbole, prenant Iram pour patron et composant cette franc-maçonnerie tant conspuée qui a porté en elle le germe de toute liberté. Elle sut semer ses monuments et les symboles du passé sur le monde entier, remplaçant la théocratie des premières civilisations par la démocratie, cette loi de la liberté.
Après les monuments théocratiques de l'Inde et de l'Égypte, viennent leurs sœurs, les architectures grecque et romaine, puis le style roman si sombre, représentant l'absolu, l'unité, le prêtre ; les croisades nous apportent l'ogive, et le seigneur veut partager, en attendant le peuple qui saura bien faire sa place ; la féodalité voit naître la commune, et la face de l'Europe change, car l'ogive détrône le roman ; le maçon devient artiste et poétise la matière ; il se donne le privilège de la liberté dans l'architecture, car la pensée n'avait alors que ce mode d'expression. Que de séditions écrites aussi au front de nos monuments ! Et c'est pour cela que les poètes, les penseurs, les déshérités, tout ce qui était intelligent, a couvert l'Europe de cathédrales.
Vous le voyez, jusqu'au pauvre Guttemberg, l'architecture est l'écriture universelle ; à son tour, l'imprimerie renverse le gothique ; la théocratie, c'est l'horreur du progrès, la conservation momifiée des types primitifs ; l'ogive, c'est la transition de la nuit au crépuscule où chacun peut lire la pierre facile à comprendre ; mais l'imprimerie, c'est le jour complet, renversant le manuscrit, demandant la place la plus large que désormais nul ne pourra restreindre.
Comme le soleil, l'imprimerie fécondera le monde de ses rayons bienfaisants ; l'architecture ne représentera plus la société ; elle sera classique et renaissance, et ce monde d'artistes, divorçant avec le passé, fait de rudes brèches aux théogonies humaines pour suivre la route tracée par Dieu ; il laisse de simples manœuvres aux monuments de la renaissance pour se faire statuaire, peintre, musicien ; la force d'harmonie se dépense en livres, et déjà, au seizième siècle, elle est si robuste, si forte cette imprimerie de Nuremberg, qu'elle est l'avènement d'un siècle littéraire ; elle est tout à la fois Luther, Jean Goujon, Rousseau, Voltaire ; elle livre à la vieille Europe ce combat lent mais sûr qui sait reconstruire après avoir détruit.
Et maintenant que la pensée est émancipée, quelle est la puissance qui pourrait écrire le livre architectural de notre époque ? Tous les milliards de notre planète ne sauraient y suffire, et nul ne saura relever ce qui est au passé et lui appartient exclusivement.
Sans dédaigner le grand livre de l'architecture qui est le passé et son enseignement, remercions Dieu qui sait, aux époques voulues, mettre en notre puissance une arme si forte qu'elle devient le pain de l'Esprit, l'émancipation du corps, le libre arbitre de l'homme, l'idée commune à tous, la science un a, b, c qui féconde la terre en nous rendant meilleurs. Mais si l'imprimerie vous a émancipés, l'électricité vous fera vraiment libres, c'est elle qui détrônera la presse de Guttemberg pour mettre en vos mains une puissance bien autrement redoutable, et cela sera bientôt.
La science spirite, cette sauvegarde de l'humanité, vous aidera à comprendre la nouvelle puissance dont je vous parle. Guttemberg, à qui Dieu donna une mission providentielle, fera sans doute partie de la seconde, c'est-à-dire de celle qui vous guidera dans l'étude des fluides.
Bientôt vous serez prêts, chers amis ; mais aussi, il ne s'agit plus seulement d'être Spirites fervents, il faut aussi étudier, afin que tout ce qui vous a été enseigné sur l'électricité et tous les fluides en général soit pour vous une grammaire sue par cœur. Rien n'est étranger à la science des Esprits ; plus votre bagage intellectuel sera solide, moins vous serez étonnés des nouvelles découvertes ; devant être les initiateurs à de nouvelles formes de pensée, vous devez être forts et sûrs de vos facultés spirituelles.
J'avais donc raison de vous parler de ma mission, sœur de la vôtre. Vous êtes les élus parmi les hommes. Les bons Esprits vous donnent un livre qui fait le tour de la terre, et sans l'imprimerie vous ne seriez rien. Par vous, l'obsession qui voile la vérité aux hommes disparaîtra ; mais, je le répète, préparez-vous et étudiez pour ne pas être indignes du nouveau bienfait, et pour savoir au contraire plus intelligemment que d'autres le répandre et le faire accepter.
Guttemberg.
Remarque. ‑ L'imprimerie, par la diffusion des idées qu'elle a rendues impérissables et qu'elle répand aux quatre coins du monde, a produit une révolution intellectuelle que nul ne peut méconnaître. C'est parce que ce résultat était entrevu qu'elle fut, à son début, qualifiée, par quelques-uns, d'invention diabolique ; c'est un rapport de plus qu'elle a avec le Spiritisme, et dont Guttemberg a omis de parler. Il semblerait vraiment, à entendre certaines gens, que le diable a le monopole de toutes les grandes idées ; toutes celles qui tendent à faire faire un pas à l'humanité lui sont attribuées. Jésus lui-même, on le sait, fut accusé d'agir par l'entremise du démon qui, en vérité, doit être fier de toutes les bonnes et belles choses qu'on retire à Dieu pour les lui attribuer. N'est-ce pas lui qui a inspiré Galilée et toutes les découvertes scientifiques qui ont fait avancer l'humanité ? D'après cela, il faudrait qu'il fût bien modeste pour ne pas se croire le maître de l'univers.
Mais ce qui peut paraître étrange, c'est sa maladresse, puisqu'il n'est pas un seul progrès de la science qui n'ait pour effet de ruiner son empire. C'est un point auquel on n'a pas assez songé.
Si telle a été la puissance de ce moyen de propagation tout matériel, combien ne sera pas plus grande celle de l'enseignement des Esprits se communiquant partout, pénétrant là où l'accès des livres est interdit, se faisant entendre à ceux-mêmes qui ne veulent pas les écouter ! Quelle puissance humaine pourrait résister à une telle puissance ?
Cette remarquable dissertation a provoqué, dans le sein de la Société, les réflexions suivantes de la part d'un autre Esprit.
(Société spirite de Paris. ‑ Méd., M. A. Didier)
L'Esprit de Guttemberg a fort poétiquement défini les effets positifs et
si universellement progressifs de l'imprimerie et de l'avenir de
l'électricité ; néanmoins je me permets, en ma qualité d'ancien tailleur
de castels, de machicoulis, de terrassements et de cathédrales,
d'exposer certaines théories sur le caractère et le but de
l'architecture du moyen âge.
Tout le monde sait, et d'illustres professeurs archéologues l'ont enseigné de nos jours, que la religion, la foi naïve ont élevé avec le génie de l'homme ces superbes monuments gothiques répandus sur la surface de l'Europe ; et ici, plus que jamais, l'idée exprimée par l'Esprit de Guttemberg est pleine d'élévation.
Nous croyons cependant devoir émettre, non pas contre, mais à côté, notre opinion.
L'idée, cette lumière de l'âme, étincelle réelle qui communique la volonté et le mouvement à l'organisme humain, se manifeste de différentes manières, soit par l'art, la philosophie, etc. L'architecture, cet art élevé qui exprime peut-être le mieux le naturel et le génie d'un peuple, fut consacrée, dans les nations impressionnables et croyantes, au culte de Dieu et aux cérémonies religieuses. Le moyen âge, fort de la féodalité et de sa croyance, eut la gloire de fonder deux arts essentiellement différents dans leur but et leur consécration, mais qui expriment parfaitement l'état de sa civilisation : le château fort, habité pair le seigneur ou le roi ; l'abbaye, le monastère et l'Église ; en un mot, l'art architectural militaire, et l'art architectural religieux. Les Romains, essentiellement administrateurs, guerriers, civilisateurs, colonisateurs universels, forcés qu'ils étaient par l'extension de leurs conquêtes, n'eurent jamais un art architectural inspiré par leur foi religieuse ; l'avidité seule, l'amour du gain et du pouvoir exécutif, leur firent construire ces formidables entassements de pierres, symbole de leur audace et de leur assise intellectuelle. La poésie du Nord, contemplative et nuageuse, unie à la somptuosité de l'art oriental, créa le genre gothique, d'abord austère et peu à peu fleuri. En effet, nous voyons en architecture la réalisation des tendances religieuses et du despotisme féodal.
Ces ruines fameuses de bien des révolutions humaines, plus que du temps, imposent encore par leur aspect grandiose et formidable. Il semble que le siècle qui les vit s'élever était dur, sombre et inexorable comme elles ; mais il ne faut pas conclure de là que la découverte de l'imprimerie, à force d'étendre la pensée, ait simplifié l'art de l'architecture.
Non, l'art qui est une part de l'idée, sera toujours une manifestation ou religieuse, ou politique, ou militaire, ou démocratique, ou princière. L'art a son rôle, l'imprimerie a le sien ; sans être exclusivement spécialiste, il ne faut pas confondre le but de chaque chose ; il faut dire seulement qu'il ne faut pas mêler les différentes facultés et les différentes manifestations de l'idée humaine.
Robert de Luzarches.
Tout le monde sait, et d'illustres professeurs archéologues l'ont enseigné de nos jours, que la religion, la foi naïve ont élevé avec le génie de l'homme ces superbes monuments gothiques répandus sur la surface de l'Europe ; et ici, plus que jamais, l'idée exprimée par l'Esprit de Guttemberg est pleine d'élévation.
Nous croyons cependant devoir émettre, non pas contre, mais à côté, notre opinion.
L'idée, cette lumière de l'âme, étincelle réelle qui communique la volonté et le mouvement à l'organisme humain, se manifeste de différentes manières, soit par l'art, la philosophie, etc. L'architecture, cet art élevé qui exprime peut-être le mieux le naturel et le génie d'un peuple, fut consacrée, dans les nations impressionnables et croyantes, au culte de Dieu et aux cérémonies religieuses. Le moyen âge, fort de la féodalité et de sa croyance, eut la gloire de fonder deux arts essentiellement différents dans leur but et leur consécration, mais qui expriment parfaitement l'état de sa civilisation : le château fort, habité pair le seigneur ou le roi ; l'abbaye, le monastère et l'Église ; en un mot, l'art architectural militaire, et l'art architectural religieux. Les Romains, essentiellement administrateurs, guerriers, civilisateurs, colonisateurs universels, forcés qu'ils étaient par l'extension de leurs conquêtes, n'eurent jamais un art architectural inspiré par leur foi religieuse ; l'avidité seule, l'amour du gain et du pouvoir exécutif, leur firent construire ces formidables entassements de pierres, symbole de leur audace et de leur assise intellectuelle. La poésie du Nord, contemplative et nuageuse, unie à la somptuosité de l'art oriental, créa le genre gothique, d'abord austère et peu à peu fleuri. En effet, nous voyons en architecture la réalisation des tendances religieuses et du despotisme féodal.
Ces ruines fameuses de bien des révolutions humaines, plus que du temps, imposent encore par leur aspect grandiose et formidable. Il semble que le siècle qui les vit s'élever était dur, sombre et inexorable comme elles ; mais il ne faut pas conclure de là que la découverte de l'imprimerie, à force d'étendre la pensée, ait simplifié l'art de l'architecture.
Non, l'art qui est une part de l'idée, sera toujours une manifestation ou religieuse, ou politique, ou militaire, ou démocratique, ou princière. L'art a son rôle, l'imprimerie a le sien ; sans être exclusivement spécialiste, il ne faut pas confondre le but de chaque chose ; il faut dire seulement qu'il ne faut pas mêler les différentes facultés et les différentes manifestations de l'idée humaine.
Robert de Luzarches.
(Société Spirite de Paris, 25 février 1864.)
Nota. ‑ Dans cette séance, des remerciements furent adressés à l'Esprit
de Guttemberg, avec prière de vouloir bien prendre part à nos
entretiens, quand il le jugerait à propos.
Dans la même séance, la présence de plusieurs dignitaires étrangers de l'Ordre maçonnique motiva la question suivante :
Quel concours le Spiritisme peut-il trouver dans la Franc-Maçonnerie ?
Plusieurs dissertations furent obtenues sur ce sujet.
I
Monsieur le Président, je vous remercie de votre aimable invitation ; c'est la première fois qu'une de mes communications a été lue à la Société spirite de Paris, et ce ne sera pas, je l'espère, la dernière.
Vous avez peut-être trouvé dans mes réflexions un peu longues sur l'imprimerie quelques pensées que vous n'approuvez pas complètement ; mais, en réfléchissant à la difficulté que nous éprouvons à nous mettre en relation avec les médiums et à employer leurs facultés, vous voudrez bien passer légèrement sur certaines expressions ou certains tours de langage que nous ne sommes pas toujours à même de maîtriser. Plus tard, l'électricité fera sa révolution médianimique, et comme tout sera changé dans la manière de reproduire la pensée de l'Esprit, vous ne trouverez plus de ces lacunes quelquefois regrettables, surtout quand les communications sont lues devant des étrangers.
Vous avez parlé de la franc-maçonnerie, et vous avez raison d'espérer trouver en elle de bons éléments. Que demande-t-on à tout maçon initié ? De croire à l'immortalité de l'âme, au divin Architecte, d'être bienfaisants, dévoués, sociables, dignes et humbles. On y pratique l'égalité sur la plus large échelle ; il y a donc dans ces sociétés une affinité avec le Spiritisme tellement évidente qu'elle frappe les yeux.
La question du Spiritisme a été portée à l'ordre du jour dans plusieurs loges, et voici quel en a été le résultat : on a lu de volumineux rapports bien embrouillés sur ce sujet, mais on ne l'a pas étudié à fond, ce qui fait que là, comme en beaucoup d'autres endroits, on a discuté sur une chose que l'on ne connaissait pas, la jugeant sur ouï-dire bien plus que sur la réalité. Cependant beaucoup de maçons sont Spirites, et travaillent grandement à propager cette croyance ; toutes les oreilles écoutent, et si l'habitude dit : Non ; la raison dit : Oui.
Espérez donc ; car le temps est un racoleur sans égal ; par lui les impressions se modifient, et nécessairement, dans le vaste champ des études ouvertes dans les loges, l'étude spirite entrera comme complément ; car cela est déjà dans l'air ; on a ri, on a parlé : on ne rit plus, on médite.
Alors donc vous aurez une pépinière spirite dans ces sociétés essentiellement libérales ; par elles, vous entrerez pleinement dans cette seconde période qui doit préparer les voies promises. Les hommes intelligents de la maçonnerie vous béniront à leur tour ; car la morale des Esprits donnera un corps à cette secte tant compromise, tant redoutée, mais qui a fait plus de bien qu'on ne croit.
Tout a un laborieux enfantement, une affinité mystérieuse ; et si cela existe pour ce qui trouble les couches sociales, cela est bien plus vrai pour ce qui conduit à l'avancement moral des peuples.
Guttemberg (Médium, M. Leymarie.)
II
Mon cher frère en doctrine (l'Esprit s'adresse à l'un des francs-maçons spirites présents à la séance), je viens avec bonheur répondre au bienveillant appel que tu fais aux Esprits qui ont aimé et fondé les institutions franc-maçonniques. Pour cimenter cette association généreuse, deux fois j'ai versé mon sang ; deux fois les places publiques de cette cité ont été teintes du sang du pauvre Jacques Molé. Chers frères, faudra-t-il le donner une troisième ? Je dirai avec bonheur : Non. Il vous l'a été dit : Plus de sang, plus de despotisme, plus de bourreaux ! Une société de frères, d'amis, d'hommes pleins de bonne volonté qui ne désirent qu'une chose : connaître la vérité pour faire le bien ! Je ne m'étais point encore communiqué dans cette assemblée ; tant que vous avez parlé science spirite, philosophie spirite, j'ai cédé la place aux Esprits qui sont plus aptes à vous donner des conseils sur ces divers points, et j'attendais patiemment, sachant que mon tour viendrait ; il y a temps pour tout, de même il y a moment pour tous ; aussi, je crois que l'heure a sonné et que le moment est opportun. Je puis donc venir vous dire quelle est mon opinion touchant le Spiritisme et la franc-maçonnerie.
Les institutions maçonniques ont été pour la société un acheminement au bonheur. A une époque où toute idée libérale était considérée comme un crime, il fallait aux hommes une force qui, tout en étant soumise aux lois, n'était pas moins émancipée : émancipée par ses croyances, par ses institutions et par l'unité de son enseignement. La religion, à cette époque, était encore, non une mère consolatrice, mais une puissance despotique qui, par la voix de ses ministres, ordonnait, frappait, faisait tout courber sous sa volonté ; elle était un sujet d'effroi pour quiconque voulait, en libre penseur, agir et donner aux hommes souffrants quelque encouragement, et dans le malheur, quelques consolations morales. Unis par le cœur, par la fortune et par la charité, nos temples furent les seuls autels où l'on n'avait pas méconnu le vrai Dieu, où l'homme pouvait encore se dire homme, où l'enfant pouvait espérer trouver plus tard un protecteur, et l'abandonné des amis.
Plusieurs siècles se sont passés et tous ont ajouté quelques fleurs de plus à la couronne maçonnique. Ce furent des martyrs, des hommes lettrés, des législateurs, qui ajoutèrent à sa gloire en s'en faisant les défenseurs et les conservateurs. Au dix-neuvième siècle, le Spiritisme vient, avec son clair flambeau, donner la main aux commandeurs, aux rose-croix, et d'une voix tonnante leur crie : Allons, mes frères, le suis vraiment la voix qui se fait entendre à l'Orient et à laquelle l'Occident répond, disant : Gloire, honneur, victoire aux enfants des hommes ! Quelques jours encore, et le Spiritisme aura franchi le mur qui sépare la plupart de l'enceinte du temple des secrets ; et, de ce jour, la société verra fleurir en son sein la plus belle fleur spirite qui, en laissant tomber ses pétales, donnera une semence régénératrice de vraie liberté. Le Spiritisme a fait des progrès, mais du jour où il aura donné la main à la franc-maçonnerie, toutes difficultés seront vaincues, tout obstacle sera levé, la vérité se sera fait jour, et le plus grand progrès moral sera accompli ; il aura franchi les premières marches du trône où il doit régner bientôt.
A vous, salut fraternel et amitié,
Jacques de Molé (Médium, Mlle Béguet).
III
J'ai pris un charme très grand à me mêler aux discussions de ce centre si profondément spiritualiste, et je reviens attiré par Guttemberg, comme je l'avais été l'autre jour par Jacquart.
La meilleure partie de la dissertation du grand typographe a traité la question à un point de vue de métier, et il n'a vu principalement dans cette belle invention que le côté pratique, matériel, utilitaire. Elargissons le débat, et prenons la question de plus haut.
Ce serait une erreur de croire que l'imprimerie est venue se substituer à l'architecture, car celle-ci restera pour continuer son rôle d'historiographe, au moyen de monuments caractéristiques, frappés au coin de l'esprit de chaque siècle, de chaque génération, de chaque révolution humanitaire. Non ; disons-le hautement, l'imprimerie n'est rien venue renverser ; elle est venue pour compléter, et pour son œuvre spéciale, grande et émancipatrice ; elle est arrivée à son heure, comme toutes les découvertes qui éclosent providentiellement ici-bas. Contemporain du moine qui a inventé la poudre, et qui, par là, a bouleversé le vieil art des batailles, Guttemberg a apporté un nouveau levier à l'expansion des idées. Ne l'oublions pas : l'imprimerie ne pouvait avoir sa légitime raison d'être que par l'émancipation des masses et le développement intellectuel des individus. Sans ce besoin à satisfaire, sans cette nourriture, cette manne spirituelle à distribuer, l'imprimerie se fût longtemps encore débattue dans le vide, et n'eût été considérée que comme le rêve d'un fou, ou comme une utopie sans portée. N'est-ce point ainsi que furent traités les premiers inventeurs, disons mieux, ceux qui, les premiers, découvrirent et constatèrent les propriétés de la vapeur ? Faites naître Guttemberg dans les îles Andaman, et l'imprimerie avorte fatalement.
Donc l'idée : voilà le levier primordial qu'il faut considérer. Sans l'idée, sans le travail fécond des penseurs, des philosophes, des idéologues, et même des moines songeurs du moyen âge, l'imprimerie fût restée lettre morte. Guttemberg peut donc brûler plus d'un cierge en l'honneur des dialecticiens de l'école qui ont fait germer l'idée, et dégrossi les intelligences. L'idée fiévreuse, qui revêt une forme plastique dans le cerveau humain, est et restera toujours le plus grand moteur des découvertes et des inventions. Créer un besoin nouveau au milieu des sociétés modernes, c'est ouvrir un nouveau chemin à l'idée perpétuellement novatrice ; c'est pousser l'homme intelligent à la recherche de ce qui satisfera ce nouveau besoin de l'humanité ; c'est pourquoi, partout où l'idée sera souveraine, partout où elle sera accueillie avec respect, partout enfin où les penseurs seront honorés, on est sûr de progresser vers Dieu.
La franc-maçonnerie, contre laquelle on a tant crié, contre laquelle l'Eglise romaine n'a pas eu assez d'anathèmes, et qui n'en a pas moins survécu, la franc-maçonnerie a ouvert ses temples à deux battants au culte émancipateur de l'idée. Dans son sein, toutes les questions les plus graves ont été traitées, et, avant que le Spiritisme n'eût fait son apparition, les vénérables et les grands-maîtres savaient et professaient que l'âme est immortelle, et que les mondes visibles et invisibles communiquent entre eux. C'est là, dans ces sanctuaires où les profanes n'étaient pas admis, que les Swedemborg, les Pasqualis, les Saint-Martin, obtinrent de foudroyants résultats ; c'est là où la grande Sophia, cette inspiratrice éthérée, vint enseigner à ces premiers-nés de l'humanité, les dogmes émancipateurs où 89 a puisé ses principes féconds et généreux ; c'est là où, bien avant vos médiums contemporains, des précurseurs de votre médianimité, de grands inconnus, avaient évoqué et fait apparaître les sages de l'antiquité et des premiers siècles de l'ère ; c'est là… Mais je m'arrête ; le cadre restreint de vos séances, le temps qui s'écoule, ne me permettent pas de m'étendre, comme je le voudrais, sur cet intéressant sujet. Nous y reviendrons plus tard. Tout ce que je dirai, c'est que le Spiritisme trouvera dans le sein des loges maçonniques une phalange nombreuse et compacte de croyants, non de croyants éphémères, mais sérieux, résolus et inébranlables dans leur foi.
Le Spiritisme réalise toutes les aspirations généreuses et charitables de la franc-maçonnerie ; il sanctionne les croyances qu'elle professe, en donnant des preuves irrécusables de l'immortalité de l'âme ; il conduit l'humanité au but qu'elle se propose : l'union, la paix, la fraternité universelle, par la foi en Dieu et en l'avenir. Est-ce que les Spirites sincères de toutes les nations, de tous les cultes et de tous les rangs, ne se regardent pas comme frères ? N'y a-t-il pas entre eux une véritable franc-maçonnerie, avec cette différence qu'au lieu d'être secrète, elle se pratique au grand jour ? Des hommes éclairés comme ceux qu'elle possède, que leurs lumières mettent au-dessus des préjugés de coterie et de castes, ne peuvent voir avec indifférence le mouvement que cette nouvelle doctrine, essentiellement émancipatrice, produit dans le monde. Repousser un élément aussi puissant de progrès moral, serait abjurer leurs principes, et se mettre au niveau des hommes rétrogrades. Non, j'en ai l'assurance, ils ne se laisseront pas déborder, car j'en vois qui, sous notre influence, vont prendre en main cette grave question.
Le Spiritisme est un courant d'idées irrésistible, qui doit gagner tout le monde : ce n'est qu'une question de temps ; or, ce serait méconnaître le caractère de l'institution maçonnique, de croire qu'elle consentira à s'annihiler, et à jouer un rôle négatif au milieu du mouvement qui pousse l'humanité en avant ; de croire surtout qu'elle jettera l'éteignoir sur le flambeau, comme si elle avait peur de la lumière.
Il est bien entendu que je ne parle ici que de la haute franc-maçonnerie, et non de ces loges faites pour l'illusion, où l'on se réunit plutôt pour manger et boire, ou pour rire des perplexités que d'innocentes épreuves causent aux néophytes, que pour discuter les questions de morale et de philosophie. Il fallait bien, pour que la franc-maçonnerie pût continuer sa large mission sans entrave, qu'il y eût de distance en distance, de rayon en rayon, de méridien en méridien, des temples en dehors du temple, des lieux profanes en dehors des lieux sucrés, de faux tabernacles en dehors de l'arche. C'est dans ces centres que des adeptes du Spiritisme ont inutilement essayé de se faire entendre.
Bref, la franc-maçonnerie a enseigné le dogme précurseur du vôtre, et professé en secret ce que vous proclamez tout haut. Je reviendrai, je l'ai dit, sur ces questions, si toutefois les grands Esprits qui président à vos travaux veulent bien le permettre. En attendant, je vous l'affirme, la doctrine spirite peut parfaitement se souder à celles des grandes loges de l'Orient. Maintenant gloire au grand Architecte !
Un ancien franc-maçon,
Vaucanson (médium, M. d'Ambel).
Dans la même séance, la présence de plusieurs dignitaires étrangers de l'Ordre maçonnique motiva la question suivante :
Quel concours le Spiritisme peut-il trouver dans la Franc-Maçonnerie ?
Plusieurs dissertations furent obtenues sur ce sujet.
I
Monsieur le Président, je vous remercie de votre aimable invitation ; c'est la première fois qu'une de mes communications a été lue à la Société spirite de Paris, et ce ne sera pas, je l'espère, la dernière.
Vous avez peut-être trouvé dans mes réflexions un peu longues sur l'imprimerie quelques pensées que vous n'approuvez pas complètement ; mais, en réfléchissant à la difficulté que nous éprouvons à nous mettre en relation avec les médiums et à employer leurs facultés, vous voudrez bien passer légèrement sur certaines expressions ou certains tours de langage que nous ne sommes pas toujours à même de maîtriser. Plus tard, l'électricité fera sa révolution médianimique, et comme tout sera changé dans la manière de reproduire la pensée de l'Esprit, vous ne trouverez plus de ces lacunes quelquefois regrettables, surtout quand les communications sont lues devant des étrangers.
Vous avez parlé de la franc-maçonnerie, et vous avez raison d'espérer trouver en elle de bons éléments. Que demande-t-on à tout maçon initié ? De croire à l'immortalité de l'âme, au divin Architecte, d'être bienfaisants, dévoués, sociables, dignes et humbles. On y pratique l'égalité sur la plus large échelle ; il y a donc dans ces sociétés une affinité avec le Spiritisme tellement évidente qu'elle frappe les yeux.
La question du Spiritisme a été portée à l'ordre du jour dans plusieurs loges, et voici quel en a été le résultat : on a lu de volumineux rapports bien embrouillés sur ce sujet, mais on ne l'a pas étudié à fond, ce qui fait que là, comme en beaucoup d'autres endroits, on a discuté sur une chose que l'on ne connaissait pas, la jugeant sur ouï-dire bien plus que sur la réalité. Cependant beaucoup de maçons sont Spirites, et travaillent grandement à propager cette croyance ; toutes les oreilles écoutent, et si l'habitude dit : Non ; la raison dit : Oui.
Espérez donc ; car le temps est un racoleur sans égal ; par lui les impressions se modifient, et nécessairement, dans le vaste champ des études ouvertes dans les loges, l'étude spirite entrera comme complément ; car cela est déjà dans l'air ; on a ri, on a parlé : on ne rit plus, on médite.
Alors donc vous aurez une pépinière spirite dans ces sociétés essentiellement libérales ; par elles, vous entrerez pleinement dans cette seconde période qui doit préparer les voies promises. Les hommes intelligents de la maçonnerie vous béniront à leur tour ; car la morale des Esprits donnera un corps à cette secte tant compromise, tant redoutée, mais qui a fait plus de bien qu'on ne croit.
Tout a un laborieux enfantement, une affinité mystérieuse ; et si cela existe pour ce qui trouble les couches sociales, cela est bien plus vrai pour ce qui conduit à l'avancement moral des peuples.
Guttemberg (Médium, M. Leymarie.)
II
Mon cher frère en doctrine (l'Esprit s'adresse à l'un des francs-maçons spirites présents à la séance), je viens avec bonheur répondre au bienveillant appel que tu fais aux Esprits qui ont aimé et fondé les institutions franc-maçonniques. Pour cimenter cette association généreuse, deux fois j'ai versé mon sang ; deux fois les places publiques de cette cité ont été teintes du sang du pauvre Jacques Molé. Chers frères, faudra-t-il le donner une troisième ? Je dirai avec bonheur : Non. Il vous l'a été dit : Plus de sang, plus de despotisme, plus de bourreaux ! Une société de frères, d'amis, d'hommes pleins de bonne volonté qui ne désirent qu'une chose : connaître la vérité pour faire le bien ! Je ne m'étais point encore communiqué dans cette assemblée ; tant que vous avez parlé science spirite, philosophie spirite, j'ai cédé la place aux Esprits qui sont plus aptes à vous donner des conseils sur ces divers points, et j'attendais patiemment, sachant que mon tour viendrait ; il y a temps pour tout, de même il y a moment pour tous ; aussi, je crois que l'heure a sonné et que le moment est opportun. Je puis donc venir vous dire quelle est mon opinion touchant le Spiritisme et la franc-maçonnerie.
Les institutions maçonniques ont été pour la société un acheminement au bonheur. A une époque où toute idée libérale était considérée comme un crime, il fallait aux hommes une force qui, tout en étant soumise aux lois, n'était pas moins émancipée : émancipée par ses croyances, par ses institutions et par l'unité de son enseignement. La religion, à cette époque, était encore, non une mère consolatrice, mais une puissance despotique qui, par la voix de ses ministres, ordonnait, frappait, faisait tout courber sous sa volonté ; elle était un sujet d'effroi pour quiconque voulait, en libre penseur, agir et donner aux hommes souffrants quelque encouragement, et dans le malheur, quelques consolations morales. Unis par le cœur, par la fortune et par la charité, nos temples furent les seuls autels où l'on n'avait pas méconnu le vrai Dieu, où l'homme pouvait encore se dire homme, où l'enfant pouvait espérer trouver plus tard un protecteur, et l'abandonné des amis.
Plusieurs siècles se sont passés et tous ont ajouté quelques fleurs de plus à la couronne maçonnique. Ce furent des martyrs, des hommes lettrés, des législateurs, qui ajoutèrent à sa gloire en s'en faisant les défenseurs et les conservateurs. Au dix-neuvième siècle, le Spiritisme vient, avec son clair flambeau, donner la main aux commandeurs, aux rose-croix, et d'une voix tonnante leur crie : Allons, mes frères, le suis vraiment la voix qui se fait entendre à l'Orient et à laquelle l'Occident répond, disant : Gloire, honneur, victoire aux enfants des hommes ! Quelques jours encore, et le Spiritisme aura franchi le mur qui sépare la plupart de l'enceinte du temple des secrets ; et, de ce jour, la société verra fleurir en son sein la plus belle fleur spirite qui, en laissant tomber ses pétales, donnera une semence régénératrice de vraie liberté. Le Spiritisme a fait des progrès, mais du jour où il aura donné la main à la franc-maçonnerie, toutes difficultés seront vaincues, tout obstacle sera levé, la vérité se sera fait jour, et le plus grand progrès moral sera accompli ; il aura franchi les premières marches du trône où il doit régner bientôt.
A vous, salut fraternel et amitié,
Jacques de Molé (Médium, Mlle Béguet).
III
J'ai pris un charme très grand à me mêler aux discussions de ce centre si profondément spiritualiste, et je reviens attiré par Guttemberg, comme je l'avais été l'autre jour par Jacquart.
La meilleure partie de la dissertation du grand typographe a traité la question à un point de vue de métier, et il n'a vu principalement dans cette belle invention que le côté pratique, matériel, utilitaire. Elargissons le débat, et prenons la question de plus haut.
Ce serait une erreur de croire que l'imprimerie est venue se substituer à l'architecture, car celle-ci restera pour continuer son rôle d'historiographe, au moyen de monuments caractéristiques, frappés au coin de l'esprit de chaque siècle, de chaque génération, de chaque révolution humanitaire. Non ; disons-le hautement, l'imprimerie n'est rien venue renverser ; elle est venue pour compléter, et pour son œuvre spéciale, grande et émancipatrice ; elle est arrivée à son heure, comme toutes les découvertes qui éclosent providentiellement ici-bas. Contemporain du moine qui a inventé la poudre, et qui, par là, a bouleversé le vieil art des batailles, Guttemberg a apporté un nouveau levier à l'expansion des idées. Ne l'oublions pas : l'imprimerie ne pouvait avoir sa légitime raison d'être que par l'émancipation des masses et le développement intellectuel des individus. Sans ce besoin à satisfaire, sans cette nourriture, cette manne spirituelle à distribuer, l'imprimerie se fût longtemps encore débattue dans le vide, et n'eût été considérée que comme le rêve d'un fou, ou comme une utopie sans portée. N'est-ce point ainsi que furent traités les premiers inventeurs, disons mieux, ceux qui, les premiers, découvrirent et constatèrent les propriétés de la vapeur ? Faites naître Guttemberg dans les îles Andaman, et l'imprimerie avorte fatalement.
Donc l'idée : voilà le levier primordial qu'il faut considérer. Sans l'idée, sans le travail fécond des penseurs, des philosophes, des idéologues, et même des moines songeurs du moyen âge, l'imprimerie fût restée lettre morte. Guttemberg peut donc brûler plus d'un cierge en l'honneur des dialecticiens de l'école qui ont fait germer l'idée, et dégrossi les intelligences. L'idée fiévreuse, qui revêt une forme plastique dans le cerveau humain, est et restera toujours le plus grand moteur des découvertes et des inventions. Créer un besoin nouveau au milieu des sociétés modernes, c'est ouvrir un nouveau chemin à l'idée perpétuellement novatrice ; c'est pousser l'homme intelligent à la recherche de ce qui satisfera ce nouveau besoin de l'humanité ; c'est pourquoi, partout où l'idée sera souveraine, partout où elle sera accueillie avec respect, partout enfin où les penseurs seront honorés, on est sûr de progresser vers Dieu.
La franc-maçonnerie, contre laquelle on a tant crié, contre laquelle l'Eglise romaine n'a pas eu assez d'anathèmes, et qui n'en a pas moins survécu, la franc-maçonnerie a ouvert ses temples à deux battants au culte émancipateur de l'idée. Dans son sein, toutes les questions les plus graves ont été traitées, et, avant que le Spiritisme n'eût fait son apparition, les vénérables et les grands-maîtres savaient et professaient que l'âme est immortelle, et que les mondes visibles et invisibles communiquent entre eux. C'est là, dans ces sanctuaires où les profanes n'étaient pas admis, que les Swedemborg, les Pasqualis, les Saint-Martin, obtinrent de foudroyants résultats ; c'est là où la grande Sophia, cette inspiratrice éthérée, vint enseigner à ces premiers-nés de l'humanité, les dogmes émancipateurs où 89 a puisé ses principes féconds et généreux ; c'est là où, bien avant vos médiums contemporains, des précurseurs de votre médianimité, de grands inconnus, avaient évoqué et fait apparaître les sages de l'antiquité et des premiers siècles de l'ère ; c'est là… Mais je m'arrête ; le cadre restreint de vos séances, le temps qui s'écoule, ne me permettent pas de m'étendre, comme je le voudrais, sur cet intéressant sujet. Nous y reviendrons plus tard. Tout ce que je dirai, c'est que le Spiritisme trouvera dans le sein des loges maçonniques une phalange nombreuse et compacte de croyants, non de croyants éphémères, mais sérieux, résolus et inébranlables dans leur foi.
Le Spiritisme réalise toutes les aspirations généreuses et charitables de la franc-maçonnerie ; il sanctionne les croyances qu'elle professe, en donnant des preuves irrécusables de l'immortalité de l'âme ; il conduit l'humanité au but qu'elle se propose : l'union, la paix, la fraternité universelle, par la foi en Dieu et en l'avenir. Est-ce que les Spirites sincères de toutes les nations, de tous les cultes et de tous les rangs, ne se regardent pas comme frères ? N'y a-t-il pas entre eux une véritable franc-maçonnerie, avec cette différence qu'au lieu d'être secrète, elle se pratique au grand jour ? Des hommes éclairés comme ceux qu'elle possède, que leurs lumières mettent au-dessus des préjugés de coterie et de castes, ne peuvent voir avec indifférence le mouvement que cette nouvelle doctrine, essentiellement émancipatrice, produit dans le monde. Repousser un élément aussi puissant de progrès moral, serait abjurer leurs principes, et se mettre au niveau des hommes rétrogrades. Non, j'en ai l'assurance, ils ne se laisseront pas déborder, car j'en vois qui, sous notre influence, vont prendre en main cette grave question.
Le Spiritisme est un courant d'idées irrésistible, qui doit gagner tout le monde : ce n'est qu'une question de temps ; or, ce serait méconnaître le caractère de l'institution maçonnique, de croire qu'elle consentira à s'annihiler, et à jouer un rôle négatif au milieu du mouvement qui pousse l'humanité en avant ; de croire surtout qu'elle jettera l'éteignoir sur le flambeau, comme si elle avait peur de la lumière.
Il est bien entendu que je ne parle ici que de la haute franc-maçonnerie, et non de ces loges faites pour l'illusion, où l'on se réunit plutôt pour manger et boire, ou pour rire des perplexités que d'innocentes épreuves causent aux néophytes, que pour discuter les questions de morale et de philosophie. Il fallait bien, pour que la franc-maçonnerie pût continuer sa large mission sans entrave, qu'il y eût de distance en distance, de rayon en rayon, de méridien en méridien, des temples en dehors du temple, des lieux profanes en dehors des lieux sucrés, de faux tabernacles en dehors de l'arche. C'est dans ces centres que des adeptes du Spiritisme ont inutilement essayé de se faire entendre.
Bref, la franc-maçonnerie a enseigné le dogme précurseur du vôtre, et professé en secret ce que vous proclamez tout haut. Je reviendrai, je l'ai dit, sur ces questions, si toutefois les grands Esprits qui président à vos travaux veulent bien le permettre. En attendant, je vous l'affirme, la doctrine spirite peut parfaitement se souder à celles des grandes loges de l'Orient. Maintenant gloire au grand Architecte !
Un ancien franc-maçon,
Vaucanson (médium, M. d'Ambel).
(Société spirite de Paris, 17 janvier 1864. ‑ Médium, madame Costel.)
Je viens à vous, mes amis, à vous qui êtes les éprouvés et les
prolétaires de la souffrance ; je viens vous saluer, braves et dignes
ouvriers, au nom de la charité et de l'amour. Vous êtes les bien-aimés
de Jésus dont je fus l'ami ; reposez-vous dans la croyance spirite,
comme je me suis reposé sur le sein de l'envoyé divin. Ouvriers, vous
êtes les élus dans la voie douloureuse de l'épreuve, où vous marchez les
pieds saignants et le cœur découragé. Frères, espérez ! Toute peine
porte avec elle son salaire ; toute journée laborieuse a son soir de
repos. Croyez en l'avenir qui sera votre récompense, et ne cherchez pas
l'oubli, qui est impie. L'oubli, mes amis, c'est l'ivresse égoïste ou
brutale ; c'est la faim pour vos enfants et les pleurs pour vos femmes.
L'oubli est une lâcheté. Que penseriez-vous d'un ouvrier qui, sous le
prétexte d'une légère fatigue, déserterait l'atelier et interromprait
lâchement la journée commencée ? Mes amis, la vie est la journée de
l'éternité ; accomplissez bravement son labeur ; ne rêvez pas un repos
impossible ; n'avancez pas l'heure de l'horloge des temps ; tout vient à
point : la récompense au courage et la bénédiction au cœur ému qui se
confie à la justice éternelle.
Soyez Spirites : vous deviendrez forts et patients, parce que vous apprendrez que les épreuves sont un gage assuré de progrès, et qu'elles vous ouvriront l'entrée des séjours heureux où vous bénirez les souffrances qui vous en auront ouvert l'accès.
A vous tous, ouvriers et amis, mes bénédictions. J'assiste à vos assemblées, car vous êtes les bien-aimés de celui qui fut
Jean L'Évangéliste.
Soyez Spirites : vous deviendrez forts et patients, parce que vous apprendrez que les épreuves sont un gage assuré de progrès, et qu'elles vous ouvriront l'entrée des séjours heureux où vous bénirez les souffrances qui vous en auront ouvert l'accès.
A vous tous, ouvriers et amis, mes bénédictions. J'assiste à vos assemblées, car vous êtes les bien-aimés de celui qui fut
Jean L'Évangéliste.
Dictée spontanée faisant partie d'une série d'instructions sur la théorie des fluides.
(Paris, 11 novembre 1863. ‑ Médium, mademoiselle A. C.)
La progression de toutes choses amène nécessairement à la transsubstantiation, et la médianimité spirituelle est une des forces de la nature qui y fera arriver plus vite notre planète, car elle doit, comme tous les mondes, subir la loi de l'avancement et de la transformation. Non seulement son personnel humain, mais toutes ses productions minérales, végétales et animales, ses gaz et ses fluides impondérables, doivent aussi se perfectionner et se transformer en substances plus épurées. La science, qui a déjà travaillé cette question si intéressante de la formation de ce monde, a reconnu qu'il n'a pas été créé d'une parole, ainsi que le dit la Genèse, dans une sublime allégorie, mais qu'il a subi, pendant une longue suite de siècles, des transformations qui ont produit des couches minérales de diverses natures. En suivant la gradation de ces couches, on voit apparaître successivement et se multiplier les productions végétales ; on trouve plus tard la trace des animaux, ce qui indique qu'à cette époque seulement les corps organisés avaient trouvé la possibilité d'y vivre.
En étudiant la progression des êtres animés, comme on l'a fait pour les minéraux et les végétaux, on reconnaît que ces êtres, coquillages d'abord, se sont élevés graduellement dans l'échelle animale, et que leur progression a suivi celle des productions et de l'épuration du sol ; on remarque en même temps la disparition de certaines espèces, dès que les conditions physiques nécessaires à leur vie n'existent plus. C'est ainsi, par exemple, que les grands sauriens, monstres amphibies, et les mammifères géants dont on ne retrouve plus que les fossiles, ont totalement disparu de la terre avec les conditions d'existence que les inondations avaient créées pour eux. Les déluges, étant un des moyens de transformation de la terre, ont été presque généraux ; c'est-à-dire que, pendant une certaine période, ils ont bouleversé le globe et ont amené ainsi des productions végétales et des fluides atmosphériques différents. L'homme, de même que tous les êtres organiques, a paru sur la terre, lorsqu'il a pu y trouver les conditions nécessaires à son existence.
Là s'arrête la création matérielle par les seules forces de la nature ; là commence le rôle de l'Esprit incarné dans l'homme pour le travail, car il doit concourir à l'œuvre commune ; il doit, en travaillant pour lui-même, travailler à l'amélioration générale. Aussi le voyons-nous, dès les premières races, cultiver la terre, la faire produire pour ses besoins corporels, et par là amener des transformations dans le sol, dans ses produits, dans ses gaz et dans ses fluides. Plus la terre se peuple, plus les hommes la travaillent, la cultivent et l'assainissent, plus ses produits sont abondants et variés ; l'épuration de ses fluides amène peu à peu la disparition des espèces végétales et animales vénéneuses et nuisibles à l'homme, qui ne peuvent plus exister dans un air trop épuré et trop subtil pour leur organisation, et ne leur fournit plus les éléments nécessaires à leur entretien. L'état sanitaire du globe s'est sensiblement amélioré depuis son origine ; mais comme il laisse encore beaucoup à désirer, c'est l'indice qu'il s'améliorera encore par le travail et l'industrie de l'homme. Ce n'est pas sans dessein que celui-ci est poussé à s'établir dans les contrées les plus ingrates et les plus insalubres ; déjà il a rendu habitables des pays infestés par les animaux immondes et les miasmes délétères ; peu à peu les transformations qu'il fait subir au sol amèneront l'épuration complète.
Par le travail, l'homme apprend à connaître et à diriger les forces de la nature. On peut suivre dans l'histoire le fil des découvertes et des conquêtes de l'esprit humain, et l'application qu'il en a faite à ses besoins et à ses satisfactions. Mais en suivant cette filière, on doit remarquer aussi que l'homme s'est dégrossi, dématérialisé ; et si l'on veut faire le parallèle de l'homme d'aujourd'hui avec les premiers habitants du globe, on jugera du progrès déjà accompli ; on verra que plus l'homme progresse, plus il est excité à progresser davantage, et que la progression est en raison du progrès accompli. Aujourd'hui le progrès marche à grande vitesse et entraîne forcément les retardataires.
Nous venons de parler du progrès physique, matériel, intelligent ; mais voyons le progrès moral et l'influence qu'il doit avoir sur le premier.
Le progrès moral s'est éveillé en même temps que le développement matériel, mais il a été plus lent, parce que l'homme se trouvant au milieu d'une création toute matérielle, avait des besoins et des aspirations en harmonie avec ce qui l'entourait. En avançant, il a senti le spirituel se développer et grandir en lui, et, aidé par les influences célestes, il a commencé à comprendre la nécessité de la direction intelligente de l'Esprit sur la matière ; le progrès moral a continué son développement, et, à différentes époques, des Esprits avancés sont venus guider l'humanité, et donner une plus grande impulsion à sa marche ascendante ; tels sont Moïse, les prophètes, Confucius, les sages de l'antiquité et le Christ, le plus grand de tous quoique le plus humble sur la terre. Le Christ a donné à l'homme une idée plus grande de sa propre valeur, de son indépendance et de sa personnalité spirituelle. Mais ses successeurs étant bien inférieurs à lui n'ont pas compris l'idée grandiose qui brille dans tous ses enseignements ; ils ont matérialisé ce qui était spirituel ; de là l'espèce de statu quo moral dans lequel s'est arrêtée l'humanité. Le progrès scientifique et intelligent continue sa marche, le progrès moral se traîne lentement. N'est-il pas certain que, si depuis le Christ, tous ceux qui ont professé sa doctrine l'eussent pratiquée, les hommes se fussent épargné bien des maux, et seraient aujourd'hui plus avancés moralement ?
Le Spiritisme vient hâter ce progrès en dévoilant à l'humanité terrestre ses destinées, et déjà nous voyons sa force par le nombre de ses adeptes et la facilité avec laquelle il est compris. Il va amener une transformation morale active, et, par la multiplicité des communications médianimiques, le cœur et l'Esprit de tous les incarnés seront travaillés par les Esprits amis et instructeurs. De cette instruction va naître une nouvelle impulsion scientifique, car de nouvelles voies vont être ouvertes à la science qui dirigera ses recherches vers les nouvelles forces de la nature qui se révèlent ; les facultés humaines qui se développent déjà, se développeront davantage encore par le travail médianimique.
Le Spiritisme, accueilli d'abord par les âmes tendres et inconsolables de la perte de leurs parents et amis, l'a été ensuite par les malheureux de ce monde, dont le nombre est grand, et qui ont été encouragés et soutenus dans leurs épreuves par sa doctrine à la fois si douce et si fortifiante ; il s'est ainsi propagé rapidement, et beaucoup d'incrédules étonnés, qui l'ont d'abord étudié en curieux, ont été convaincus quand ils y ont trouvé pour eux-mêmes des espérances et des consolations.
Aujourd'hui les savants commencent à s'émouvoir, et quelques-uns d'entre eux l'étudient sérieusement, et l'admettent connue force naturelle inconnue jusqu'à présent ; en y appliquant leur intelligence, leurs connaissances déjà acquises, ils feront faire un pas scientifique immense à l'humanité.
Mais les Esprits ne se bornent pas à l'instruction scientifique ; leur devoir est double, et ils doivent surtout cultiver votre moral. A côté des études de la science, ils vous feront, et vous font dès à présent, travailler votre vous-même ; les incarnés intelligents et désireux d'avancer, comprendront que leur dématérialisation est la meilleure condition pour l'étude progressive, et que leur bonheur présent et futur y est attaché.
Remarque. ‑ C'est ainsi que le monde, après avoir atteint un certain degré d'élévation dans le progrès intellectuel, va entrer dans la période du progrès moral dont le Spiritisme lui ouvre la route. Ce progrès s'accomplira par la force des choses et amènera naturellement la transformation de l'humanité, par l'élargissement du cercle des idées dans le sens spirituel, et par la pratique intelligente et raisonnée des lois morales enseignées par le Christ. La rapidité avec laquelle les idées spirites se propagent au milieu même du matérialisme qui domine notre époque, est l'indice certain d'un prompt changement dans l'ordre des choses ; il suffit pour cela de l'extinction d'une génération, car déjà celle qui s'élève s'annonce sous de tout autres auspices.
La progression de toutes choses amène nécessairement à la transsubstantiation, et la médianimité spirituelle est une des forces de la nature qui y fera arriver plus vite notre planète, car elle doit, comme tous les mondes, subir la loi de l'avancement et de la transformation. Non seulement son personnel humain, mais toutes ses productions minérales, végétales et animales, ses gaz et ses fluides impondérables, doivent aussi se perfectionner et se transformer en substances plus épurées. La science, qui a déjà travaillé cette question si intéressante de la formation de ce monde, a reconnu qu'il n'a pas été créé d'une parole, ainsi que le dit la Genèse, dans une sublime allégorie, mais qu'il a subi, pendant une longue suite de siècles, des transformations qui ont produit des couches minérales de diverses natures. En suivant la gradation de ces couches, on voit apparaître successivement et se multiplier les productions végétales ; on trouve plus tard la trace des animaux, ce qui indique qu'à cette époque seulement les corps organisés avaient trouvé la possibilité d'y vivre.
En étudiant la progression des êtres animés, comme on l'a fait pour les minéraux et les végétaux, on reconnaît que ces êtres, coquillages d'abord, se sont élevés graduellement dans l'échelle animale, et que leur progression a suivi celle des productions et de l'épuration du sol ; on remarque en même temps la disparition de certaines espèces, dès que les conditions physiques nécessaires à leur vie n'existent plus. C'est ainsi, par exemple, que les grands sauriens, monstres amphibies, et les mammifères géants dont on ne retrouve plus que les fossiles, ont totalement disparu de la terre avec les conditions d'existence que les inondations avaient créées pour eux. Les déluges, étant un des moyens de transformation de la terre, ont été presque généraux ; c'est-à-dire que, pendant une certaine période, ils ont bouleversé le globe et ont amené ainsi des productions végétales et des fluides atmosphériques différents. L'homme, de même que tous les êtres organiques, a paru sur la terre, lorsqu'il a pu y trouver les conditions nécessaires à son existence.
Là s'arrête la création matérielle par les seules forces de la nature ; là commence le rôle de l'Esprit incarné dans l'homme pour le travail, car il doit concourir à l'œuvre commune ; il doit, en travaillant pour lui-même, travailler à l'amélioration générale. Aussi le voyons-nous, dès les premières races, cultiver la terre, la faire produire pour ses besoins corporels, et par là amener des transformations dans le sol, dans ses produits, dans ses gaz et dans ses fluides. Plus la terre se peuple, plus les hommes la travaillent, la cultivent et l'assainissent, plus ses produits sont abondants et variés ; l'épuration de ses fluides amène peu à peu la disparition des espèces végétales et animales vénéneuses et nuisibles à l'homme, qui ne peuvent plus exister dans un air trop épuré et trop subtil pour leur organisation, et ne leur fournit plus les éléments nécessaires à leur entretien. L'état sanitaire du globe s'est sensiblement amélioré depuis son origine ; mais comme il laisse encore beaucoup à désirer, c'est l'indice qu'il s'améliorera encore par le travail et l'industrie de l'homme. Ce n'est pas sans dessein que celui-ci est poussé à s'établir dans les contrées les plus ingrates et les plus insalubres ; déjà il a rendu habitables des pays infestés par les animaux immondes et les miasmes délétères ; peu à peu les transformations qu'il fait subir au sol amèneront l'épuration complète.
Par le travail, l'homme apprend à connaître et à diriger les forces de la nature. On peut suivre dans l'histoire le fil des découvertes et des conquêtes de l'esprit humain, et l'application qu'il en a faite à ses besoins et à ses satisfactions. Mais en suivant cette filière, on doit remarquer aussi que l'homme s'est dégrossi, dématérialisé ; et si l'on veut faire le parallèle de l'homme d'aujourd'hui avec les premiers habitants du globe, on jugera du progrès déjà accompli ; on verra que plus l'homme progresse, plus il est excité à progresser davantage, et que la progression est en raison du progrès accompli. Aujourd'hui le progrès marche à grande vitesse et entraîne forcément les retardataires.
Nous venons de parler du progrès physique, matériel, intelligent ; mais voyons le progrès moral et l'influence qu'il doit avoir sur le premier.
Le progrès moral s'est éveillé en même temps que le développement matériel, mais il a été plus lent, parce que l'homme se trouvant au milieu d'une création toute matérielle, avait des besoins et des aspirations en harmonie avec ce qui l'entourait. En avançant, il a senti le spirituel se développer et grandir en lui, et, aidé par les influences célestes, il a commencé à comprendre la nécessité de la direction intelligente de l'Esprit sur la matière ; le progrès moral a continué son développement, et, à différentes époques, des Esprits avancés sont venus guider l'humanité, et donner une plus grande impulsion à sa marche ascendante ; tels sont Moïse, les prophètes, Confucius, les sages de l'antiquité et le Christ, le plus grand de tous quoique le plus humble sur la terre. Le Christ a donné à l'homme une idée plus grande de sa propre valeur, de son indépendance et de sa personnalité spirituelle. Mais ses successeurs étant bien inférieurs à lui n'ont pas compris l'idée grandiose qui brille dans tous ses enseignements ; ils ont matérialisé ce qui était spirituel ; de là l'espèce de statu quo moral dans lequel s'est arrêtée l'humanité. Le progrès scientifique et intelligent continue sa marche, le progrès moral se traîne lentement. N'est-il pas certain que, si depuis le Christ, tous ceux qui ont professé sa doctrine l'eussent pratiquée, les hommes se fussent épargné bien des maux, et seraient aujourd'hui plus avancés moralement ?
Le Spiritisme vient hâter ce progrès en dévoilant à l'humanité terrestre ses destinées, et déjà nous voyons sa force par le nombre de ses adeptes et la facilité avec laquelle il est compris. Il va amener une transformation morale active, et, par la multiplicité des communications médianimiques, le cœur et l'Esprit de tous les incarnés seront travaillés par les Esprits amis et instructeurs. De cette instruction va naître une nouvelle impulsion scientifique, car de nouvelles voies vont être ouvertes à la science qui dirigera ses recherches vers les nouvelles forces de la nature qui se révèlent ; les facultés humaines qui se développent déjà, se développeront davantage encore par le travail médianimique.
Le Spiritisme, accueilli d'abord par les âmes tendres et inconsolables de la perte de leurs parents et amis, l'a été ensuite par les malheureux de ce monde, dont le nombre est grand, et qui ont été encouragés et soutenus dans leurs épreuves par sa doctrine à la fois si douce et si fortifiante ; il s'est ainsi propagé rapidement, et beaucoup d'incrédules étonnés, qui l'ont d'abord étudié en curieux, ont été convaincus quand ils y ont trouvé pour eux-mêmes des espérances et des consolations.
Aujourd'hui les savants commencent à s'émouvoir, et quelques-uns d'entre eux l'étudient sérieusement, et l'admettent connue force naturelle inconnue jusqu'à présent ; en y appliquant leur intelligence, leurs connaissances déjà acquises, ils feront faire un pas scientifique immense à l'humanité.
Mais les Esprits ne se bornent pas à l'instruction scientifique ; leur devoir est double, et ils doivent surtout cultiver votre moral. A côté des études de la science, ils vous feront, et vous font dès à présent, travailler votre vous-même ; les incarnés intelligents et désireux d'avancer, comprendront que leur dématérialisation est la meilleure condition pour l'étude progressive, et que leur bonheur présent et futur y est attaché.
Remarque. ‑ C'est ainsi que le monde, après avoir atteint un certain degré d'élévation dans le progrès intellectuel, va entrer dans la période du progrès moral dont le Spiritisme lui ouvre la route. Ce progrès s'accomplira par la force des choses et amènera naturellement la transformation de l'humanité, par l'élargissement du cercle des idées dans le sens spirituel, et par la pratique intelligente et raisonnée des lois morales enseignées par le Christ. La rapidité avec laquelle les idées spirites se propagent au milieu même du matérialisme qui domine notre époque, est l'indice certain d'un prompt changement dans l'ordre des choses ; il suffit pour cela de l'extinction d'une génération, car déjà celle qui s'élève s'annonce sous de tout autres auspices.